Chaque semaine, retrouvez Sophie Lemaître, Docteure en droit, experte des questions de corruption et d’environnement, pour comprendre comment la corruption et les crimes liés à l’environnement mettent en danger notre planète.
Les 22 et 23 septembre s’est tenu le Sommet de l’avenir à New York, un événement organisé par les Nations unies pour que les Etats s’entendent sur la manière de surmonter les défis actuels et futurs. Le Sommet a débouché sur un Pacte pour l’avenir. Que doit-on retenir ?
Ce Pacte pour l’avenir a pour objectif de conduire à un avenir juste, équitable, inclusif et durable pour l’ensemble de l’humanité et de protéger les générations futures. C’est un document assez long – il fait 67 pages. Il contient 56 mesures dans différents domaines comme mettre fin à la pauvreté, veiller à l’égalité des genres ou encore lutter contre les changements climatiques. Avec ce Pacte, les Etats s’engagent à mettre en œuvre ces mesures dans les six prochaines années pour atteindre les objectifs de développement durable fixés à 2030. On peut saluer l’initiative mais ce Pacte ne reflète pas l’ensemble des enjeux. Par exemple, la corruption n’est mentionnée qu’une seule fois. A titre de comparaison, l’intelligence artificielle apparaît 37 fois dans le Pacte.
Pourquoi cela est-il problématique que la corruption soit si peu prise en compte par ce Pacte ?
La corruption est un frein à un avenir pacifique, juste et équitable. C’est un danger pour les générations présentes et futures. La corruption est un obstacle au développement durable. A cause de la corruption, des décisions favorisant des intérêts privés sont prises. Des fonds publics sont détournés, ce qui signifie par exemple moins d’argent pour les services publics comme les écoles ou les hôpitaux ou encore pas d’argent pour s’adapter aux effets du changement climatique. La corruption n’épargne aucun pays. L’indice de perception de la corruption de l’ONG Transparency International pour l’année 2023 montre d’ailleurs qu’elle ne diminue pas et qu’au contraire elle se répand et s’aggrave. Donc si l’on souhaite « prendre un nouveau départ », avoir un « avenir meilleur pour l’ensemble de l’humanité » pour reprendre les mots du Pacte, on doit s’attaquer à la corruption. La communauté anticorruption s’attendait à une ambition plus forte des Etats, notamment du fait de l’impact de la corruption sur notre planète.
Comment la corruption affecte-elle notre planète ?
Derrière l’extraction des minerais pour la transition énergétique, derrière la surexploitation des océans ou des forêts, derrière le changement climatique, derrière la disparition d’espèces protégées, derrière la pollution des cours d’eau, on trouve des pratiques de corruption. Des pots-de- vin sont, par exemple, versés pour permettre la déforestation et remplacer les forêts par des plantations de palmiers à huile ou de l’élevage intensif. La corruption prend des formes diverses. Ce n’est pas uniquement le fait de verser un pot-de-vin. Le poids disproportionné des lobbys des énergies fossiles pose par exemple question. Mais souvent quand on pense à la protection de l’environnement, de la biodiversité, de notre planète, on néglige de prendre en compte le rôle de la corruption. Dans les prochaines semaines, on aura l’occasion de revenir sur cette corruption et comment elle affecte notre planète.
Une interview réalisée par Laurence Aubron.
Sources :
- 17 Objectifs de développement durable dont ODD 16 (paix, justice et institutions efficaces)avec l’ODD 16.5 la corruption
- Indice de perception de la corruption de Transparency International