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Logement indigne, sans-abrisme : comment l'Europe peut-elle lutter contre ce fléau ?

© LjubisaDanilovic Logement indigne, sans-abrisme : comment l'Europe peut-elle lutter contre ce fléau ?
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Au moins 895 000 personnes sont sans abri en Europe en 2022. C’est l’équivalent de la population d’une ville comme Marseille ou Turin. Ce chiffre alarmant provient du rapport  8e regard sur le mal-logement en Europe publié début septembre par la Fondation Abbé Pierre et la Fédération européenne des associations nationales travaillant avec les sans-abri (FEANTSA). Quels sont les dangers du mal-logement et du sans-abrisme ? Quelles sont les recommandations de la fondation Abbé Pierre ? Sarah Coupechoux, chargée d’étude Europe à la Fondation répond à ces questions au micro de Lou Surrans de Euradio Paris. 

Euradio : Comment qualifier la situation en Europe ?

Sarah Coupechoux : C'est vrai qu'on avait à cœur depuis plusieurs années de refaire une estimation du nombre de sans domicile pour être plus précis en Europe. Pour rappel, un sans-abri, c'est une personne qui vit dans la rue, un sans domicile. C'est une personne qui vit dans la rue ou dans un hébergement, que ce soit un hébergement d'urgence ou un hébergement d'une plus longue durée. Donc effectivement, on a travaillé sur ces données cette année et à partir de données existantes pour essayer de tirer une estimation, sachant qu'il n'existe pas de modélisation des données en Europe. On a donc fait à partir de ce qui existe dans quelques pays en Europe et des centres de statistiques puisque certains pays font le job, si j'ose dire, c'est à dire qu'ils font l'effort vraiment de comptabiliser.

Euradio : Ce chiffre de 895 0000 personnes sans abri en Europe, c'est pour l'année 2022 ou 2023 ?

Sarah Coupechoux : Alors on est plutôt sur 2022 et sur certaines catégories de sans domicile. Donc, on est sur les personnes qui sont à la rue. Les personnes qui sont dans des hébergements d'urgence et celles qui sont dans des hébergements plus généralistes donc, par exemple, une personne qui est en bidonville ou une personne qui est hébergée chez un tiers, ne sont pas comptabilisées dans ce chiffre. Il faut comprendre que c'est une estimation basse.

Euradio : Comment se fait la répartition sur le territoire européen de ces personnes qui sont sans abri, voire qui sont dans un hébergement indigne ? Est-ce que c'est assez homogène ?

Sarah Coupechoux : Alors ce qui est homogène, c'est que l'on retrouve des personnes sans domicile partout en Europe, donc dans l'ensemble des pays de l'Union européenne. Par contre, on a des pays qui sont plus ou moins ambitieux sur les politiques de lutte contre le sans-abrisme. Par exemple, en Finlande, il y a une politique qui s'appelle "le logement d'abord". Cela consiste à donner un logement avant toute chose à une personne qui est sans abri et ensuite de lui fournir un accompagnement qui est adapté à sa situation. Et là, le nombre de sans domicile est en diminution. La Finlande, c'est à peu près 5 000 000 d'habitants, ce sont donc des volumes bien moins importants qu'en France où on est bien plus nombreux et où les politiques restent à améliorer.

Euradio : Justement, en France, quelle est la situation ?

Sarah Coupechoux : Alors en France, aujourd'hui, on dénombre 330 000 places hébergements. Donc, on peut considérer que avec les personnes dans la rue comptabilisées et ou estimées  et les personnes en bidonvilles on est environ sur 330 000 sans domicile. C'est un chiffre qui est en augmentation. Néanmoins, l'étude qui permet d'avoir une estimation aussi des hébergés chez les tiers, et cetera n'a pas été réalisée depuis 2012. 

Euradio : Et dans ce rapport vous évoquez les dangers liés à l'habitat indigne. Pouvez-vous nous expliquer déjà ce que c'est un habitat indigne et quels sont les dangers ?

Sarah Coupechoux : C'est l'habitat qui ne permet pas d'assurer la sécurité et des conditions sanitaires dignes et suffisantes pour les personnes qui y vivent. Ce sont des maisons qui sont parfois avec des toits qui fuient, de la moisissure ou parfois qui peuvent être dangereux parce que le bâti tombe. On sait que ça peut avoir des conséquences dramatiques. Ça a été le cas par exemple à Marseille avec l'effondrement en 2018 de deux immeubles, ça a été le cas aussi à Londres avec l'incendie de la tour Grenfell. Mais, ça peut être aussi des phénomènes dramatiques, avec des personnes qui sont touchées à titre individuel, dans ces habitats qui ne correspondent pas aux normes d'habitabilité digne au regard du droit international.

Pour en savoir plus sur ce rapport et connaître les recommandations de la Fondation Abbé Pierre écoutez l'interview !