Europe in a soundbite

La féminisation des armées européennes

La féminisation des armées européennes

Le Laboratoire d’Innovation Pédagogique sur l’Europe (LIPE) propose, de manière accessible, des approches transversales de l’histoire européenne du genre, des guerres, de l’art, des circulations et des réseaux, des grandes idéologies et débats politiques.

Le LIPE vous donne rendez-vous pour la chronique Europe in a soundbite tous les jeudis à 8h sur euradio.

A partir de quand y a-t-il des femmes dans les armées européennes ?

On repère des femmes dans les armées européennes depuis des siècles. Jusqu’au XIXe siècle, elles étaient surtout cantinières ou blanchisseuses : elles accompagnaient les armées, qu’elles fournissaient en nourriture, en vin, mais ne combattaient que très rarement. Avec la Révolution française, certaines, comme Théroigne de Méricourt, réclament le droit de porter les armes – ce qui leur est refusé. Durant les guerres du XIXe siècle, elles sont assignées à une fonction de soin auprès des soldats, fonction qui se généralise pendant la Première Guerre mondiale lorsque les premiers corps d’infirmières affectés aux armées sont créés. C’est à partir de la Grande Guerre que se forment les premiers bataillons féminins en armes : 5 000 femmes russes combattent contre la Révolution après 1917 ; des Espagnoles prennent les armes – brièvement- en 1936 contre les troupes nationalistes. Mais dans la plupart des armées européennes, elles sont intégrées dans des corps auxiliaires, et dépourvues d’armes, comme les Lottas en Finlande en 1920, l’Auxiliary Territorial Service en Grande-Bretagne en 1938, ou encore les 500 000 Allemandes qui travaillent comme secrétaires, téléphonistes, etc. dans l’armée nazie.

2 / Comment leur présence dans les armées était-elle perçue ?

L’Europe du XIXe siècle considère que le port d’armes est un attribut masculin. Les femmes sont pensées comme fragiles, vouées à la maternité et le combat semble incompatible avec la féminité : elles sont donc exclues des armées officielles. Pour combattre, certaines se travestissent alors en homme. Les représentations évoluent très lentement : pendant la Seconde Guerre mondiale, la présence des femmes surprend encore, que ce soient les volontaires françaises lors de la campagne d’Italie. C’est le cas lorsque le Comité français de libération national autorise les volontaires à participer aux opérations en 1944. En URSS à l’inverse, 800 000 femmes, aviatrices, tireuses d’élite, participent aux combats et certaines sont célébrées comme des héroïnes.

3 / Et aujourd’hui, a-t-on une situation égalitairedans les armées européennes ?

La féminisation des armées s’accroît après la Seconde Guerre mondiale, à des rythmes différents selon les pays. En France en 1946, au Royaume-Uni en 1949 avec le Women’s Royal Army Corps est créé en 1949. Il faut attendre 1989 en Espagne, et 2001 en Allemagne pour que les femmes soient officiellement admises dans les armées. Mais partout, elles restent minoritaires : 15% des effectifs en France, 12% au Portugal, seulement 3% en Italie. Car malgré les incitations juridiques, de nombreux blocages persistent : en France, la loi de 1972 a instauré en théorie l’égalité entre les sexes, mais l’École militaire de Saint-Cyr n’est ouverte aux femmes qu’en 1983, et elles ne sont admises à titre expérimental dans les équipages sous-marins qu’à partir de 2017 ! Aujourd’hui encore, hommes et femmes n’exercent pas les mêmes fonctions dans les armées européennes, les femmes participent moins aux opérations extérieures, et sont confrontées au machisme ordinaire, parfois au harcèlement sexuel.  

Europe in soundbite sur La féminisation des armées européennes a été conçu par Isabelle Matamoros.