Chaque semaine sur euradio, retrouvez Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’épargne gratuite Cashbee, qui traite les sujets et les actualités de la finance.
Bonjour Marc, de quoi allons-nous parler aujourd’hui ?
Bonjour. Je vous propose de discuter de la situation financière de la France. Récemment, les coûts d'emprunt de la France ont dépassé ceux de la Grèce, ce qui a suscité des inquiétudes.
Si mes souvenirs sont bons, la Grèce était au bord de la faillite il y a 15 ans. Pouvez-vous nous expliquer ce que cela signifie concrètement pour les Français ?
L'augmentation des coûts d'emprunt signifie que l'État français doit payer des intérêts plus élevés sur sa dette. Cette augmentation, entamée graduellement il y a quelques années avec la hausse de l’endettement du pays, s’est accélérée depuis la dissolution du gouvernement.
Le fait que le coût de l’endettement dépasse celui de la Grèce signifie que la marché fait plus confiance à la Grèce qu’à la France de payer les intérêts dus et de rembourser sa dette.
Dans la pratique, cela se traduit par le fait que l’État doit consacrer une part plus importante du budget au service de la dette. C’est-à-dire à verser de plus en plus d’intérêts. Ce qui laisse moins de ressources pour les services publics, les investissements en infrastructure et les politiques sociales.
Pouvez-vous nous donner une idée de l'ampleur de cette augmentation et de son impact potentiel sur le budget national ?
Bien sûr. La hausse d'un point de pourcentage du taux d'intérêt moyen sur la dette coûte plusieurs milliards d'euros supplémentaires par an à l’État et donc aux contribuables. Et pour compenser ces coûts supplémentaires, il n’a pas des milliers de solutions. Il faudra soit augmenter les impôts et/ou couper dans les dépenses publiques.
Certains membres du gouvernement ont évoqué un "scénario grec" pour la France. Est-ce une comparaison justifiée ?
Pour le moment, c'est une exagération. La France a encore un accès complet aux marchés de la dette. Le Trésor a récemment levé 8,3 milliards d'euros sans difficulté majeure. Le taux à 10 ans sur la dette française est actuellement d'environ 3%, bien loin des 16% atteints par la Grèce au plus fort de sa crise. Cependant, il est vrai que l'inquiétude des investisseurs est palpable en raison de la combinaison de l'instabilité politique et des finances publiques fragiles.
Quels sont les principaux défis auxquels le gouvernement doit faire face pour stabiliser cette situation ?
Le défi majeur réside dans la nécessité de réduire le déficit public. Il va dépasser les 6% du PIB, alors que les pays de l’Union Européenne sont censés limiter leur dette à 3% du PIB ou moins.
Pour être clair, les débats actuels sur les coupes budgétaires et les hausses d’impôts permettraient à la France de réduire son déficit à 5% du PIB en 2025. Nous serions encore loin de l’objectif des 3%.
Que se passerait-il si le gouvernement ne parvenait pas à faire adopter le budget ?
Si aucun budget n'est adopté, les investisseurs, notamment les grandes institutions internationales, pourraient craindre une crise politique majeure et durable. Ils se méfieront encore plus de la dette française. Cela stimulerait sans doute encore un peu plus la hausse du coût du financement du pays, aggravant ainsi la situation budgétaire.
Quelles sont les perspectives à court terme pour la France face à ces défis ?
Tout dépendra de la capacité du gouvernement, celui-ci ou un éventuel prochain, à mettre en place des réformes crédibles pour assainir les finances publiques. Si les marchés jugent ces efforts insuffisants, les taux d'intérêt pourraient continuer à augmenter, aggravant ainsi la situation économique. À l'inverse, des mesures convaincantes pourraient rassurer les investisseurs et stabiliser, voire réduire, les coûts d'emprunt. L’enjeu est de taille.
Un entretien réalisé par Laurence Aubron.