Lincubacteur Loire et Sillon est une pépinière d’entreprises installée à Saint-Etienne de Montluc. Depuis deux ans, la structure propose des cycles de formation pour les femmes créatrices d’entreprises. “We’re In !” est un projet européen, financé dans le cadre d’Erasmus +, avec pour objectif de multiplier les échanges avec des femmes entrepreneures en Belgique, Allemagne et Espagne.
Perrine Edelin, vous êtes directrice de Lincubacteur Estuaire et Sillon, qui est à la fois un hôtel d'entreprises, un espace de coworking et une pépinière d'entreprise. Pouvez-vous nous détailler votre structure ?
C’est un tiers lieu à vocation économique puisqu'on s'adresse aussi bien à des porteurs de projets, qu'à des créateurs d'entreprise et des entreprises en développement. Avec ce panel de pépinière, hôtel et espace de Coworking.
Concrètement, qu'est ce qu'on vient y faire ? Qui accueillez-vous ?
Alors on vient au départ pour profiter d'un lieu puisqu'on a un espace qui est confortable où l'on propose des bureaux et des ateliers. Ensuite on accompagne les entrepreneurs qui le souhaitent et qui sont hébergés au sein de la pépinière et de Lincubacteur. De manière générale, on peut les accompagner dans le lancement ou le développement de leur activité et je dirais que la cerise sur le gâteau, c'est qu'on fait vivre ce lieu et on l’anime. Donc ceux qui le fréquentent viennent aussi chercher des échanges et des interactions avec d'autres entrepreneurs.
On connaît les incubateurs installés dans les métropoles ou proches des grandes villes. Là, vous êtes dans un secteur un peu plus rural, est-ce que ça change les demandes et les besoins formulés par les habitants ? Et est-ce que ça change un peu votre fonctionnement ?
Alors, il faut savoir que c'est une initiative qui part de la collectivité, donc ici la Communauté de communes Estuaire et Sillon, qui a voulu monter cet équipement justement pour pouvoir proposer une offre plus locale. Comme vous venez de le dire, on a ce type de structure soit sur Nantes et sa métropole, soit sur Saint-Nazaire, donc ici, il y avait une volonté de pouvoir être plus actif et plus présent sur le territoire.
Après, concrètement, les besoins sont les mêmes, qu'on soit en milieu rural ou en milieu urbain. Je dirais que la petite différence, c'est qu'on est sur des entreprises qui ont vraiment à cœur de pouvoir œuvrer aussi pour le développement de leur territoire. Elles font en sorte de pouvoir créer davantage de relations avec le tissu économique, avec les entrepreneurs voisins. Donc il y a peut être cette dimension là de proximité, qui est un petit peu différente que dans un dans un espace plus urbain. Mais effectivement, les besoins sont les mêmes : besoin d'échanges, de conseils, de mise en réseau et en relation.
Ce territoire entre deux, entre Nantes et Saint-Nazaire, n'est pas toujours évident à animer. Mais il y a vraiment un besoin spécifique sur ce territoire.
Exactement, c'est un territoire qui est tiraillé entre Nantes et Saint-Nazaire et en même temps, c'est un territoire qui a une position hyper stratégique parce qu'il a la chance d'être entre les deux. On accueille beaucoup d'entreprises qui démarrent en disant, je veux être ici parce que justement, je vais pouvoir travailler aussi bien avec Nantes qu’avec Saint-Nazaire. Et je vais aussi pouvoir me connecter rapidement avec la région bretonne, puisqu'on est idéalement situé le long de la quatre voies, Nantes-Vannes. Du coup, il y a vraiment cette logique de se dire, je suis au milieu de deux polarités.
Lincubacteur a été soutenu par l'Union européenne dans le cadre du dispositif Erasmus plus. Pouvez-vous nous expliquer ce que ça veut dire ?
Depuis maintenant deux ans, on est lauréat d'un programme européen qui s'appelle Erasmus +, et notre projet s'appelle “We are in”. L’idée est née d’un constat avec une des entreprises que j'ai accompagnée au sein de Lincubacteur. Le cabinet Eleo Conseil est spécialisé dans le montage et le financement de projets européens. On est parti du constat qu’à un moment, le taux d'occupation de Lincubacteur était à peu près de 50-50 entre des femmes entrepreneures et des hommes entrepreneurs, ce qui était une certaine particularité par rapport aux chiffres nationaux. On s'est dit, comment peut-on profiter de cette force au sein de la pépinière pour pouvoir la mettre en avant ?
On sait que les femmes entrepreneures sont de plus en plus nombreuses, mais elles ont toujours une petite appréhension ou une crainte et elles vont se censurer au moment de la création, par rapport aux hommes. Donc comment à travers ce programme, qui favorise plutôt les dimensions emploi, formation, comment on peut soutenir l'entreprenariat au féminin sans être féministe, mais je trouve que c'est toujours intéressant.
Et donc comment vous y êtes vous pris ? Vous avez tissé des partenariats dans d'autres pays européens ?
