Céline Papin est adjointe au maire de Bordeaux, et également vice-présidente de Bordeaux Métropole en charge de l'équilibre des territoires, des relations internationales et du dialogue citoyen. Elle évoque pour nous le caractère européen de Bordeaux et les projets européens de la Métropole. Un entretien réalisé par Laurence Aubron.
Déployer fortement la dimension européenne de vos actions à Bordeaux Métropole, c'est une priorité de votre mandat ?
Oui, c'est une priorité pour nous depuis notre arrivée à la municipalité de Bordeaux et à Bordeaux Métropole. Vous le savez, la famille politique dont je suis issue place l'Europe au premier plan de son projet politique. Nous sommes convaincus que c'est le bon niveau pour relever un certain nombre de défis qui nous semblent primordiaux, comme par exemple la question du défi climatique. Donc pour nous clairement, l'Europe est une priorité de notre politique des relations internationales à Bordeaux et à la métropole.
Depuis une vingtaine d'années, on voit que Bordeaux bénéficie d'une excellente image associant dynamisme et qualité de vie. Elle occupe aussi assez régulièrement les pelotons de tête dans les classements européens. Comment expliquez-vous cet attrait ?
On est une ville qui allie à la fois une richesse historique, patrimoniale, et une qualité de vie certaine. Bordeaux est également riche de sa population dans sa diversité, riche d'initiatives citoyennes. Logiquement, je dirais que la ville de Bordeaux offre un certain nombre d'opportunités et de perspectives tout à fait intéressantes et qui attirent bien au-delà de notre territoire français.
L'art contemporain, c'est l'occasion d'interroger cette question de l'identité européenne.
Céline Papin
Alors des projets, il y en a en pagaille à Bordeaux et notamment pour cette journée du 9 mai. On va parler de deux événements forts qui vont se passer dans la métropole. Le premier, c'est un événement sur l'art contemporain européen, intitulé "Art contemporain, une touche de paradis". Comment s'est créé cet événement ? Pourquoi une telle thématique ?
C'est une thématique fort intéressante, et assez surprenante peut-être dans le contexte de la fête de l'Europe. En fait, cette thématique a émergé dans un contexte où actuellement à Bordeaux, nous sommes en pleine réflexion sur l'évolution de nos politiques culturelles, à travers un forum de la culture et une démarche participative avec les citoyens bordelais. Parallèlement, nous avions le souhait de renforcer les synergies avec les acteurs européens présents à Bordeaux, dont le Mouvement européen, qui nous a fait cette proposition en lien avec le tissu culturel bordelais. Cela nous est apparu particulièrement intéressant dans un contexte où on a une montée des nationalismes, une tendance de repli identitaire. Ainsi que des forts questionnements sur le sentiment d'appartenance à l'Union européenne dans une partie de la population. Avec ce croisement de regards, à travers l'art contemporain, c'est l'occasion d'interroger cette question de l'identité européenne, multiple.
Il y a de nombreux artistes qui vont participer à ce webinaire. Pour questionner l'Europe, justement, et en dresser peut-être un portrait. Peut-on en présenter quelques-uns ?
Alors on aura des artistes français, des artistes italiens comme Maurizio Cattelan. Des artistes issus des diasporas du Maghreb ou africaines, qui ont construit leur parcours, artistique notamment, en Europe. Ils vont venir interroger cette question de l'identité européenne et le lien aussi de l'Europe avec d'autres territoires. On le verra à travers la conférence. Par exemple, les questions migratoires interpellent de nombreux artistes et elles sont là aussi pour nous amener des grilles de lecture, des clés de compréhension sur un certain nombre de débats qui agitent aujourd'hui la scène européenne.
Une semaine de l'Europe pour sensibiliser les habitants sur l'impact qu'a l'Europe dans leur vie quotidienne.
Céline Papin
Il y a un autre événement qui va se passer sur le territoire, à Bordeaux, entre le 11 et le 17 octobre. C'est une semaine européenne organisée par Bordeaux métropole, sur des sujets et des projets qui sont très concrets pour Bordeaux.
Notre souhait, c'était effectivement de construire une semaine de l'Europe. Un temps fort pour sensibiliser les habitants de la métropole et de la ville de Bordeaux sur l'impact qu'a l'Europe dans leur vie quotidienne. A travers, notamment, les projets européens dans lesquels on peut s'inscrire en tant que collectivité et qui ont clairement des déclinaisons sur les politiques publiques menées localement. C'était aussi pour nous particulièrement important de faire le lien avec les Erasmus Days qui se déroulent sur cette même semaine. Dans la mesure où la ville de Bordeaux accueille l'agence nationale Erasmus + France et que peu de bordelais finalement sont conscients de la présence de cette agence sur notre territoire. Il nous semble important aussi de valoriser cela.
Quatre projets ont été retenus par Bordeaux Métropole. Pouvez-vous les présenter peut-être en commençant par le projet qui s'appelle le projet "Handshake".
