Samedi 13 février, c'est la Journée Mondiale de la Radio, qui célèbre cette année son 10ème anniversaire et plus d'un siècle de radio. Cette édition met l'accent sur trois thèmes : Evolution - Innovation - Connexion.
L'occasion d'échanger avec Jean-Marc Dubreuil, représentant pour la France du World Dab, le Forum mondial de l'industrie pour la radio numérique DAB. L'objectif de ce forum est de faciliter l'adoption et la mise en œuvre de la radio numérique de diffusion basée sur DAB, la norme de radio numérique adoptée par les diffuseurs en Europe, en Asie-Pacifique et au-delà. Un entretien réalisé par Laurence Aubron.
"La radio est un outil puissant pour célébrer l'humanité dans toute sa diversité et constitue une plate-forme pour le discours démocratique. Au niveau mondial, la radio reste le média le plus consommé. Cette capacité unique de toucher le public le plus large signifie que la radio peut façonner l’expérience de la société dans la diversité, être l’arène où toutes les voix peuvent s'exprimer, être représentées et entendues. Les radios doivent être capable, dans leurs organisations et leurs opérations, de refléter la diversité de leurs publics." Unesco
Qu'est-ce que le DAB ?
JMD : C'est comme la TNT, télévision numérique terrestre. Il y a quelques années on a numérisé la télédiffusion. Le DAB c'est un peu la même chose pour la radio, puisqu'il s'agit de numériser la radio diffusion. La radio était le dernier média qui était 100% analogique. En France les premières diffusions en DAB ont commencé en 2014 avec Paris, Nice et Marseille.
Il y a plusieurs raisons pour lesquelles le DAB+ est intéressant. Notamment parce que la FM était saturée, alors qu'il y a énormément de radios qui voulaient des fréquences - la radio est un média très dynamique - le DAB+ permet de rajouter des canaux de diffusion. Le DAB + c'est aussi une meilleure qualité audio. Ca permet les données associées.
C'est quoi les données associées ?
JMD : Ce sont des informations sur les types de programme que vous écoutez ; ce sont des images qui sont diffusées en même temps que le programme que vous écoutez, sans avoir accès à Internet.
C'est aussi ce qu'on nomme au World Dab la radio hybride. C'est essayer de prendre le meilleur des deux mondes entre, d'une part la radiodiffusion et d'autre part Internet. Si je prends les avantages de la radiodiffusion, une fois que vous avez acheté un récepteur, tant que ce récepteur fonctionne, vous allez recevoir tout ce qui est radiodiffusé en FM et ça ne coûte rien.
Le DAB+ c'est un peu la même chose, vous achetez un récepteur, qui aura aussi la FM, vous recevez aussi gratuitement tout ce qui est radiodiffusé. Juste à côté vous allez pouvoir rajouter des informations complémentaires. Soit récupérées en radiodiffusion, ce sont les données associées, soit sur Internet. C'est pour cela que l'on parle de radio hybride.
Les diffuseurs vont pouvoir associer à leur radiodiffusion un lien internet, qui va leur permettre d'aller récupérer des informations complémentaires, diffusées sur un écran, sur lequel vous allez pouvoir par exemple, dire, il y a un jeu en cours avec le programme que vous écoutez, vous pouvez cliquer… Donc on a un peu le meilleur des deux mondes. C'est-à-dire que vous avez toute la radiodiffusion avec la stabilité, la gratuité, qui existe et de l'autre côté vous allez pouvoir récupérer des informations complémentaires sur Internet.
Que s'est-il passé en 2020 pour le DAB+ ?
JMD : La norme DAB+ est une norme européenne, notre voisin le plus proche, l'Allemagne est très en avance sur la France, puisqu'elle couvre 99% de son territoire. Elle a lancé un deuxième multiplexe national.
Les Pays-Bas est le pays qui a réalisé la transition la plus rapide vers le DAB+. C'est un pays assez facile à couvrir parce que relativement plat. Ils ont décidé d'investir lourdement sur le DAB+ pour couvrir 100% du territoire en l'espace de deux ans.
En Italie, la Raï, radio publique nationale émet en 100% numérique.
