L'éco de Marc Tempelman

WeWork en faillite

©dylan nolte sur Unsplash WeWork en faillite
©dylan nolte sur Unsplash

Chaque semaine sur euradio, retrouvez Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’épargne gratuite Cashbee, qui traite les sujets et les actualités de la finance.


Nous accueillons Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’épargne gratuite Cashbee. Nous discutons toutes les semaines de finance. Bonjour Marc, de quoi allons-nous parler aujourd’hui ?

Bonjour. Je souhaitais aborder le sujet de WeWork avec vous. Cette société qui souhaitait révolutionner le monde du travail, et qui valait en 2019 plus de 47 milliards de Dollars, a récemment déclaré faillite. Comme les bureaux de coworking de la société sont présents partout dans le monde et notamment en France, le sujet fascine et mérite des explications.

Un peu d’histoire est sans doute nécessaire pour nous rappeler comment cette société a pu devenir aussi grosse aussi rapidement.

Bien sûr. WeWork est notamment le résultat de la vision d’un certain Adam Neumann. Décrit comme un entrepreneur brillant et disruptif pendant un temps, il souhaite réinventer le secteur de l’immobilier de bureaux, en proposant des bureaux flexibles et, selon lui, adaptés aux entrepreneurs et leurs start-ups. Notamment en proposant des contrats de location de bureaux ultra-flexibles, dans des lieux offrant de nombreux services, allant de l’accès à l’internet à haut débit en passant par des bars à bière, généralement gratuitement.

Ces contrats courts sont contraires aux standards de location traditionnels sur le marché de l’immobilier, n’est-ce pas ?

Tout à fait. Sans être une expert en la matière, en France par exemple la location de bureaux se fait typiquement via des baux 3/6/9. Ils portent ce nom car la clause standard dans ce type de bail est que le locataire peut résilier le contrat tous les 3, 6 ou 9 ans. Chez We Work on peut réserver un bureau à la journée !

Et ce concept a connu un certain succès ?

Oui. Il n’y a pas de doute que la demande pour ce type de service fut grandissante. Mais on peut aujourd’hui aussi dire que Adam Neumann a eu la folie des grandeurs. Il s’agit d’un personnage très charismatique, perçu par de nombreux collaborateurs et investisseurs comme une sorte guru, en mission pour transformer le monde du travail. Qui l’ont suivi pour essayer de transformer sa vision en réalité. WeWork a véritablement recherché l’hyper-croissance avant toute autre chose, en achetant ou en louant des bâtiments de bureaux, d’abord aux États-Unis puis sur tous les continents.

Mais cela à dû coûter très cher. Comment ce jeune entrepreneur a-t-il financé tous ces projets ?

Beaucoup d’investisseurs très connus ont été emportés par l’enthousiasme d’Adam Neumann. Notamment un certain Mayoshi Son, fondateur et dirigeant de Soft Bank. Qui, à travers son fonds d’investissement va investir XXX milliards de Dollars dans WeWork. Cet argent sera déployé pour signer des dizaines de baux commerciaux pour transformer des espaces gigantesques en lieu de co-working.

Je soupçonne que WeWork a dû signer des baux long, traditionnels, avec les propriétaires de ces espaces ?

Exactement, et aux US ces baux peuvent être de 10 et même de 15 ans. Donc le modèle de WeWork ne marche que tant que les bureaux de co-working sont pleins, générant ainsi des loyers qui dépassent le loyer que WeWork doit verser au propriétaire du bâtiment.

Ce qui n’est donc clairement pas le cas.

Oui. Parce que WeWork a surinvesti. Son offre de co-working était censée attirer de plus en plus de monde, y compris les grandes sociétés cotées en bourse, qui étaient censées lâcher leurs sièges emblématiques, dans un monde où tout le monde adopterait du travail flexible. Il n’en est rien. Le taux d’occupation n’était que de 72% au trimestre dernier, insuffisant pour permettre à WeWork d’être à l’équilibre. La société à donc vu sa valorisation boursière fondre comme neige au soleil, et passer de son pic de 47 milliards de dollars en 2019 à moins de 40 millions de dollars juste avant de se déclarer en banqueroute.

Et maintenant ?

Les actionnaires, dont notamment Soft Bank, vont sans doute y laisser des plumes, mais la procédure du Chapter 11 devrait permettre à WeWork d’assainir son bilan et donc probablement de redémarrer son activité aux US et au Canada dans quelques mois. En France, l’activité n’est pas concernée par la faillite déclarée à ce jour.

Ironie de l’histoire, les actionnaires avaient décidé d’exclure Adam Neumann il y a quelques années de la société qu’il avait fondée. Il s’en est allé avec un chèque de 400 Millions de Dollars.

Entretien réalisé par Laurence Aubron.