En France seul un inventeur sur six est une femme.
Voilà ce qui ressort de la dernière étude de l’Office européen des brevets, qui s’est penché sur l’écart Homme-Femme en termes d’inventions. Si en Europe aucun pays n’atteint la parité. C’est la Lettonie qui occupe la première place du classement avec 30 % des inventions créées par des femmes.
Classée 13e sur 34, la France fait mieux que certains de nos très proches voisins comme la Suisse ou l’Allemagne, avant-dernière. Si en Europe, le taux moyen des femmes inventrices atteint à peine plus de 10 %, ces chiffres sont en évolution selon Yann Ménière, économiste en chef à l’Office européen des brevets.
"On observe une tendance claire, régulière à l'augmentation de la part des femmes parmi les inventeurs. Mais toujours à un niveau faible.
On part de 2 % dans les années 70 en Europe, jusqu'à 13 % en 2020 d'après nos derniers résultats. Donc, on a une tendance positive, mais un résultat qui est toujours très faible. Et à ce rythme-là, il faudra encore plusieurs décennies pour atteindre la parité en matière d'invention."
Cette étude vient questionner une nouvelle fois la représentation des femmes dans les sciences dures. Les femmes qui innovent ont en tout cas pour point commun d’être bien plus présentes au sein des universités que dans les entreprises. Dans le domaine des inventions, leur présence minoritaire s’explique en partie par le mécanisme du tuyau percé selon l’étude. Mécanisme qui stipule que plus l’on monte dans la hiérarchie professionnelle scientifique, moins il y a de femmes du fait des nombreux obstacles qu’elles peuvent rencontrer durant leur parcours.
Pour la chimiste et chercheuse française, Claire Grison, lauréate du prix de l’inventeur européen en 2022. Il est important de lutter contre les stéréotypes qui favorisent ce mécanisme.
"Il y a un stéréotype culturel, qui est donc assez problématique. Et qui laisserait suggérer que les hommes sont meilleurs en science et plus inventifs. Même si ces aspects ne sont pas fondés scientifiquement, ils ne sont pas fondés biologiquement parlant. Cet héritage socio-culturel influe énormément sur les choix, consciemment ou pas. Et est une source, peut-être, d'orientation précoce vers des disciplines qui sont moins élitistes."
De plus le faible nombre de femmes inventrices n’est pas sans conséquences pour la société selon Yann Ménière.
"C'est aussi un enjeu économique. On ne peut pas se permettre de ne pas exploiter le potentiel d'invention des femmes en Europe. On sait que la diversité dans les équipes d'inventeurs, dans les activités d'innovation, est un élément très important de la qualité de l'innovation."
Il y a également selon Claire Grison, un débat complémentaire sur le statut du brevet relatif à une invention. Brevet, qui est pour elle bien plus qu’un enjeu financier.
"On expliquait qu'un brevet c'est une chance de protéger les résultats de recherche. Pour qu'ils se donnent une chance d'être industrialisés. En d'autres termes, transformer des résultats de recherche en quelque chose d'utile pour la société."
Les femmes sont également surreprésentés parmi les chercheurs peu connus au sein de leur propre pays. Si vous connaissez certainement Marie Curie. Saviez-vous que c’est une femme, Hedy Lamarr, actrice américaine qui a créé le wifi ?
Reportage réalisé par Vincent Le Pape