L'état de l'État de droit - Elise Bernard

Un cadre solide, mais qui n'empèche pas les menaces

Un cadre solide, mais qui n'empèche pas les menaces

Elise Bernard, Docteur en droit public, enseignante à Sciences-Po Aix et à l'ESSEC, décrypte chaque semaine les traductions concrètes, dans notre actualité et notre quotidien, de ce grand principe fondamental européen qu’est l’État de droit.

L’État de droit c’est un cadre institutionnel et juridique solide, d'une société civile dynamique et de médias indépendants c’est indiscutable mais cela ne suffit à empêcher les menaces.

Eh oui Laurence, dans cette chronique nous pointons à chaque fois une menace sur un point particulier. Ce qui est intéressant au niveau de l’Union européenne c’est le mécanisme de surveillance et les correctifs à apporter. Et c’est souvent avant un scrutin que l’on constate des menaces à l’État de droit.

C’est l’objet du rapport du Parlement européen sur la Grèce n’est ce pas ?

Tout à fait, alors que des élections législatives se préparent pour le 21 mai, les résultats d’une mission parlementaire rapportée par Sophie in 't Veld, eurodéputée néerlandaise, reviennent sur le fait qu'un nombre restreint d'oligarques possèdent la plupart des médias nationaux, ce qui entraîne une sous-représentation de certains sujets.

Oui ou une sur représentation comme ce mur frontière en projet dont nous avons parlé la semaine dernière.

Exactement, à la veille d’un scrutin il est intéressant de relever les travers pouvant évidemment influencer les votes. La couverture médiatique est quelque chose de bien compris. C’est un peu plus inquiétant quand on y ajoute le fait que plusieurs journalistes ont fait état de menaces physiques ou d'attaques verbales. et a exhorté les autorités à s'attaquer immédiatement à ce problème.

Il y avait l'assassinat du journaliste Giorgos Karaivaz il y a deux ans.

Oui, d’ailleurs la délégation du Parlement européen revient sur le fait que l'enquête de police n'a pas progressé.

Et comment peut-on expliquer cela ?

Il y a deux façons d’appréhender ce type d’information. La première est plutôt technique et tient aux délais de recours en justice. Sans rentrer dans les détails, on peut d’abord comprendre les procédures d’instructions, qui sont propres à chaque État, c’est là que l’on peut imaginer des améliorations procédurales.

Dans un 2e temps, on peut déterminer ce qui vient parasiter les procédures, cela peut s’expliquer par un manque de personnel et ou de la corruption.

Oui donc le fait que le gouvernement ne soit pas intéressé, voire arrangé par une avancée de l’enquête n’a pas directement d’effet.

On peut dire cela comme ça. Si pas de procédures, pas d’État de droit, on l’a compris. S’il y a des procédures, c’est une première preuve de fondement propre à l’État de droit. Veiller au bon déroulement des procédures, c’est vraiment le défi qui se pose à nous tous. Sans préjuger d’un quelconque parti politique ou pays en particulier.

Entretien réalisé par Laurence Aubron.

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