Exactement ! On a monté ce projet avec d'autres partenaires. On est avec un réseau de femmes entrepreneures en Belgique qui s'appelle les Mompreneurs. On est en partenariat avec l'université de Sarrebruck, en Allemagne. Et on a deux autres partenaires espagnols, l’université de Vigo et un réseau d'entreprises de cette région. Les 6 partenaires partagent de la méthodologie.
Par exemple, on a formé les différents partenaires au co-développement. Les Allemands nous ont apporté de la méthodologie sur l'animation d'un workshop-créativité pour pouvoir faire émerger une idée d'entreprise pour les femmes. Les Espagnols ont eu la possibilité de proposer une bande dessinée qu'on a maintenant traduite dans les différentes langues. Les Belges ont créé une vidéo avec des témoignages d'entrepreneures.
Donc voilà le principe : pouvoir s’échanger de la méthodologie, se nourrir de nos expériences pour pouvoir être encore plus efficaces auprès du public, des entrepreneures, dans nos régions respectives.
Ensuite la deuxième chose qui est proposée dans ce programme-là, ce sont les échanges comme le principe d'Erasmus pour les étudiants. Sauf qu’ici ça s'adresse à des femmes entrepreneures qui pendant quatre ou cinq jours, ont envie d'aller découvrir comment ça se passe dans les pays voisins.
On a eu la chance il y a 15 jours maintenant, d'accueillir trois entrepreneures belges qui ont partagé leur expérience avec des entrepreneures françaises. On a essayé de matcher leurs activités pour qu'il y ait une vraie connivence et cohérence dans leurs activités. Et puis elles ont aussi participé à des tables rondes, visité des entreprises pour qu'y ait des échanges multiculturels.
Et qu'est-ce qui ressort concrètement pour ceux et celles qui fréquentent Lincubacteur chez vous, à Saint Etienne de Montluc ? Est-ce que ça te débouche sur des projets et des initiatives concrètes ?
Ce qui est assez intéressant quand les trois Belges sont venues, c'est que certaines se sont rendu compte qu'elles avaient des connexions. A chaque fois il y avait toujours soit quelqu'un qui allait aller en Belgique, soit quelqu'un qui allait venir en France. Aussi certaines ont déjà prévu de se revoir, parce qu'elles ont apprécié le moment et qu'elles ont envie de le poursuivre.
Je ne sais pas encore si ça donne concrètement des échanges de business. Mais en tout cas, ce sont des échanges de méthodologie et de compétences. Un partage d'expérience qui va se poursuivre d'autant plus que le programme court encore sur une partie de l'année 2022. On va donc avoir la possibilité de refaire une autre mobilité au mois de mai.
Quel est l'objectif à terme de ce projet ?
Pour nous en tant que pilote de ce projet là, c'est enrichissant dans notre travail au quotidien. Parce qu’on apprend de la méthodologie de nos voisins. Moi dans mon quotidien aujourd'hui, je pense aux Allemands, aux Espagnols en disant, tiens, je pourrais le faire comme ça parce que la dernière fois que je suis allé chez eux, il le faisait comme ça.
Pour le public cible du projet, on a pu mettre en place des actions dans les différents pays de manière simultanée. Pendant qu’on forme ici des femmes à devenir des chefs d'entreprise, les Belges font la même chose, les Espagnols font la même chose. Et ça c'est important parce qu’on peut leur proposer aussi des formations, des workshops, de la mobilité, du co-développement à des tarifs avantageux parce que nous même, on est soutenu par l'Europe.
Est ce que porter des femmes entrepreneures, ça vous a donné une certaine notoriété dans ce domaine ?
Alors notoriété... je ne sais pas si je suis identifiée maintenant comme la structure qui soutient plus les femmes que d'autres. Toujours est-il que c’est un moyen de pouvoir communiquer sur l'offre que propose Lincubacteur sur l'accompagnement à la création. Et ça nous a permis aussi de favoriser les échanges et les réseaux.
Je pense que certaines femmes qui avaient un projet et qui n'osaient pas encore passer le cap ont franchi le pas, grâce au témoignage et aux échanges avec d’autres femmes qui s’étaient lancées. Ça a forcément suscité d'autres vocations et c'est la vocation de Lincubacteur de toujours sensibiliser à l'entrepreneuriat et soutenir la création d'entreprise.
Si on peut s'adresser à des publics qui ont un petit peu moins le courage de se lancer ou qui ont plus de craintes au départ, c’est tant mieux.
On le rappelle, Lincubacteur Estuaire et Sillon est situé à Saint-Étienne-de-Montluc. Si on veut entrer en contact avec vous, on fait comment ?
Alors le plus simple, je dirais, c'est d'aller directement sur le site Internet Lincubacteur.fr ou de prendre contact par mail ou par téléphone. On est une équipe de deux sur place donc on a toujours la possibilité de vous accueillir. Et puis j'ai envie de dire il faut y aller même si on n'est pas sûr qu'on correspond en termes de cible. Si on se pose des questions, il faut pousser la porte, venir. Et on pourra toujours voir s'il y a une solution pour les besoins de chacun.