À l’occasion du Nantes Innovation Forum, nous sommes à la Cité des Congrès de Nantes avec Matthieu Auzanneau, directeur du Think Tank “Shift Project”.
Quel est le but de Shift Project?
Shift Project est un groupe de réflexion sur la Transition Énergétique. Nous faisons des recommandations de bon sens pour réaliser les Accords de Paris. Nous informons sur des sujets clés et difficiles, réunissons des groupes de travail pour faire des propositions qu'on va ensuite porter auprès des décideurs, chefs d’entreprises, journalistes et syndicalistes.
Selon votre Plan de transformation de l'économie française, l’objectif de neutralité carbone, nécessaire au respect de l’Accord de Paris, nécessite une réduction des émissions de GES en France de 5%/an, si on part en 2018, ou de 10%/an si on part en 2025. Quelle est la tendance? Nous sommes en phase avec les prévisions?
La tendance en France va vers la stagnation des émissions: dans certains secteurs elles baissent, mais beaucoup trop lentement; dans d’autres secteurs, comme le numérique, il y a une tendance à exploser, sans cadre de réflexion nationales cohérentes pour arriver à faire ce 5%/an, qui est déjà un défi colossal. Donc, au Shift, on ébauche un plan de transformation qui soit secteur par secteur, activité par activité, à la mesure du défi vital constitué par la transition énergétique.
Le PTEF vise deux grandes catégories d’objectifs, c’est à dire la décarbonation de notre économie, et sa résilience. Qu'envisagez-vous au niveau local pour réaliser cela ?
C’est encore un peu trop tôt pour le dire, parce que nous sommes au début du travail. Une des ambitions de ce travail c’est de regarder localement quel peut être le processus de transformation. Par exemple, ça m'intéresse beaucoup de comprendre comment, en étant sur Nantes, je suis capable d’aller expliquer aux gens qui travaillent à Angers quel peut être le métier de vos enfants ou le vôtre dans une quinzaine d’années.
Quand on parle de transformer l'énergie qui fait fonctionner la société, en premier lieu le pétrole, on parle de changer le système sanguin, puisque l'énergie c'est le sang de la société.
C'est une opération à coeur ouvert, et on doit voir, en particulier pour les jeunes, qu’est-ce que la République peut leur proposer. Mais on ne peut pas avancer dans cette conversation sans avoir la patience d'élaborer une planification. On ne prétend pas se substituer aux citoyens, mais on souhaite lancer la conversation.
Dans votre Plan on voit que l'énergie c'est le cœur de la transformation. Comment est-elle liée aux autres secteurs ?
Tout ce qui se passe est energétique. L'énergie est une grandeur physique qui mesure la transformation des choses. Une fois qu’on comprend cela, on se rend compte qu’on ne peut rien faire dans la vie sans se poser la question de la ressource énergétique.
Quels sont les projets similaires mis en place par les pays et les villes européens ?
Malheureusement, tous les pays européens sont en retard, et aucun pays au monde n’a dessiné une stratégie, une sortie des énergies fossiles, à la hauteur des périls climatiques. A l'échelle locale, il y a beaucoup d’initiatives intéressantes, et en Europe Occidentale il y a un soutien très large sur le fait que la société est malade de son addiction au pétrole, au gaz et au charbon. Ce n'est pas le cas aux Etats-unis et en Chine.
Comment communiquer tous vos objectifs à la population, de façon à stimuler un débat ?
On n'est pas encore au stade de la communication, mais on a la chance au Shift, de pouvoir s’appuyer sur un réseau de bénévoles très nombreux présents un peu partout en France et en Europe, qui vont nous aider à tester et à populariser nos idées.
Entretien réalisé par Giuseppe Sconosciuto