Consommateurs européens - Elphège Tignel

L’Europe veut renforcer les droits des voyageurs

©JESHOOTS.COM sur Unsplash L’Europe veut renforcer les droits des voyageurs
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Dans cette chronique, Elphège Tignel, du Centre Européen des consommateurs France, vous explique sur euradio comment l’Europe protège les consommateurs dans leur vie quotidienne et quels sont vos droits si vous voyagez, déménagez, achetez, payez, étudiez, téléphonez… en Europe.

Elphège Tignel, vous revenez aujourd’hui sur les propositions de la Commission européenne pour renforcer les droits des passagers et des voyageurs

Oui, la faillite du groupe de voyages Thomas Cook en 2019 et la crise de la COVID-19 qui a suivi ont eu une incidence majeure sur le marché des voyages. L’Europe souhaite donc redonner confiance aux voyageurs et a présenté en fin d’année dernière, un « paquet mobilité ».

Dans ce texte un peu fourre-tout, la commission envisage de réviser plusieurs textes relatifs aux transports et aux voyages. Tout d’abord, la Directive sur les voyages à forfait. Ce sont les voyages qui combinent au minimum deux prestations touristiques, comme un vol + un hôtel, ou un vol + une location de voiture. La Commission souhaite aussi compléter les règlements sur les droits des passagers dans les 4 modes de transport (aérien, ferroviaire, maritime et par bus). Et enfin, elle propose de légiférer sur les transports "multimodaux". C’est par exemple, les voyages qui comprennent un Nantes-Paris en train puis un Paris-New York en avion. Son objectif est d’améliorer la coordination et l’information des consommateurs sur les horaires ou en cas d’incidents.

Alors parmi les mesures proposées par la commission, il y a des bonnes nouvelles mais aussi des oublis. On commence par les bons points : l’encadrement des obligations des intermédiaires de voyage

Oui, la commission vient combler un vide juridique dans le droit des passagers aériens. Un manque qui a été préjudiciable pour beaucoup de consommateurs pendant la crise sanitaire.

En cas d’annulation ou de retard de vol, le règlement européen prévoit un remboursement et une indemnisation à demander auprès de la compagnie aérienne. Or, le consommateur qui a acheté son vol sur un site intermédiaire n’a pas de lien contractuel avec l’opérateur du vol. Donc il doit se retourner vers le vendeur, c’est-à-dire la plateforme en ligne. Et Il n’existe à ce jour pas de règles ou d’obligations claires pour ces intermédiaires qui vendent des billets d’avion.

La Commission souhaite donc responsabiliser ces plateformes. Elle veut, par exemple, les obliger à informer les passagers en cas de changement d’horaires de vol. Ou à rembourser les passagers dans les 14 jours qui suivent l’annulation du vol par la compagnie.

Autre bonne nouvelle : les réclamations envers les transporteurs devraient être simplifiées

Oui, en cas d’annulation de vol, de bus, de train ou de bateau, la Commission souhaite simplifier les réclamations auprès des transporteurs. Pour cela, elle leur impose de rendre plus accessible leur formulaire en ligne. Et pour répondre aux questions des passagers, elle exige que les services clients des compagnies comme des plateformes de réservation soient joignables dans la langue choisie par le consommateur lors de sa réservation.

L’Europe souhaite aussi réformer les voyages à forfait

En effet. Pendant la crise sanitaire, en cas d’annulation de voyage, on a vu apparaitre en lieu et place des remboursements, les fameux avoirs. Mais chaque pays avait sa législation, sa durée, et son régime sur les bons d’achat. Bref, cela manquait grandement d’harmonisation.

C’est à cela que s’attaque le paquet mobilité de la Commission. Les avoirs seraient possibles s’ils sont valables 12 mois à partir l’acceptation par le consommateur et obligatoirement remboursables à l'échéance ou en cas de faillite de l’agence.

Pour justement protéger les consommateurs en cas de faillites des agences, la Commission prévoirait un plafond pour l’acompte versé avant le départ en voyage. Il ne pourrait pas dépasser 25 % de la somme totale à payer.

Enfin, la Commission souhaite que la situation dans le pays de départ soit prise en compte en cas d’annulation. Si en raison d’un attentat ou de mesures restrictives de voyage dans son pays, comme nous en avons connues en France pendant la pandémie, le consommateur est contraint d’annuler sa réservation, il devrait quand même pouvoir être remboursé.

Mais il n’y a pas que des bonnes nouvelles dans ce paquet mobilité. Vous souhaitez Elphège, également nous faire part de vos déceptions

Oui, les propositions de la Commission européenne manquent un peu d’ambition sur des problèmes majeurs constatés par les Centres Européens des Consommateurs.

Tout d’abord, elle ne s’attaque pas aux faillites des compagnies aériennes. Or, elles ne sont pas rares ces dernières années. Air Malta cessera par exemple ses activités en mars prochain !

L’obligation d'assurance des compagnies ou la création d’un fond commun pour indemniser les passagers auraient pu être intégrées. Mais malheureusement, elles ne sont pas au programme de ce paquet mobilité.

Autre déception : l’absence d’harmonisation sur le transport des bagages en avion. Les compagnies aériennes vont donc pouvoir continuer à avoir leurs propres limites de taille et de poids pour les bagages cabine.

Enfin, concernant les transports multimodaux, on peut regretter que la Commission n’indique pas clairement quel règlement serait prioritairement appliqué en cas de problème. Le passager qui ratera son avion à cause du retard de son train restera donc encore dans le flou. Il ne saura pas, simplement et rapidement, quel est interlocuteur à contacter ni à quelle indemnisation il aura droit.