Chaque semaine sur euradio, retrouvez la chronique de Bernard Guetta, député européen, qui effectue un retour sur les actualités et événements européens actuels.
Il faut battre le fer tant qu’il est chaud. L’Allemagne a un nouveau chancelier. Le Président français reprend du souffle. L’un et l’autre sont décidés à parer l’éloignement américain en dotant l’Union d’une Défense commune.
Les planètes s’alignent mais si l’on ne voyait pas Paris et Berlin agir sans plus tarder, l’idée s’installerait vite que l’Europe serait décidément incapable d’exister par elle-même.
Dès son retour des Etats-Unis, il revient donc à Emmanuel Macron de dire qu’il a entendu ce dont le candidat Merz devenu chancelier appelle la France à débattre avec l’Allemagne et qu’il souhaite aussi aller de l’avant sur les mêmes points.
Le nouveau chancelier considère que dès lors que la protection nucléaire des Etats-Unis n’est plus assurée à leurs alliés européens, l’Allemagne devrait envisager de bénéficier d’un parapluie français ou franco-britannique. Cela pose bien des problèmes car si l’Allemagne était seule à pouvoir se ranger sous une telle protection, cela pourrait être perçu comme un permis d’attaquer les autres pays de l’Union.
Ce ne serait pas envisageable mais pourrait-on imaginer alors que tous ceux des 27 qui le souhaiteraient se mettent à l’abri d’un parapluie français ou franco-britannique, autrement dit d’une force de frappe communautarisée ?
Ce n’est pas une chose qui puisse s’improviser mais parce que jamais l’Allemagne n’avait proposé de faire à ce point converger sa Défense et celle de la France, les Français ne peuvent ignorer ni la confiance qui leur est ainsi faite à Berlin ni cette soudaine volonté allemande d’affirmer l’Union en acteur de la scène politique internationale.
Une telle occasion ne se présentera pas deux fois. A l’heure où Donald Trump et Vladimir Poutine ambitionnent de se partager l’Europe en zones d’influence, ce serait pure folie que de la laisser passer. Non seulement la France ne doit pas sembler fuir le débat que lui propose l’Allemagne mais elle doit l’accepter sans retard et bientôt l’ouvrir à l’ensemble de nos partenaires car c’est ainsi que les Européens se montreront déterminés à prendre leur destin en mains.
Emmanuel Macron devrait parallèlement tenter de définir avec Friedrich Merz des propositions franco-allemandes sur le financement de la future Défense européenne et ses priorités, arme par arme. L’Union doit relever le gant et dès lors que le nouveau chancelier a marqué sa volonté d’agir aux côtés de la France, c’est à Emmanuel Macron de défricher le chemin à faire.
Il en a tous les moyens car face au danger, au pied du mur, les Français oublient leurs divisions. Soixante-quatorze pour cent d’entre eux, se disent inquiets de la fermeture du parapluie américain. Les trois quarts d’entre eux, 75% des électeurs, se disent en conséquence partisans d’une Défense européenne commune et les deux tiers des Français, 66%, considèrent que les pays européens devraient continuer à soutenir l’Ukraine si Donald Trump et Vladimir Poutine s’entendaient sur son dos.
Un tel consensus est rare en France. A Emmanuel Macron de le mettre au service de l’Europe et de la stabilité internationale.