La Belgique a pris l'an dernier un tournant vers le DAB+. Toutes les radios publiques et commerciales ont décidé d'aller vers le DAB+.
Le Royaume Uni a lui été le premier pays à développer de manière massive le DAB+, où quasiment toutes les radios diffusent maintenant en DAB+. La FM et le DAB+ cohabitent au Royaume-Uni avec des décisions qui pourraient bientôt venir sur l'arrêt de la FM.
La Suisse, a confirmé qu'elle allait arrêter la FM au profit du DAB+ à compter de 2022 pour les réseaux publics et à partir de janvier 2023 pour tous les réseaux commerciaux. La radiodiffusion Suisse sera entièrement numérique.
Le moment marquant s'est passé fin 2020, avec une loi européenne, qui oblige à compter du 21 décembre 2020, tous les véhicules neufs à intégrer le DAB+ par défaut. Jusqu'à présent les véhicules neufs avaient une radio avec les Grandes ondes, la FM, maintenant elle aura aussi le DAB+. Une loi appliquée dans tous les pays de l'Union européenne mais aussi en Suisse.
La radio est avant tout une aventure nationale, donc on a, en fonction des pays, des choix, des décisions qui sont différentes d'un pays à l'autre. La Suisse qui décide d'arrêter la FM est le deuxième pays qui prend cette décision, après la Norvège, qui a déjà basculé en 100% DAB+ pour les radios nationales. ll reste encore un peu de FM, pour des radios ultra-locales.
Quelles nouveautés pour 2021 ?
JMD : En France, il va y avoir le lancement de deux multiplexes métropolitains à compter du 15 juillet prochain, les radios nationales commerciales et publiques vont pouvoir commencer à diffuser sur les autoroutes françaises. Donc le DAB+ continue de se déployer. Vous allez pouvoir découvrir des radios que vous ne connaissez pas, ou des radios locales mais qui sont sur le DAB+. C'est un pas fondamental pour le succès de cette technologie et surtout pour la valeur ajoutée qu'on peut amener à l'auditeur.
DAB+ : une norme verte ?
JMD : Oui et ça commence par le multiplexe, qui fonctionne un peu comme une copropriété. Vous allez avoir 13 radio qui vont diffuser simultanément sur une seule antenne, au lieu d'avoir treize systèmes de radiodiffusion. Donc ça fait forcément des économies d'énergie.
La BBC a aussi fait une étude comparative de point à point, de la création du programme jusqu'à l'auditeur, pour la FM, Internet et le DAB+. La conclusion de cette étude, qui est disponible de manière publique, c'est que la solution la plus vertueuse, en termes de consommation d'énergie c'est le DAB+ devant la FM et très très loin devant Internet.
Quelle sécurité par rapport aux Gafam ?
JMD : Pour les radios c'est la possibilité de contrôler la manière dont elles vont diffuser leur programme. On n'a pas de contrôleur entre les deux, on n'a pas une société type Google ou Apple ou autre, qui va décider du type de programme que vous pouvez diffuser. Les programmes appartiennent aux diffuseurs et ils ont également leurs moyens de diffusion. C'est la possibilité de contrôler ce que l'on diffuse et ne pas avoir une société tierce, basée aux Etats-Unis, qui peut bloquer la diffusion d'un programme. C'est arrivé à Radio France et d'autres programmes télés dans le passé. Donc c'est vraiment le moyen de contrôler sa diffusion et son contenu.
Un souhait pour l'avenir ?
JMD : Il faut aller le plus vite possible dans le déploiement du DAB+. Dans tous les pays qui ont déployé le DAB+, on s'est aperçu que ça avait attiré des auditeurs supplémentaires. L'exemple type c'est la Norvège, qui a arrêté la FM pour basculer en DAB+, ils ont maintenant plus d'auditeurs que ce qu'ils avaient en FM. Plus de choix, plus de programmes, une meilleure qualité, des services associés et ils ont maintenant plus d'auditeurs. Si on regarde les derniers chiffres de Mediametrie en France, on a vu que la radio avait un peu baissé en termes d'auditeurs.
Pour en apprendre plus sur le WorldDab et la radio numérique dans le monde, rendez-vous sur le site internet de WorldDab.