Chaque mois, dans le studio d'euradio Paris, les Jeunes Européens se penchent sur un thème européen. En avril, c'est Mathis Puyo, des Jeunes Européens et du magazine eurocitoyen Le Taurillon, évoquer la stratégie industrielle de défense de l'Union européenne.
euradio : De quoi vas-tu nous parler aujourd’hui Mathis ?
Mathis : Je vais te parler de la stratégie industrielle de défense de l’Union européenne… Eh oui, la guerre en Ukraine déclenchée par Vladimir Poutine en février 2022 a réveillé les Européens. Rapidement, les pays de l’UE ont assuré leur soutien à l’Ukraine à travers des livraisons d’armes. Mais, armer l’Ukraine consiste à piocher dans les stocks nationaux tout en accélérant la production sur le territoire. Or, la chute de l’URSS a profondément modifié les systèmes industriels de défense. En effet, la disparition de la menace d’une guerre Etat contre Etat a entraîné des coupes budgétaires dans les budgets de défense afin d’obtenir des dividendes de la paix. Alors plusieurs stratégies ont été élaborées, certains pays ont fait le choix de faire confiance aux Etats-Unis et à l’OTAN pour leur protection tandis que d’autres ont choisi de réduire leur armée et l’appareil productif au strict minimum. Et donc, de fil en aiguille, au déclenchement de la guerre à haute intensité par la Russie, l’industrie d’armement européenne n’était pas prête pour assurer ses besoins et ceux de l’Ukraine.
euradio : Quelle a été l’action de la Commission européenne ?
Mathis : Le 5 mars, la Commission européenne dévoile, l’EDIS, l’European defense industrial strategy.
Elle vise à préparer les industriels européens à un conflit de haute intensité, type Ukraine-Russie et à renforcer la sécurité d’approvisionnement de l’UE. Les objectifs sont clairs: acquérir de manière collaborative des équipements de défense, consacrer 60% des budgets d’acquisition de défense au marché de l’UE et renforcer les achats de défense intra-UE.
Pour cela, la Commission européenne se dote d’un arsenal législatif modernisé : l’EDIP pour European Defense Industry Programme. Doté pour le moment d’un budget de 1,5 milliards € sur la période 2025-2027. Il prévoit la création d’un fonds pour accélérer la transformation des chaînes d’approvisionnement de la défense (Fund to Accelerate defense Supply chain Transformation, FAST) avec une focalisation sur les PME. Aussi l'objectif est de renforcer des mécanismes déjà existants !
Le FED (Fonds européen de défense) soutient des projets de recherche et de développement transnationaux. Doté d’un budget de 8 milliards € sur la période 2021-2027 et s’adressant particulièrement au PME. Nous avons aussi, l’ASAP (Action de soutien à la production de munitions) qui mobilise 500 millions € du budget de l’UE sous forme de subventions pour soutenir la cadence de production et éviter une rupture d’approvisionnement de munitions sol-sol, d’artillerie et de missiles. Enfin, le dernier venu, l’EDIRPA qui encourage la coopération entre les Etats membres pour l’achat conjoint d’équipement militaire. Au moins 65% des composants finaux du produit acheté doivent provenir de l’UE ou d’un pays associé. L’acquisition conjointe doit rassembler au moins trois Etats membres afin d’encourager la compétitivité de l’industrie de la défense européenne.
euradio : Allons-nous donc vers une industrie de la défense européenne ?
Mathis : Pour le moment, les actions de la Commission européenne restent minimes mais marquent cependant un tournant. L’issue de la guerre en Ukraine dépend de la capacité de l’UE à répondre à l’agression russe tandis que le probable retour à la maison Blanche de Donald Trump incite les européens à prendre leur destin entre leur main, chose que nous aurions dû faire depuis bien longtemps, et qui est aujourd’hui impératif.
Retrouvez une nouvelle chronique des Jeunes Européens en mai prochain !