Dans l'Union européenne, au total, on estime que 4,4 millions de jeunes sont en décrochage scolaire, soit près d'un jeune européen sur 10. En France, selon les derniers chiffres de l'INSEE, le décrochage scolaire concerne 5 260 jeunes mineurs, dont 1500 qui ont 14 ou 15 ans.
Pour lutter contre ce problème, l'association de prévention spécialisée Itinéraires, basée à Lille, a mis en place le dispositif MaJ'Yc, pour "Mon avenir, j'y crois", dont l'objectif est d'aider les jeunes à la construction de leur projet professionnel et à leur accès à l'emploi. Un dispositif qui s'inscrit dans le programme européen IEJ, Initiative pour l’Emploi des Jeunes, qui finance des projets à destination des moins de 30 ans qui ne sont ni en emploi, ni en étude, ni en formation.
Pour parler aujourd'hui de ce dispositif, Euradio reçoit Francine Blas, responsable du dispositif de prévention au décrochage scolaire de l'association Itinéraires.
Euradio : Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce qu'est l'association Itinéraires, comment elle est née ?
F.B : L'association est née en 1991, c'est la fusion de clubs de prévention. Nous intervenons principalement sur les quartiers lillois pour aller vers les jeunes les plus éloignés. Nous sommes un peu la voiture balais du social. Les éducateurs de rue vont à la rencontre des jeunes dans la rue pour travailler avec eux. La prévention spécialisée à plusieurs grands principes, mais le principal est la libre adhésion. C'est-à-dire que le jeune décide de travailler avec nous, ou nous, nous allons le chercher. Nous avons des éducateurs qui travaillent dans les collèges, des médiateurs école-famille, qui interviennent dans les écoles primaires et qui sont là pour prévenir le décrochage scolaire. Puisqu'en effet, il y a des parents, qui déjà fragilisés par leur propre situation, ne vont pas forcément déposer leur enfant tous les jours à l'école, donc on travaille aussi avec les parents.
Euradio : Concernant le dispositif MAJ'YC, pour lutter contre le décrochage scolaire donc, est-ce que vous pouvez nous en dire un peu plus ?
F.B : Depuis 2007, nous accueillons des jeunes sortis prématurément du système scolaire, souvent sans diplôme. L'idée est de leur donner accès à un lieu avec nous, pour les aider à lever les freins à leur insertion professionnelle. L'objectif est d'avancer au rythme de chacun pour ne pas les perdre. Et si on les perd, on va les rechercher. Itinéraires, c'est aussi un chantier d'insertion qui nous permet de proposer aux jeunes, une fois qu'ils sont majeurs, un premier emploi sur un temps donné, pour pouvoir ensuite rebondir sur du droit commun, un emploi, une formation qualifiante. Par ailleurs, dans l'association, nous avons aussi fait le choix de ne pas travailler avec une entreprise d'entretien des locaux, pour proposer aux jeunes et à leurs parents, de s'occuper de l'entretien de nos locaux.
Euradio : Comment vous trouvez les jeunes que vous allez accompagner ?
F.B : Il y a plusieurs portes d'entrée. Nous avons des équipes éducatives qui travaillent dans les quartiers, il y a aussi les éducateurs dans les collèges, qui repèrent les jeunes qui vont avoir besoin d'un accompagnement éducatif. Mais notre premier partenaire à Itinéraires reste la mission locale qui connaît le type de public avec lequel on travaille, et oriente les jeunes chez nous. Les jeunes viennent donc régulièrement chez nous, quand un jeune ne vient pas, on appelle chez lui. Ce qui est important aussi, c'est d'impliquer les parents dès le début du processus. On ne lâche jamais un jeune. Un jeune qui ne vient pas, ce n'est pas un jeune qu'on va laisser tomber. Il y a par exemple des visites à domicile avec les éducateurs de quartier. On met tout en œuvre pour le jeune puisse trouver une solution.
Euradio : En moyenne, pendant combien de temps accompagnez-vous un jeune à MAJ'YC ?
F.B : Ça dépend. On peut avoir un jeune qui, parce qu'on lui a redonné confiance, quitte le dispositif au bout de quelques semaines ou quelques mois. Par exemple nous avons un jeune à MAJ'YC qui est avec nous depuis 1 an, ça fait 1 an qu'on court après lui parce qu'il était déjà en décrochage scolaire, le COVID l'a plombé. Et il a eu un déclic et commence tout juste un service civique. Parfois, les jeunes ont eu des scolarités compliquées, chaotiques, on ne leur a pas toujours dit qu'ils avaient des compétences. Nous, on est vraiment là pour leur redonner confiance et qu'ils se rendent compte qu'ils ont des compétences.
Euradio : Depuis le début du dispositif en 2007, quel bilan, quel constat vous pouvez dresser ?
F.B : En 2007, on accompagnait 20 jeunes par an, aujourd'hui, ils sont 150. On a toujours des demandes, on n'est jamais sans jeune. Le constat, c'est que des jeunes fragiles, il y en a, et il faut vraiment qu'on puisse continuer à vivre et continuer à les accompagner.