Chaque semaine, François Delay, Clémence Villefranche et Mathilde Vrignaud de La case des Pins nous présentent un livre de leur sélection.
Cette semaine, Loïc vous présente Klara et le soleil, un roman de Kazuo Ishiguro, publié chez Gallimard.
6 ans après la publication de son dernier livre en date, le Nobel de littérature est de retour avec un roman lumineux. Et si vous avez aimé ses précédents livres, notamment Les Vestiges du jour, ou Le Géant enfoui, vous retrouverez dans ce roman toute la force de la plume de l'auteur britannique, mais aussi la poésie qui s'en dégage.
Fidèle à son habitude, il parvient à nous plonger dès les premières pages dans un univers à la fois étrange et familier. Le roman s'ouvre sur une sorte de réinterprétation du mythe de la caverne. On suit Klara, qui est un robot doté d'une intelligence artificielle avancée. Elle est disposée dans une boutique du centre ville et passe ses journées à observer, d'abord ce qui l'entoure dans le magasin, puis le monde extérieur depuis la vitrine, en attendant qu'un ou une enfant la choisisse. Elle franchit finalement la porte, première caresse solaire sur un épiderme d'automate.
Dans ce livre, l'auteur nous place d'une manière édifiante dans la peau de son personnage. On adopte au fil des mots la perception du monde de Klara, qui est un être programmé, dont les émotions et réflexions sont empreintes d'une pureté parfois déstabilisante. Et le procédé d'écriture qu'utilise l'auteur nous amène à prendre du recul sur l'action du roman, mais aussi provoque l'interrogation. Ishiguro nous confronte ainsi à nos incertitudes ; il bouscule la rationalité dans laquelle se fixe la réalité en nous invitant à changer d'angle, à renouveler notre regard.
Mais loin de formuler une critique frontale et conventionnelle de la société qui nous attend de demain, l'écrivain fait le choix du questionnement. Il invite à réfléchir sur les processus de déshumanisation les nouvelles formes de violence, qu'elles soient sociales ou affectives, et finalement il nous propose une vision plutôt inédite du transhumanisme et de la robotisation. Il associe la technologie à un utilitarisme froid, égocentré, mais il refuse de céder à un discours unilatéral et il préserve l'optimisme et la beauté. C'est un roman entre force et douceur, entre ombre et lumière, un roman complet et qui est savamment dosé. Un titre assurément à ne pas manquer de cette rentrée littéraire.
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