Le projet "Handshake" est un projet dans lequel s'inscrit Bordeaux Métropole avec un consortium de plusieurs villes européennes. Il porte sur les politiques cyclables et sur la mutualisation d'expériences, d'initiatives innovantes en matière de développement des modes doux. On le sait, toutes les villes européennes sont aujourd'hui concernées par cet enjeu du report modal et de réduction des émissions de gaz à effet de serre. A travers ce type de projets, c'est en fait l'idée de s'inspirer des expériences qui réussissent dans les autres villes européennes et de pouvoir les décliner localement.
Un autre projet qui bénéficiera de fonds européens, c'est la rénovation de la Salle des fêtes du Grand Parc.
Oui, un autre projet qui, effectivement, n'a rien à voir, mais qui montre tout à fait la diversité des projets européens dans lesquels on peut s'inscrire. Là on est sur un projet de rénovation d'une salle des fêtes, donc un projet peut-être plus tangible pour le citoyen bordelais. C'est un budget de 4,4 millions d'euros dont 28 % ont été financés par l'Union européenne tout de même. C'est là aussi une manière de montrer aux citoyens bordelais que l'Europe est bien présente dans le territoire et finance des équipements de proximité.
Troisième projet qui accompagne nos élèves, et ça, c'est plutôt intéressant pour les rendre un peu plus citoyens responsables. C'est le projet proposé par le Rectorat de Bordeaux. Un projet en collaboration avec Erasmus+ qui s'appelle "Building a better world".
Il s'agit là d'une autre sorte de projet européen, les projets Erasmus+ dans lesquels sont engagés de nombreux groupes scolaires et classes et pour Bordeaux, une école d'une ville de la métropole. Sont également engagés le Royaume-Uni, l'Espagne et le Danemark. A travers ces projets, c'est bien l'idée d'accompagner nos élèves vers un comportement de citoyens responsables, de citoyens ouverts sur le monde. Et de diffuser aussi ces valeurs européennes de respect et de tolérance.
Et après la mobilité européenne, il y a un autre sujet qui intéresse également aujourd'hui beaucoup nos citoyens, ce sont les projets d'emploi. Il y a un projet proposé par Pôle Emploi.
Là, c'est vrai que c'est particulièrement intéressant parce que je pense que beaucoup d'habitants ne connaissent peut-être pas l'implication d'acteurs comme Pôle Emploi dans le champ européen. Il s'agit notamment de faire connaître l'apport de la mobilité européenne aux fins de retour à l'emploi et aussi au développement de l'emploi et de l'employabilité. En développant des compétences pour les demandeurs d'emploi, en faisant évoluer un certain nombre de représentations. C'est une déclinaison en Nouvelle-Aquitaine d'un projet national, qui est développé dans le cadre du programme Erasmus+ et qui propose environ 500 bourses de mobilité pour les demandeurs d'emploi.
Je pense qu'aujourd'hui, à l'échelle européenne, les métropoles et les grandes villes ont une voix à porter au niveau européen.
Céline Papin
Il y a une autre question que j'aimerais vous poser, Céline Papin. Quand on est une élue locale comme vous, en charge des relations internationales, est-ce qu'il est important aujourd'hui d'inscrire les métropoles européennes dans des grands réseaux européens ? Comment on vit ce rôle et cette mission ?
Je pense qu'aujourd'hui, à l'échelle européenne, les métropoles et les grandes villes ont une voix à porter au niveau européen. Tout d'abord parce que, comme je le disais préalablement, un certain nombre de défis ne peuvent être réalisés qu'à un niveau européen, mais en même temps nécessiteront une implication forte des villes. C'est aussi au niveau des villes et des grandes métropoles qu'on retrouve un certain nombre d'innovations qui sont menées, dans le champ des mobilités, des transports, du numérique. On a énormément de domaines dans lesquels les collectivités et les municipalités sont motrices pour apporter des solutions qui peuvent ensuite être déclinées à l'échelle européenne.
Nous faisons partie du réseau Eurocities et nous sommes également membre du bureau de l'Association française du Conseil des Communes et Régions d'Europe - AFCCRE - qui est un réseau français, englobé dans un autre réseau européen. Parce que nous sommes convaincus que c'est aussi par la voix des villes, qu'au niveau européen, on pourra pleinement atteindre les objectifs qui nous attendent, pour répondre aux enjeux de demain.
Oui, villes, métropoles et projets concrets pour faire comprendre l'importance de l'Europe aux citoyens.
C'est ça. Et puis j'ajouterais aussi un point qui est particulièrement important aujourd'hui à notre sens. C'est la question de l'avenir de l'Europe avec cette grande Conférence pour l'avenir de l'Europe, qui se dessine pour les mois à venir. Et qui rejoint finalement notre grande préoccupation pour une participation citoyenne plus active. En l'occurrence, nous sommes actuellement ici à Bordeaux en pleine réflexion, mais c'est également le cas dans d'autres collectivités, pour mettre en œuvre cette participation citoyenne à la définition de ce que pourrait être l'Europe de demain. Dans le cadre de la Semaine européenne en octobre, nous réfléchissons notamment à avoir un panel citoyen qui pourrait apporter la contribution bordelaise métropolitaine sur l'Europe, attendue par les citoyens.
Crédit photo : TS-mairie de bordeaux