Il y a 20 ans, les chirurgiens de l’hôpital Edouard Herriot
ont réussi une première historique.
Denis Chatelier, 33 ans, ancien peintre en bâtiment,
marié et père de deux enfants,
entre à l’hôpital sans main et ressort avec celles d’un autre.
Une prouesse médicale qui a nécessité ensuite un long suivi,
et la réalisation d’un fantasme vieux comme l’humanité,
incarné par des oeuvres aussi diverses que la Bible, Frankenstein
ou encore le manga Gunnm (Gan mu), récemment adapté en film à succès
sous le titre Alita Battle Angel.
Mais au fait, d’où ça vient, les greffes ?
Avant d’exister, il n’est pas inutile de le répéter, elles ont été fantasmées,
et ce, dès les antiquités grecque et égyptienne.
La Bible relate une greffe de jambe, un véritable miracle
l’oeuvre de Côme, saint-patron des chirurgiens
et de son frère Damien, celui des pharmaciens.
Le plus ancien témoignage crédible de greffe réussie se trouve en Inde,
où le savant Sushruta rapporte des greffes de peau réussies sur le nez, en 800 avant J-C.
Au Moyen-äge, on trouve pêle mêle quelques techniques de greffe végétale
mais il faut attendre le 18e siècle et le médecin italien
Gaspare Tagliacozzi Trigambe pour constater des greffes des autogreffes réussies.
Greffer une partie d’un patient sur un autre reste un fantasme,
y compris lorsque l’autrichien Emerich Ulmann,
parvient à retransplanter le rein d’un chien sur ce même chien.
Au début du 20e siècle, le lyonnais Mathieu Jaboulay réussit plusieurs greffes d’organes
mais tous les patients finissent par en mourir en quelques jours.
C’est ainsi qu'est réellement découvert l’obstacle majeur à la greffe : le rejet.
Un phénomène dû au système immunitaire, qui ne sera bien défini que vers 1950.
Les radiations sont notamment envisagées pour pallier ce problème.
En 1954, les médecins parisiens, en pôle, sont coiffés au poteau par Joseph Murray.
Il réussit la première transplantation de rein au monde, entre deux jumeaux.
En 1957, la première transplantation de moelle osseuse est réussie
puis la première transplantation de foie, en 1963. Tous des américains.
La France reprend du poil de la bête avec la première greffe de coeur
réalisée avec succès en 1968, par l’équipe d’Edmond Henry.
50 ans plus tard, on a tout réussi ou presque en la matière :
deux mains à Lyon, un visage en Espagne, 2 bras à Munich, un utérus viable en Suède
et même un pénis, en Chine.
En 2020, l’allogreffe, la greffe d’humain a humain n’a plus rien d’un mythe ni d’un fantasme.
Le fantasme désormais c’est la xénogreffe, entre deux espèces proches mais différentes.
Pour l’instant essentiellement expérimentales, elles constituent, avec les greffes bioniques,
une nouvelle étape qui nous rapproche toujours plus,
si ce n’est du transhumanisme, au moins de la science-fiction.