L'édito européen de Quentin Dickinson

Les diamants sont éternels

Image par Grown Diamond de Pixabay Les diamants sont éternels
Image par Grown Diamond de Pixabay

Chaque semaine, Quentin Dickinson revient sur des thèmes de l'actualité européenne sur euradio.

Cette semaine, QD, vous voulez prolonger le propos d’un de vos Éditos précédents…

Vous vous en souviendrez peut-être, nous avions eu l’occasion, à ce même micro, d’évoquer ce qui pouvait paraître une inévitable rivalité, entre les besoins en électricité du parc mondial de véhicules routiers et ceux des centres de supercalculateurs indispensables à l’informatique quantique. Les premiers doivent rouler et les seconds, se refroidir en permanence. Or, disions-nous, les capacités actuelles de génération et de stockage d’électricité verte sont très loin de suffire à la colossale demande d’un avenir immédiat (et planétaire).

Vous laissez donc entendre qu’il y aurait des solutions en vue ?...

Il faut toujours garder un œil sur les nombreuses recherches en cours – tout en évitant de se réjouir trop tôt, car, on le sait, long est le temps entre le laboratoire et l’usine.

Mais en tout cas, émerge en ce moment une technique qui a l’avantage tout à la fois de produire et de stocker l’énergie électrique.

Dites-nous tout…

Prenez une source de carbone-14 (connu surtout chez les archéologues pour son utilité dans la datation d’objets très anciens). Cet isotope, en vieillissant, se désintègre en émettant de la radioactivité ; traitée, celle-ci peut générer de l’électricité.

La radioactivité est évidemment nocive pour les organismes vivants, dont vous et moi ; mais enserrés dans une matière quasi-indestructible, les radiations ne s’en échappent pas. En ce moment, des essais sont en cours dans le sud-ouest de l’Angleterre, à l’Université de BRISTOL. L’élément de carbone-14 est enchâssé dans du diamant industriel, et – n’en déplaise à la modestie des chercheurs – les résultats ouvrent des perspectives spectaculaires.

Mais comment s’en servir en pratique ?...

L’intérêt de ce processus, c’est qu’il peut être appliqué à toutes les échelles de taille. Évidemment, on n’y aura pas recours pour votre lampe de poche ou votre montre. Mais comme source d’énergie pour une voiture ou pour une installation industrielle, le principe est identique et se décline sans difficulté. Il est d’ailleurs probable que c’est par les systèmes de grande taille que débutera, le jour venu, la mise en œuvre de ces batteries auto-génératrices au diamant.

Cela veut-il dire que l’énergie solaire, les éoliennes et autres sources d’énergie propre sont dépassées et ne serviront plus à rien ?...

Non, car un avenir énergétique fiable suppose un bouquet de sources parallèles et techniquement distinctes, sans compter qu’il faudra prévoir une période de transition qui, pour des raisons économiques, se mesurera en décennies.

Pour des raisons économiques, dites-vous ; c’est que les batteries au diamant sont particulièrement coûteuses ?...

Non, ce serait plutôt le contraire. Mais l’adaptation des outils industriels et le financement de la transition suppose plus que le feu vert d’un p.d.g. ou la signature d’un ministre. Les difficultés que rencontrent actuellement les constructeurs automobiles européens montrent bien que le passage d’une technologie à une autre n’est pas chose aisée. Et on peut compter sur les États producteurs de pétrole pour freiner au maximum l’émergence de toute technologie concurrente – même s’ils sont libres eux aussi d’y avoir recours.

Vous paraissiez indiquer à l’instant que les batteries au diamant, finalement, ne coûteraient pas une fortune...

C’est vrai, et je tardais à vous préciser d’où provient le carbone-14. Simplement dit, son origine, c’est le graphite des barres de combustible nucléaire en fin de vie dont les centrales électronucléaires doivent se débarrasser.

Conclusion : ce nouveau processus garantira durablement la sécurité énergétique et contribuera à éliminer les déchets nucléaires.

Et, un détail, le carbone-14 a une existence vraiment très longue. Votre batterie au diamant a une durée de vie d’environ… cinq mille ans.

Un entretien réalisé par Laurence Aubron.