Pourquoi les femmes sont-elles sous représentées en Europe dans la recherche scientifique ?
Témoignages et explications de deux mathématiciennes, Assia Mahboubi et Anne Boyé.
L’égalité de genre figure au cœur des objectifs du programme européen pour l’innovation et la recherche. En effet, seulement 33% des chercheurs européens sont des femmes. Une sous représentation liée à des stéréotypes de genre mais aussi à la précarité dans le milieu de la recherche comme l’explique Assia Mahboubi, chercheuse en mathématiques et informatique à Nantes et lauréate de la bourse 2020 du Conseil européen de la recherche :
" D’une part il y a une image sociale que le scientifique c’est un ingénieur et pas une ingénieure, que c’est un chercheur en mathématiques et pas une chercheuse. Au delà des mathématiques et de l’informatique, les carrières de la recherche aujourd’hui sont très exigeantes d’un point de vue de la vie personnelle il faut être prêt à avoir beaucoup de mobilité et beaucoup de précarité dans les contrats qu’on enchaîne avant d’avoir un poste confortable. Cela impose parfois des choix difficiles sur la vie personnelle et là on rejoint d’autres thématiques comme des problèmes de répartition dans les familles aujourd’hui."
La France mauvaise élève
La France avec environ 26% de chercheuses se situe même en dessous de la moyenne européenne. Un manque de représentation liée à la faible part des femmes dans les filières scientifiques et en particulier les mathématiques.
Pour comprendre cet écart, il faut se tourner du côté de l’histoire pour Anne Boyé, mathématicienne et présidente de l’association Femmes et mathématiques.
"Pendant très longtemps, des siècles et des siècles, on a pensé que les filles n’étaient pas capables de faire des mathématiques parce qu’ elles n’étaient pas capables d'accéder à l’abstraction alors que les garçons l’étaient plus. Il a évidemment été démontré que c’est complètement faux mais on est encore formaté dans ces idées là.
J’ai étudié ce qu’il s’est passé particulièrement au XVIIIème, XIXème et XXème siècle dans beaucoup de pays en particulier les pays européens mais aussi les Etats-Unis et l’Union Soviétique à l’époque où l’accès des filles à l’enseignement supérieur s’est fait beaucoup plus vite qu' en France et en particulier dans les mathématiques. Je pense qu’on est assez rétrograde en France"
L’association intervient au sein des écoles pour aider les filles à dépasser leurs représentations des métiers dans les sciences ou les mathématiques.
"Il faut que les filles puissent se convaincre qu’elles sont aussi capables que les garçons de faire des sciences et en particulier des mathématiques. Il y a beaucoup de travail à faire dans l'enseignement maternel, primaire mais surtout secondaire puisque que c’est là que les choix d’études vont se faire. C'est là que nous essayons d’œuvrer envers les élèves et envers les enseignants et enseignantes."