L'état de l'État de droit - Elise Bernard

La primauté du droit européen en faveur du citoyen

Photo de Sora Shimazaki - Pexels La primauté du droit européen en faveur du citoyen
Photo de Sora Shimazaki - Pexels

Elise Bernard, Docteur en droit public, enseignante à Sciences-Po Aix et à l'ESSEC, décrypte chaque lundi sur euradio les traductions concrètes, dans notre actualité et notre quotidien, de ce grand principe fondamental européen qu’est l’État de droit. Ses analyses sont publiées sur la page Europe Info Hebdo.

L’Etat de droit européen, c’est aussi reconnaître la primauté du droit européen sur les droits nationaux. Mais dans quelles circonstances ?

Oui là revient cette obsession souverainiste, la primauté du droit européen sur le droit national qui fait mentir les convictions européennes de certains candidats, en fonction des circonstances. Alors avec sa décision du 26 septembre 2024, la Cour de Justice de l’UE apporte une clarification importante dans les relations entre les juridictions nationales et le droit de l’Union européenne.

Oui d’autant que les événements au départ relèvent d’une réalité qui concerne tous les citoyens européens !

Voilà, cette décision a pour origine une tragédie survenue en Roumanie lors d'une opération de maintenance, où un électricien perd la vie par électrocution. Une décision administrative conclut qu'il ne s'agissait pas d'un accident de travail et donc cela empêchait des poursuites au pénal.

Donc j’imagine un moindre dédommagement pour la victime, qui est alors un travailleur.

Exactement. On a dans ce cas un droit national moins favorable au citoyen que ne l’est celui de l’UE puisque la Directive 89/391 sur la sécurité au travail oblige les États membres à garantir des conditions de travail sûres. En empêchant une poursuite au pénal, le droit roumain est défavorable à la victime donc ses représentants invoquent le droit de l’UE. C’est pour cela que la CJUE estime, ce 26 septembre, que le droit de l’UE s’oppose à une loi nationale qui empêche les victimes de faire valoir leurs droits de manière effective.

Mais on ne risque pas des réactions hostiles au sein des États membres, toujours attaché aux apparences de leur souveraineté ?

Si ! C’est pour cela qu’il faut impérativement parler du fond de l’affaire. La souveraineté invoquée de manière floue, ça ne veut rien dire. Insister sur le fait que le droit national doit primer même quand il dessert le citoyen - qui a perdu la vie dans le cadre de ses fonctions de surcroit - ça en dit long sur les motivations de ces chantres de la souveraineté !

Un entretien réalisé par Laurence Aubron.

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