Nous accueillons Marc Tempelman, un des co-fondateurs de la FinTech Cashbee, qui vous aide à épargner plus et mieux, via son application d’épargne simple et sécurisée. Nous discutons toutes les semaines de finance. Bonjour Marc, de quoi allons-nous parler aujourd’hui ?
Alors que nous nous approchons du dé-confinement, j’aurais pu vous parler de l’effondrement de l’économie, de la chute du PIB et de la baisse de confiance des ménages. Mais je suis quelqu’un de positif. Et je pense qu’il est donc plus stimulant de se projeter dans le futur. Aussi je vous propose de parler de la reprise, et de sa forme probable.
C’est vrai qu’on entend tout et son contraire sur cette fameuse reprise. D’abord, êtes-vous sûr qu’il y en aura une ?
Benjamin Franklin disait qu’il n’y avait que deux certitudes dans la vie, les impôts et la mort ! Donc je ne mettrai pas ma main à couper, mais il est quand même très probable que l’économie mondiale – et plus particulièrement l’économie française – connaisse un rebond durant les trimestres à venir, au moins pour 2 raisons :
Premièrement, la chute de l’activité économique sera sans aucun doute brutale en 2020. L’économiste en chef de la Banque Centrale Européenne s’attend à une contraction de 12% du PIB de la zone Euro. Cela résulte bien sûr de l’arrêt quasi-total de l’activité pendant de longs mois. Après une chute aussi abrupte, toute forme de reprise de l’activité, même progressive, aura une impact positif.
Deuxièmement, les efforts gigantesques de soutien de l’économie des gouvernements et des banques centrales ont eu et vont continuer à avoir des effets positifs.
Les vraies questions sont plutôt : quand et surtout comment cette reprise prendra forme ?
A quel type de relance pouvons-nous nous attendre ?
Alors, il y a trois lettres qui reviennent fréquemment, qui sont V, U et L, avec en bonus la lettre W. Je m’explique. Les plus optimistes auraient souhaité une reprise en V. Nous voyons bien ce que cela implique : une chute brutale, mais une reprise de l’activité tout aussi rapide, pour retourner au niveau économique de départ.
Une reprise en U représente une chute tout aussi brutale au départ, mais une reprise qui se ferait progressivement, pour retrouver le niveau de PIB d’avant crise après un certain temps.
Le scénario en L est le plus pessimiste, car il décrit une situation dans laquelle le dé-confinement ne nous permet pas de retrouver le niveau d’activité d’avant. Nous rentrons et resterions en récession.
Enfin le W décrit le scénario où nous serions obligés de nous reconfiner, pour faire face à une deuxième vague du virus, et donc de tuer dans l’œuf la reprise de l’activité économique.
Au moins on aura appris des choses sur l’alphabet économique. Alors, naturellement, la question que j’aimerais vous poser est : à quel scénario croyez-vous ? Quelle lettre se dessinera ?
Chez Cashbee, nous sommes dans le camp des U, mais avec une base de cette lettre qui serait très large. Dit autrement, nous sommes positifs à moyen terme mais nous pensons que la reprise prendra du temps. Notre U ressemblerait plus au logo de Nike.
Pourquoi cette prudence relative ?
Pour plusieurs raisons. Tout d’abord, le dé-confinement lui-même sera progressif. En France, nous savons aujourd’hui qu’il y aura des départements « rouges » où la réouverture des commerces se fera avec du retard sur les départements « verts ». Par ailleurs, on voit bien que même si les réouvertures étaient généralisées, le monde ne reviendra pas à son état d’avant-crise en un claquement de doigts. Il suffit de regarder ce qui se passe dans les pays qui dé-confinent avant nous.
Vous pensez à la Chine, et peut-être à l’Italie ?
Exactement. En Chine, où le déconfinement est aujourd’hui quasi-total, la population a profité des fêtes nationales du début du mois de mai pour faire du tourisme, et rendre visite à la famille. Ils ont effectué 50 millions de voyages. Ce qui est énorme. Mais cela se compare aux 200 millions de voyages effectués durant le même weekend l’année dernière.
Plus proche de nous, en Italie, les grandes usines ont été remises en marche. Ainsi, l’usine du groupe PSA Fiat à Sevel produit à nouveau 280 véhicules par jour. Mais avant le COVID-19 elle en produisait 410. Cela s’explique par le fait que la sécurité prime, les ouvriers doivent passer plusieurs sasses avant de pouvoir rejoindre leurs postes de travail. Le respect des distances de sécurité ralentit les procédures.
Pour revenir à la France, et en prenant le tourisme comme exemple : on comprend aisément que si nous obligeons les visiteurs en provenance de l’étranger à se confiner pendant 14 jours à leur arrivée sur le territoire, il est compliqué d’envisager un retour à la normale. Qui aurait envie de passer deux semaines dans sa chambre d’hôtel avant d’aller pouvoir visiter le Louvre où monter en haut de la Tour Eiffel ?
Donc nous voyons bien que le retour à la normale ne signifie pas le retour à l’avant-COVID.
Quel serait le facteur clé à surveiller ?
C’est finalement le retour de la confiance. Et typiquement celui-ci ne se manifeste qu’un certain temps après que les règles se sont assouplies. Je m’explique : nous voyons bien que certains parents vont garder leurs enfants à la maison, « en attendant de voir » alors que les écoles rouvrent. Il en est de même pour la consommation : ce n’est pas parce que les restaurants seront à nouveau accessibles que l’ensemble de la population va y retourner tout de suite. La méfiance règne. Elle se comprend, mais l’incertitude et la crainte sont les ennemis de la consommation. Et c’est bien de la consommation que va dépendre la croissance économique.