Après plusieurs semaines de conflits, accord de cessez-le feu entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan ; pour mieux répondre aux problématiques sanitaires, la Commission européenne souhaite créer une Union de la Santé ; en Grèce, le gouvernement tente d'attirer et de faire revenir ses travailleurs, exilés depuis la crise financière de 2008.
Après six semaines de combats, l’Arménie et l’Azerbaïdjan se dirigent vers une paix douloureuse. Les deux pays combattaient depuis le 27 septembre pour le contrôle du Haut-Karabagh. Une enclave majoritairement peuplée d’Arméniens, contestée par les deux Etats. Dans la nuit de lundi à mardi, le premier ministre arménien Nikol Pachinian, a accepté un cessez-le-feu qui modifie l’équilibre dans la région. Pouvez-vous tout d’abord nous rappeler les circonstances de cette flambée de violences ?
Le Haut-Karabakh est une région peuplée majoritairement d’Arméniens, que se disputent l’Arménie et l’Azerbaïdjan depuis 1920. Après une guerre particulièrement violente en 1994, la zone a été le théâtre d’affrontements sporadiques. La résurgence du conflit était à prévoir. Cela fait plusieurs années que les deux pays renforcent leurs capacités militaires dans l’attente d’une confrontation. Surtout l’Azerbaïdjan, bien plus riche que son voisin arménien.
Le 27 septembre dernier, après des années de calme relatif, Bakou a lancé les hostilités, déployant une force militaire bien supérieure à l’Arménie. En six semaines, le conflit a fait plusieurs milliers de morts et des dizaines de milliers de réfugiés. Suite à la prise de Choucha, une ville hautement stratégique, le premier ministre arménien, Nikol Pachinian, n’a eu d’autre choix que de capituler. Une décision qui a causé une émotion immense en Arménie. Des milliers de manifestants sont immédiatement sortis dans la rue. Certains ont pénétré dans plusieurs bâtiments officiels dont le parlement et la résidence de Nikol Pachinian. Le président du parlement a même été très sévèrement molesté par des manifestants, et retrouvé inconscient.
Après plusieurs tentatives de cessez-le-feu avortées, cet accord parrainé par Moscou offre de larges gains territoriaux à l’Azerbaïdjan.
Tout à fait ! L’accord accorde le contrôle de plusieurs territoires à l’Azerbaïdjan. Stepanakert, la capitale du Haut-Karabagh reste sous contrôle de la république pro-arménienne. Il est prévu que 1960 soldats russes s’installent sur place et assurent le maintien de la paix ainsi que le contrôle d’un corridor reliant ce qu’il reste de la région contrôlée par les Arméniens à l’Arménie.
Un accord qui consacre également l’influence de la Russie et de la Turquie dans la région. Certains observateurs reprochent à l’Union européenne son inaction et son silence.
En effet, l’Union européenne a préféré ne pas se mêler de ce conflit, outre des déclarations officielles. Du fait de cet accord, la Russie augmente sa présence militaire et met un pied de plus dans la région. Elle a déjà une base en Arménie et est également très présente dans les deux régions de Géorgie qui ont fait sécession, l’Abkhazie et l’Ossétie.
La Turquie qui a soutenu très fortement l'Azerbaïdjan, a eu un grand rôle dans ce qui est célébré à Bakou comme une puissante victoire. Ankara accroît donc davantage son influence dans la zone. De son côté, l’Union européenne a montré qu’elle n’avait pas les moyens ni l’ambition de s’ériger en acteur régional dans la zone.
L’Union européenne veut davantage de pouvoirs en matière de santé ! La pandémie du covid-19 a en effet révélé les failles de la coordination européenne. La santé est un domaine qui relève de la compétence des Etats et ceci a limité l’adoption d’une réponse cohérente. La Commission a annoncé vouloir remédier à cette situation et créer une Union de la Santé. Pouvez-vous nous dire quels sont les objectifs de la Commission en la matière ?
La Commission veut mieux répondre aux crises sanitaires. Surtout, que de nombreux scientifiques considèrent que d’autres épidémies surviendront dans le futur. La Commission veut tout d’abord étendre les pouvoirs du Centre européen de prévention et contrôles des maladies notamment en matière de gestion des stocks de médicaments. Ensuite, elle voudrait uniformiser les méthodes de dépistage, établir un véritable plan d’urgence européen, et avoir un meilleur accès aux données des Etats.
Comment les Etats vont-ils réagir à cela alors que cette compétence est une chasse gardée des gouvernements ?
La plupart des Etats sont d’accord d’accroître les capacités du Centre de prévention en matière de personnel et de financement. De plus, les Etats ont déjà délégué à la Commission l’achat de vaccins. Elle a signé un accord avec les entreprises pharmaceutiques BioNTech et Pfizer. 300 millions de doses seront livrées aux Etats une fois que le vaccin sera considéré comme efficace. La Commission négocie en ce moment avec d’autres fabricants.
Néanmoins, il est difficile de penser que tous les Etats accepteront une réforme plus profonde. Depuis le début de la pandémie, la Commission a eu du mal à faire coopérer les Etats. Encore aujourd’hui, l’Europe est très divisée en ce qui concerne les mesures adoptées. Plusieurs pays, dont les Pays-Bas, ont souligné la prééminence des Etats lorsqu’il s’agit de prendre des mesures sanitaires. La Hongrie, de son côté, négocie ses propres achats de vaccins, notamment avec la Russie et la Chine.
Terminons en évoquant la Grèce. Le pays veut lutter contre la fuite des cerveaux. Dans le sillage de la crise financière de 2008, la Grèce a plongé dans une brutale récession économique. Jusqu’à 800.000 grecs ont, dans les années suivantes, quitté le pays faute de perspectives d’avenir. Pouvez-vous nous expliquer ce que le gouvernement prévoit de faire pour remédier à cela ?
Le gouvernement grec prépare une loi qui accordera une exemption d’impôt de 50% pour toute personne venant travailler en Grèce, grecque ou non. Une exemption prévue pour durer 7 ans. L’objectif des autorités est de créer de l’emploi en attirant des entreprises ou de futurs entrepreneurs. Toute personne pourra saisir cette opportunité, mais seulement durant l’année 2021. Le but sous-jacent est de faire revenir les 800.000 grecs qui ont quitté le pays. Le gouvernement veut également profiter du Brexit et attirer des expatriés qui quittent le Royaume-Uni suite à sa sortie de l’Union européenne.
Victor D’Anethan - Thomas Kox
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