Une semaine sur deux sur euradio, retrouvez la chronique « Consommateurs européens » présentée par Elphège Tignel du Centre Européen des Consommateurs France.
Vous revenez aujourd’hui sur un droit qui pourrait faire son apparition en Europe : le droit à la réparation
Ce droit ne sort pas d’un chapeau magique, mais bien des priorités du Parlement européen.
Avec le droit à la réparation, les eurodéputé·es veulent rendre les réparations systématiques, rentables et attrayantes.
Parce que ce n’est pas déjà le cas ?
Non ! Actuellement, et vous en avez probablement déjà fait l’expérience, quand un appareil n’est plus sous garantie et qu’il tombe en panne, il est plus facile d’en acheter un nouveau que de le réparer. Cette surconsommation ne colle pas avec les objectifs du pacte vert européen. C’est pourquoi l’Europe veut encourager les consommateur·rices à réparer ou faire réparer leurs appareils défectueux.
Et ça tombe bien ! Plus des trois quarts des Européen·nes se disent prêt·es à le faire. Alors pour leur en donner les moyens, la Commission européenne a proposé le 22 mars dernier une directive créant ce droit à la réparation
Qu’est-ce que ce droit va changer pour les consommateur·ices ?
Les consommateur·rices pourront bénéficier de la réparation lorsque leur produit tombe en panne après la garantie. Mais attention, pas pour tous les appareils, seulement certaines catégories. Il s’agit par exemple des réfrigérateurs, des machines à laver ou des téléphones. Des appareils qui seraient considérés comme "techniquement réparables".
Pour les consommateur·rices, le défi sera bien sûr de trouver un·e réparateur·rice facilement. Pour ça, l’Europe a également trouvé la parade : elle imposerait aux pays de l’UE de mettre en place une plateforme en ligne gratuite recensant les réparateur·rices agréé·es ou indépendant·es.
Et enfin, pour comparer les prix des réparations et faire jouer la concurrence, un formulaire harmonisé en Europe serait obligatoirement remis lors de la demande de réparation d’un des produits concernés.
Mais en France, est-ce qu’il n’existe pas déjà des mesures qui encouragent la réparation des appareils en panne ou défectueux ?
Si ! La France est même pionnière en Europe de l'économie circulaire. L’Europe s’est d’ailleurs largement inspirée des pratiques des pays membres pour proposer cette nouvelle directive.
En France, il existe par exemple déjà un site officiel qui permet de trouver facilement un·e professionnel·le qui répare, recycle ou rachète les appareils défectueux. Vous le connaissez peut-être, il s’agit du site : longuevieauxobjets.gouv.fr
Autre mesure qui n’existe qu’en France, c’est l’indice de réparabilité. C’est un pictogramme coloré qui comporte une note de 1 à 10 : 1 l’appareil est peu réparable, 10 il pourra être facilement réparé. Il doit être affiché sur onze produits électroménagers et électroniques comme les lave-linge à hublot, smartphone ou ordinateur portable.
Les vendeur·euses en magasin ont également des obligations. Ils doivent informer les acheteur·euses français·es sur la disponibilité des pièces détachées.
Enfin, la France impose aux fabricant·es de 30 produits électriques et électroniques du quotidien de financer un fonds : le fonds « réparation ». Il est utilisé pour rembourser 15 à 45 € aux réparateur·rices labellisés "QualiRépar" qui en font la demande ce qui permet aux consommateur·rices de payer moins cher leur réparation.
Et nos voisins européens, que font-ils pour inciter les consommateur·rices à réparer leurs appareils ?
Plusieurs pays européens ont eux aussi mis en place des mesures incitatives, mais ils n’ont pas tous la même méthode.
L’Autriche offre par exemple des bons aux consommateur·rices. Ils couvrent jusqu’à la moitié du coût des réparations dans la limite de 200 €.
Neuf pays ont décidé d'appliquer un taux de TVA réduit sur les petites réparations de certains produits comme les chaussures, les vêtements ou les bicyclettes. C’est le cas en Belgique ou au Portugal qui appliquent une TVA à 6 % ou encore aux Pays-Bas avec un TVA à 9 %.
Deux pays exigent, quant à eux, des vendeur·euses de fournir des pièces de rechange pour réparer les appareils. La Pologne, où les pièces détachées doivent être disponibles pendant 7 à 10 ans. Et la Grèce, où cette obligation court pour la durée de vie estimée du produit.
Ce futur droit à la réparation européen est donc une bonne nouvelle pour les consommateur·rices. Mais on attend maintenant les débats au Parlement européen et au Conseil de l’UE en espérant, je l’avoue, quelques amendements pour rendre la directive de la Commission européenne, un tout petit peu plus ambitieuse.
Entretien réalisé par Laurence Aubron.