Scène banale à la rédaction d'Euradio :
"Anne, tu ne sais toujours pas ce que tu vas expliquer à nos auditeurs dans ta chronique 'D'où ça vient' ?
- Non... Mais c'est pas grave, je le ferai demain.
- Tu as procrastiné toute la semaine, mais là ce n'est plus possible : c'est pour aujourd'hui !
- Ah... Mais je ne vais jamais y arriver...
- Tiens, tu devrais te demander : d'où ça vient, la procrastination ? Parce que la tienne atteint des profondeurs abyssales."
Mais non, je suis sûre qu'elle est totalement normale. Car tous les psychologues s'accordent à dire que cela arrive à tout le monde. La procrastination, c'est juste remettre une tâche à plus tard. Parfois, c'est parce que l'on a quelque chose de plus important à faire. Ou parce que l'on croit que cela ne prendra qu'une minute. On n'a donc pas besoin de s'en occuper maintenant !
Maintenant justement, le confinement n'arrange pas les choses : pourquoi faire aujourd'hui ce que l'on a jusqu'au 11 mai pour faire ? Une voix me souffle aussi à l'oreille que ma procrastination pourrait devenir une maladie... Effectivement, pour la psychologue Rebecca Grief, derrière toute procrastination, il y a de l'anxiété. On remettrait à plus tard la tâche qui nous ferait peur, sans même nous en rendre compte. Une anxiété qui peut être liée aussi à un manque de confiance en soi : la peur de ne pas réussir ce que l'on doit faire.
Le "procrastinateur chronique" va alors s'enfermer dans un cercle vicieux, puisque plus il va attendre pour faire ce qu'il a à faire, plus il va probablement s'approcher dangereusement de la "deadline"... Et stresser encore plus par manque de temps !
Mais c'est aussi l'évolution qui a fait de nous des "procrastinateurs". Dans la Préhistoire, nos ancêtres devaient chercher de la nourriture et assurer leur survie au jour le jour. Pas de place donc pour de la procrastination. Plus tout à fait le cas aujourd'hui. Or, rester scotché à Candy Crush au lieu de réviser pour ses examens, ce serait un reste d'impulsivité primaire. Celle qui nous fait nous concentrer sur notre victoire à Candy Crush, plutôt que sur un projet de long terme, qui nous paraît bien trop lointain.
Mais en plus, nous ne sommes pas tous égaux face à la procrastination. Des chercheurs de l'université du Colorado ont suggéré qu'elle vient de nos gènes. Ils ont posé des questions à des jumeaux, des cobayes parfaits puisqu'ils partagent le même ADN. Résultat : quand l'un des deux jumeaux était un grand "procrastinateur", l'autre l'était aussi. La corrélation réelle reste à prouver, mais ce que l'on peut conclure : ne vous privez pas de procrastiner pendant le confinement !