L'éco de Marc Tempelman

La force du Dollar

@Timis Alexandra sur Unsplash La force du Dollar
@Timis Alexandra sur Unsplash

Chaque semaine sur euradio, retrouvez Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’épargne gratuite Cashbee, qui traite les sujets et les actualités de la finance.

Nous accueillons Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’épargne gratuite Cashbee. Nous discutons toutes les semaines de finance. Bonjour Marc, de quoi allons-nous parler aujourd’hui ?

Aujourd’hui, je souhaitais parler du Dollar avec vous. La devise américaine s’est fortement appréciée contre la plupart des autres devises du monde. C’est une bonne opportunité pour revenir sur les principes qui animent le marché du change.

Commençons par les fondements. Le Dollar, l’Euro, le Yen japonais, la livre anglaise … Toutes ces devises s’échangent les unes contre les autres en permanence, à des tarifs fluctuants.

C’est ça. Nous en sommes peut-être un peu moins conscients aujourd’hui, car avec l’euro nous disposons d’une monnaie unique valable dans toute la zone euro, mais le marché du change est un marché gigantesque, où des milliards d’euros, de Yen et de Livres s’échangent tous les jours. Et le Dollar américain joue un rôle fondamental dans ce domaine, car les cours de change s’expriment, par convention, contre le Dollar américain.

Et vous dîtes que depuis le début de l’année, le Dollar s’est renforcé contre les devises étrangères ?

Exactement. Autrement dit, depuis le début de l’année il faut débourser de plus en plus de Yen, de Livres ou encore d’euros pour acheter un Dollar. Un Euro ne vaut plus que 1 Dollar et 6 centimes, un plus bas pour l’euro depuis novembre dernier. Au Japon, c’est pire, il faut désormais plus de 153 Yen pour acheter un Dollar, un record depuis 34 ans.

Qu’est-ce qui pousse le Dollar vers le haut ?

C’est une affaire de taux d’intérêt. Comme nous avons pu en parler, depuis 2022 les banques centrales luttent contre l’inflation en rehaussant agressivement les taux directeurs. Ainsi aux US, la Federal Reserve les a portés jusqu’à 5,25%, alors que la Banque Centrale Européenne les a monté jusqu’à 4%.

Et comme les taux d’intérêt sont plus élevés en Dollar, les investisseurs transfèrent leurs devises vers le Dollar, c’est ça ?

En quelque sorte. Mais plus encore que les écarts de taux actuels, ce sont les anticipations des investisseurs sur les changements de taux à venir mettent de l’huile sur le feu.

Au début de l’année, l’inflation tombait rapidement, et les intervenants de marché anticipaient entre 4 et 6 réductions de taux en 2024 par la Fed. Sauf que depuis, de nombreux indicateurs montrent qu’alors que l’inflation continue de baisser en Europe et au Royaume-Uni, c’est loin d’être le cas aux États-Unis. Où l’inflation résiste et a enregistré à 3,5% au mois de mars.

Par conséquent, alors que la BCE multiplie les déclarations rassurantes sur son intention de commencer à réduire les taux dès le mois de juin, les représentants de la Fed sont devenus beaucoup plus prudents. Le marché a bien compris, et n’anticipe plus qu’un ou peut-être deux coupes aux US, et probablement plus tard dans l’année.

C’est ce qu’on désigne par l’expression “higher for longer” n’est-ce pas ?

Exactement. Et si les taux d’intérêts restent élevés pour plus longtemps aux US, alors que les banques centrales du reste du monde se préparent à les couper, alors l’incitation d’aller parker ses liquidités en Dollars plutôt que toute autre devise devient grande.

Quel est différentiel de taux dont on peut bénéficier en investissant en Dollars plutôt qu’en Euros par exemple ?

Aujourd’hui le rendement sur l’obligation d’État américain à 10 ans est supérieur de 2,15% au rendement fourni par l’obligation de l’État allemand sur la même durée.

Pour conclure, un Dollar aussi fort est-ce une bonne ou une mauvaise chose ?

Sur le marché du change, c’est comme beaucoup d’autres sujets, il est bon d’éviter les excès. La faiblesse particulière du Yen inquiète le Japon. Dont la banque centrale ne s’interdit pas d’intervenir pour soutenir sa devise.

Un entretien réalisé par Laurence Aubron.