Sophia Berrada, vous êtes rédactrice en chef du Taurillon, pouvez-vous nous parler de ce média ?
Le Taurillon est le média de l’association des Jeunes Européens. C’est un média qui comme Euradio traite de l'actualité européenne sous toutes ses coutures : politique, économique, sociale, culturelle, sportive…
Les deux brins qui forment l’ADN du Taurillon sont l’identité fédéraliste, et le fait que l’on soit un média participatif : tous ceux qui souhaitent prendre la plume seront accompagnés dans leur rédaction et peuvent proposer des articles sur notre site internet.
Le Taurillon existe depuis 2005, il est né suite au rejet du projet de constitution européenne par référendum en France. Il s’est depuis beaucoup développé et nous avons des rédactions cousines qui existent dans 6 autres pays européens.
Vous avez décidé de consacrer votre chronique hebdomadaire à l’état de droit en Europe.
L’Etat de droit est au cœur de l’actualité européenne : les atteintes à la pluralité des opinions, à la liberté de la presse, les défis de la lutte contre la corruption ou encore l’indépendance de la justice sont autant d’aspects qui représentent de réels enjeux dans le vieux continent.
La Hongrie et la Pologne par exemple figurent régulièrement au menu des débats au parlement européen, compte tenu des atteintes plurielles qui s’y passent à l’encontre des minorités, des figures d’opposition et de la presse. La présidente de la commission européenne Ursula von der Leyen dit vouloir faire de la lutte pour garantir l’état de droit une priorité de son mandat. Depuis l’an dernier la commission publie un rapport annuel pour évaluer dans chaque pays de l’union la santé de l’état de droit, répertorier les points de vigilance voire les motifs de grande inquiétude.
Chaque semaine, je consacrerai donc cette chronique à l’état de droit en Europe : que ce soit pour donner de la visibilité à des événements particuliers quelque part en Europe, ou pour suivre la politique européenne sur la question.
Au Taurillon, le volet “liberté de la presse” du rapport sur l’état de droit dans l’UE retient particulièrement votre attention.
Oui, c’est ça ! C’est presque un poncif de le dire : l’Europe, c’est le continent sur lequel être journaliste est le moins dangereux. Pourtant la liberté de la presse y est régulièrement entravée. Pour preuve, on dénombre aujourd’hui trois journalistes européens tués (le grec Giorgos Karaiva, le néerlandais Peter R. de Vries et le géorgien ALEKSANDR “LEKSO” LASHKARAVA) dans l’exercice de leur fonction depuis le 1er janvier dernier. En Pologne et en Hongrie, des lois menacent la vitalité des médias qui sont critiques des gouvernements. Partout en Europe, que ce soit en France, en Allemagne, en Scandinavie, ou en Europe de l’Est, partout vraiment, les journalistes craignent pour leur sécurité lorsqu’ils couvrent des manifestations, ils sont aussi victimes de harcèlement en ligne, où sous le joug de procédures judiciaires visant à les intimider.
Ce ne sont que quelques exemples, mais au Taurillon nous pensons qu’il est nécessaire de parler sans cesse de la liberté de la presse, du fait qu’il est indispensable d’avoir une presse en bonne santé pour vivre dans une démocratie.
C’est pour ça que la prochaine édition de l’événement qu’on organise chaque année, qui s’appelle Les Journées de la presse européenne, est consacrée à un état des lieux de la liberté de la presse en Europe.
Quels seront les temps forts de ces Journées de la presse européenne ?
Spontanément j’ai envie de répondre qu’il n’y aura que des temps forts ! Il y aura des temps consacrés à l’étude de cas particuliers dans différents pays. La Pologne, où l’actualité est très forte, avec une experte et un journaliste polonais qui nous racontera son expérience. Mais aussi la Grèce en particulier sur la couverture médiatique de la crise migratoire avec Marina Rafenberg, correspondante pour le monde et Louisa Gouliamaki, photojournaliste, qui ont toutes les deux été sur le pont en 2015 à Lesbos. On verra aussi le cas de l’Italie avec l’influence de la mafia, ou le discours de l’extrême-droit en Espagne dans les médias d’information en continu.
On étudiera aussi des questions plus générales, inhérentes à la liberté de la presse en elle-même : comment on finance un média tout en garantissant son indépendance, comment on lutte contre la désinformation, comme les insitutions européennes peuvent réguler les médias tout en garantissant la liberté de la presse. Des journalistes et experts brillants et inspirants qu’on admire beaucoup au Taurillon seront présents pour répondre à ces questions.
Où et quand se tiendront ces Journées de la presse européenne ?
Elles se tiendront à Toulouse où la liberté de la presse et la lutte face à l'oppression ont une valence singulière de par son histoire. Comme c’est une ville ouverte sur la Méditerranée et la péninsule ibérique, nous avons prévu de porter une focale particulière sur les pays d’Europe du sud, comme l’Italie, l’Espagne et en par (qu’ils en soient natifs ou qu’ils y soient correspondants) viendront à Toulouse pour témoigner de leur expérience.
Ca se passera donc à Toulouse, du 15 au 17 octobre. C’est une date qui nous tenait à coeur d’autant plus parce qu’elle est forte de sens compte tenu du calendrier : le 16 octobre ça fera quatre ans que la journaliste Daphne Caruana Galizia aura été assassinée pour son travail d’investigation sur la corruption du gouvernement maltais. Ca fera aussi un an pile que Samuel Paty a été tué dans l’attentat terroriste que l’on connaît. Un hommage leur sera rendu lors des Journées de la presse européenne. Pour trouver toutes les informations sur l’événement, j’invite chacun à aller sur la page facebook de l’événement “Les Journées de la presse européenne 2021” ou sur le site internet du Taurillon.
Sophia Berrada au micro de Laurence Aubron