Dans cette chronique, Nathalie Richard, coach et facilitatrice en transition intérieure et gardienne d’un écolieu dans le Finistère, tente de démystifier un sujet aussi mal compris qu’oublié : la spiritualité.
La semaine dernière alors que je co animais un atelier autour des transitions avec des chef.fe.s d’entreprises, atelier qui faisait la part belle au silence, déroutant un peu les habitudes bavardes, alors que l’heure de la pause venait de sonner, une des participantes est venue vers moi pour me poser sans détour une question à laquelle je ne m’attendais pas. Une question qui pour autant m’a mise en joie.
Et quelle était cette question Nathalie ?
Et
bien une question tout simple. De la trempe de celles que les enfants
nous posent et qui sans le savoir nous désarçonnent en même temps. La question de cette participante était : mais à quoi sert le silence ?Cette
question aussi légitime soit elle, le mental ayant souvent besoin
d’être informé des bienfaits d’une expérience pour se laisser aller, n’a
pu être - par manque de temps - pleinement répondue et ma réponse est
restée disons dans la sobriété. Il faut dire que j’avais aussi envie que la participante découvre par elle-même ces bienfaits. Mais
je dois dire que je trouve sa question extraordinaire alors en
réfléchissant au thème de la chronique cette semaine, celui du silence
s’est imposé comme une évidence. D’autant
que je concluais la chronique de la semaine dernière par la brulante
nécessité de (ré)apprendre à accéder à nos espaces intérieurs sans pour
autant évoquer le comment. Peut-être serait-il temps ?Et dans cette affaire-là, le silence a une place de choix.
Alors à quoi ressemble cette place de choix et que permet le silence finalement ?
Et bien quand on pense au silence, on pense à faire silence n’est-ce pas ? Pour le dire trivialement, à fermer sa gueule quoi. La 1ère vertu du silence est donc cognitive : rappelons-nous à quel point ce dernier est indissociable de la concentration, celle dont nous avons besoin pour penser, réfléchir, concevoir, inventer, faire acte de discernement et de raisonnement critique.Mais ce silence, disons extérieur et aussi vertueux soit-il , ne suffit pas à accéder à notre espace intérieur. Avez-vous remarqué que même en silence, il y a une voix à l’intérieur qui ne cesse de bavarder, commenter, juger, analyser, râler …etc, etc, etc. Une voix qui ne s’arrête ja-mais. Cette voix est celle de notre mental et de son incessant bla bla. Faire silence dehors ne suffit donc pas, il s’agit d’aller au-delà et de ré apprendre à écouter le silence dedans. Je s’agit de ré apprendre en effet car comme le dit Thierry Jansen dans son ouvrage ‘Écouter le silence à l’intérieur’ : ‘Les enfants contemplent le monde, ils se laissent imprégner par lui, ils ne le pensent pas, ils l’écoutent, ils le perçoivent’.Nous les adultes passons notre temps à déformer la réalité en y ajoutant des commentaires, des jugements, des pensées, le plus souvent le cœur fermé. Nous posons sans cesse des filtres sur la réalité comme quand devant un paysage extraordinaire, notre réflexe est de le capturer en photo plutôt que de simplement le contempler. Voilà peut-être ce que signifie écouter le silence à l’intérieur : se libérer du bruit du mental, de nos filtres conditionnés qui empêchent ce rapport direct à la Vie, avec la réalité.
Et qu’est-ce que cela change in fine ?
Et bien ce rapport direct à ce qui est, qui est d’ailleurs la définition même du verbe contempler, mine de rien c’est une véritable révolution, un changement radical de façon d’être au monde. Il ne s’agit plus de penser ce que nous voyons, ni même d’observer mais de renouer avec ce qui se passe quand nous regardons longuement quelqu’un ou quelque chose. Avez-vous remarqué qu’au bout d’un certain temps on finit par oublier notre petite personne et ne plus faire qu’un avec ce que nous regardons. Peut-être cela vous est-il arrivé en croisant le regard d’un nouveau-né ? C’est cela devenir purement présent, c’est une expérience de pure conscience à ce qui est., c’est faire un avec ce qui auparavant était encore un objet séparé. Et si je fais un avec le monde, comment alors imaginer le heurter ? Depuis cet endroit, il semble évident que ce que je fais au monde, je le fais à moi-même.Prendre soin de la planète n’est alors plus un devoir moral donc forcément faillible mais une évidence , et même un non-sujet, puisque je n’en suis plus séparé.e. Écouter notre silence intérieur serait la voie d’accès à cette sagesse profonde qui nous indique le chemin à emprunter.Cela passe nécessairement par une réduction de la tension, un apaisement du mental et une détente du corps. Alors trève de bla bla et silence SVP !
Une interview réalisée par Laurence Aubron.