Dans cette chronique, Nathalie Richard, coach et facilitatrice en transition intérieure et gardienne d’un écolieu dans le Finistère, tente de démystifier un sujet aussi mal compris qu’oublié : la spiritualité.
La semaine dernière je concluais la chronique sur ce constat : nous sommes « accro au monde ».Cela veut dire que nous sommes prisonnière et prisonnier du monde de la forme, que nous avons perdu contact avec ce qui constitue à la fois la moitié de la réalité et la moitié de notre humanité : notre espace intérieur.So what ? me direz-vous.Pour y répondre, j’ai envie - et sans doute besoin - de commencer cette semaine par un coup de gueule.Un coup de gueule qui relaie celui de Nathanaël Wallenhorst - chercheur en anthropocène et professeur à l’université catholique de l’ouest – je l’ai entendu dernièrement sur le podcast No(s) Limite(s). Voici le coup de sang cri du cœur que Nathanaël lançait : ‘Pourquoi on est des gros tebe comme ça ?? C’est pas possible ! Le climat s’emballe, les écosystèmes de la biosphère s’effondrent et nous, nous les sociétés humaines, on accélère comme des gros tebe ! Pourtant, je ne peux vivre ma vie, avoir de la joie que parce que l’autre en face aussi il peut vivre la sienne, non ?Et non pas je vais vivre ma vie au détriment de l’autre, en bouffant l’autre, en pillant les ressources autant que possible jusqu’à plus rien. Le manque de conscience de l’autre reste pour moi incompréhensible.Comment allons-nous faire pour contenir notre hybris, notre folie de la démesure ? ‘ Fin de citation.
Mais, comment en effet, contenir cet emballement devant lequel nous semblons impuissants ?
C’est vrai que c’est effrayant tant notre monde est devenu glouton. Certains parlent de notre société comme d’un super organisme qui se nourrit de tout ce qu’il peut trouver comme ressource ou énergie pour se maintenir en vie. C’est ainsi qu’il a été construit : grandir ou périr. Pourtant, aucun organisme vivant ne grandit indéfiniment. C’est notre cas à nous les humains, nous grandissons physiquement pendant un temps – à l’enfance puis l’adolescence - et puis nous nous stabilisons. Le passage de l’adolescence à l’âge adulte est donc fait de l’intégration des limites au développement matériel si l’on ne veut pas détruire l’écosystème dont nous dépendons. Nathanaël Wallenhorst ajoutait d’ailleurs ceci à son coup de gueule : ‘La compréhension existentielle de la gravité de la situation est clé pour faire émerger une force collective sans commune mesure. Une démocratie articulée à la limite et non pas à cette supposée définition de la liberté du faire ce que je veux quand et comme je veux. ‘
Mais est-ce vraiment entendable d’articuler nos modes de vie aux limites ?
C’est vrai que pour beaucoup l’idée d’une démocratie articulée à des limites n’enthousiasme guère et c’est d’ailleurs l’un des reproches souvent fait aux écolos. J’ai moi-même baigné dans l’univers financier ou sky is the limit’ était une expression consacrée, autrement dit : pas de limite (si ce n’est celle du ciel) à ce que l’on fait. C’est vrai aussi que la culture du dépassement de soi dans le sport comme dans tout ce que l’on entreprend a biberonné des générations entières en occident. Sé dépasser est très valorisé. Pas étonnant donc que les limites semblent à notre société adolescente bien rébarbatives.Et pourtant, c’est là ou il nous faut revenir à cette idée de conscience de l’autreCar posons-nous toutes et tous la question :Puis je être véritablement heureux de vivre si cela se fait au détriment d’autrui ? Tant que nous n’aurons pas compris le fameux ‘I am because we are’signifiant Je suis parce que nous sommesJE, ne peut exister que parce que NOUS, l’ensemble du vivant, est. Autrement dit , tant que nous n’aurons pas compris que JE n’existe que par toutes mes relations aux autres vivants (humains ou non), nous sommes foutus pour de bon.
Mais cela suffit t-il de l’avoir compris Nathalie ?
Alors je crois que c’est nécessaire oui car le mental est aujourd’hui notre porte d’entrée mais cela me semble insuffisant.Et
qu’est ce qui nous permettrait de véritablement l’intégrer pour que
cela passe d’une idée séduisante à une indiscutable évidence :Faire appel à notre espace intérieur qui lui sait et n’a jamais oublié qu’il n’y a rien dans ce monde dont je ne sois séparée.