Chaque semaine sur euradio, retrouvez la chronique de Bernard Guetta, député européen, qui effectue un retour sur les actualités et événements européens actuels.
L’une de ses raisons est de politique intérieure. Si Benjamin Netanyahou s’est porté au secours des Druzes syriens, c’est aussi que les Druzes d’Israël sont des patriotes, souvent engagés dans les forces de sécurité, et que ce Premier ministre se devait de leur montrer sa reconnaissance en allant défendre leurs cousins de l’autre côté de la frontière.
En ne le faisant pas, il aurait compromis une solidarité nationale mais c’est l’équilibre régional qui était évidemment sa raison essentielle. Nombre des Druzes de Syrie vivent au sud de Damas, dans ce djebel druze qui s’étend entre le Golan annexé et le reste du pays. En répondant à leur appel à l’aide lancé après que des fanatiques sunnites eurent massacré une centaine d’entre eux, les Israéliens ont détaché de la Syrie une zone druze désormais interdite d’accès à l’armée syrienne.
Israël vient de se créer un protectorat en territoire syrien qui redessine la carte du Proche-Orient sans que les frontières de la Syrie n’en soient formellement modifiées.
C’est un fait majeur car il traduit la difficulté que le nouveau pouvoir syrien rencontre et rencontrera toujours plus à maintenir l’unité de ce pays.
La Syrie se défait. Elle continue de se défaire puisque les printemps arabes de 2011 l’avaient déjà fractionnée en une zone kurde au nord et, sur la côte comme à Damas, une zone chrétienne et alaouite. On peut accuser Benjamin Netanyahou d’invoquer la protection des Druzes pour plus encore affaiblir la Syrie et y créer une zone tampon. On ne se trompe pas à le faire mais sans doute faut-il d’abord constater qu’Israël ne fait que tirer profit d’une très profonde et irréversible évolution du Proche-Orient.
Avec ses trois Etats en un – kurde, chiite et sunnite –, l’Irak n’a jamais été aussi fragile depuis que les empires britannique et français l’avaient dessiné aux lendemains de la Première guerre mondiale. Il en va de même du Liban car maintenant que chrétiens et sunnites ne parviennent plus à le gouverner face à des chiites dont le poids démographique s’est affirmé, la « Suisse du Proche-Orient » comme on l’avait si longtemps appelé ne cesse plus non plus de se défaire.