Eurominute d'Euan Walker

Les élections turques et espagnoles

Les élections turques et espagnoles

Euan Walker est chargé de missions internationales à Mines Paris – PSL et assistant de recherche et d’enseignement à l’ESSEC. Diplômé en histoire et en sciences politiques de Durham University et de la Ruprecht-Karls Universität Heidelberg, il poursuit actuellement un master en économie et politique publique à l'ESCP. Ses analyses sont publiées sur la page Europe Info Hebdo.

Cette semaine, Euan Walker et Laurence Aubron discutent des résultats des élections qui ont eu lieu en Turquie et en Espagne le 28 mai.

Pour revenir à l’actualité européenne, la Turquie a organisé le second tour de ses élections le week-end dernier…

En effet, le président Recep Tayyip Erdogan a remporté l'élection présidentielle en Turquie, ce dimanche 28 mai 2023, contre le chef de l'opposition Kemal Kilicdaroglu. Ce second tour de l’élection annonce une troisième décennie d’exercice du pouvoir pour le chef de l’AKP. Devant ses partisan·es au palais présidentiel à Ankara, Erdogan a déclaré que le moment était venu de « mettre de côté tous les débats et les conflits concernant la période électorale et de s'unir autour de nos objectifs et de nos rêves nationaux ». Il promet aussi de lutter contre l'inflation et de panser les plaies causées par le tremblement de terre catastrophique du 6 février, qui a fait plus de 50 000 victimes – du moins déclarées - en Turquie et dans la Syrie voisine.

Comment l’opposition a-t-elle réagi à cette défait ?

Si M. Kilicdaroglu reste encore très mesuré dans ces réactions et propos, de nombreuses voix font part de leur inquiétude. Certes, l’AKP remporte la majorité à l’assemblée et confirme la position de son chef. La question se pose de savoir comment seront traités à l’avenir tous ceux·celles, apparemment nombreux·ses, qui n’adhèrent pas à cette vision pour leur pays : Kurdes, Alevis, laïc·ques, écologistes et LGBTI.

De l’autre côté de la Méditerranée, l’Espagne a aussi tenu des élections ce week-end…

Tout à fait – consécutivement à ce week-end, deux mois mouvementés se profilent pour l’Espagne. En effet, après ces élections municipales et régionales espagnoles de ce week-end, les partis de droite et d’extrême droite PP et Vox ont incontestablement prouvé leur impact remportant la majorité des scrutins. Sachant que le système électoral espagnol est organisé en trois strates – municipal, régional et général - le Premier ministre espagnol du parti socialiste PSOE, Pédro Sanchez a riposté en annonçant que les élections générales seraient avancées au 23 juillet 2023, sachant que ces dernières étaient initialement planifiées pour décembre 2023.

D’après certain·es analystes, il s’agirait là d'une stratégie pour tenter d'atténuer l'usure des partis de gauche face à la victoire de la droite aux élections de ce week-end. Sanchez appelle à une mobilisation immédiate des forces de gauche pour éviter une droite à tous les niveaux du pouvoir. L'enjeu d'une telle décision de la part de Sanchez est d'autant plus important que l'Espagne doit assurer la présidence du Conseil de l'UE dès le 1er juillet.

Dans la lignée de ce que vous avez souligné, la situation actuelle de l'Espagne a-t-elle des ramifications en Europe ?

Absolument : Le Parti populaire européen (PPE), groupe politique de droite au Parlement européen, voit dans l'Espagne l'occasion de regagner une partie de l'influence qu'il a perdue au sein du Conseil de l'UE, étant donné qu'il ne détient pas actuellement le poste de chef de gouvernement dans les cinq pays les plus peuplés de l'Union et que le poids de votes au sein du Conseil de l’UE est proportionnel au nombre d’habitants de chaque pays. Un gouvernement conservateur à Madrid renforcerait le PPE et lui permettrait aussi de pousser sa candidate, éventuellement la présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, au poste de présidente de la Commission européenne.

En lien avec ceci, la décision du Premier ministre Pedro Sánchez d'appeler à des élections anticipées a également des implications pour Ursula von der Leyen, l'actuelle présidente de la Commission européenne. Celle-ci semblait compter sur une présidence du Conseil espagnole forte pour conclure son mandat et éventuellement se présenter pour un second mandat. Les élections anticipées pourraient perturber ses projets et compromettent la dernière ligne droite avant les élections européennes.

Merci Euan, à la semaine prochaine !

Merci à vous Laurence. Chers auditeur·rices, n'hésitez pas à vous abonner à la page LinkedIn "Europe Info Hebdo" pour retrouver ces analyses et bien d'autres sorties quotidiennement - à la semaine prochaine !

Entretien réalisé par Laurence Aubron.