« Quoi de neuf en Europe ? », c’est le nom de la chronique hebdomadaire réalisée par l’association Perspective Europe, regroupant les étudiants du Master Affaires Européennes de Sciences Po Bordeaux. Leur mission ? Décoder pour vous l’actualité de l’Union européenne de la semaine passée. Et nous en parlons tout de suite avec Solène Gaignard.
Alors, dites-moi Solène : quoi de neuf en Europe cette semaine ?
Pour commencer, l’un des deux événements forts de cette semaine était le sommet organisé à Bruxelles ce mercredi 16 octobre entre l’Union européenne et le Conseil de Coopération du Golfe persique. Cette rencontre avait notamment pour objectif de discuter de la situation au Proche-Orient entre les États participants.
Ce type de rencontre avait-il déjà eu lieu auparavant ?
Non, le partenariat entre le Conseil de Coopération du Golfe persique et l’Union européenne ayant été lancé cette année, ce sommet est une première ! Même si des accords de coopération économique et commerciale ont été signés il y a maintenant plus de 30 ans, jamais une telle rencontre formelle n’avait eu lieu.
Vous disiez à l’instant que ce sommet avait eu pour thématique principale la situation au Proche-Orient. Quelles sont les positions des différents États sur la question ?
Tous les pays s’accordent d’abord pour dire qu’un accord de paix entre Israël et la Palestine reste l’objectif premier. Mais l’Union européenne et le Conseil de Coopération du Golfe persique appuient chacun sur la responsabilité que joue l’autre camp dans l’avancement de tels accords. Le ministre autrichien des Affaires étrangères, Alexander Schallenberg, explique la nécessité pour les États membres de l’UE de mettre l’Iran face à ses responsabilités, car le pays joue un rôle clé dans le conflit. De l’autre côté, le secrétaire koweïtien du Conseil de Coopération du Golfe persique, Jasem AlBudaiwi, insiste sur la nécessité de reconnaissance, par les Vingt-Sept, de l’État palestinien.
Aucune réalisation concrète n’a donc été tirée de ce sommet ?
Pour l’instant non, en effet. D’autant que l’objet de la rencontre a été modifié par le fait du conflit israélo-palestinien, puisqu’à l’origine, le sommet avait pour but de discuter du renforcement de la coopération économique entre les deux organisations. Mais l’agenda en ayant décidé autrement, ni les accords de libre-échange, ni les accords de libéralisation des visas voulus par les pays du Golfe, n’ont pu être évoqués.
Et quel est donc le deuxième événement marquant de la semaine en Europe ?
Il s’agit de l’organisation d’un sommet européen à Bruxelles, ce jeudi 17 et vendredi 18 octobre, entre les représentants des États membres de l’Union.
Quel était l’objet de cette rencontre ?
L’immigration, et notamment l’immigration irrégulière, était au cœur des débats, bien que les États devaient à l’origine discuter de la question de la compétitivité au sein de l’Union européenne. Les Vingt-Sept ont abordé le sujet d’un nouveau cadre législatif en matière d’immigration et de retour des migrants illégaux.
Un accord n’avait-il pas déjà été signé plus tôt cette année sur le sujet ?
En effet, vous avez raison Laurence ! Il s’agit du pacte asile et migration, adopté en mai dernier, et qui instaure un principe de répartition équitable du traitement des migrants entre les différents États. Et une partie des discussions lors du sommet s’est d’ailleurs concentrée sur l’application de ce pacte par les États membres. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, s’est dit « prête à accélérer la mise en oeuvre de certains éléments du pacte », mais les États ne sont pas tous prêts à l’appliquer pour l’heure. Les Pays-Bas et la Hongrie ont par exemple demandé une dérogation pour ne pas appliquer le pacte si celui-ci entraîne une renégociation des traités européens. La Pologne, de son côté, a indiqué son refus de s’acquitter des amendes prévues dans le pacte.
Je vois, c’est donc pour cela que les Etats réfléchissent à une nouvelle législation ! Et quelle en serait la portée ?
Comme je l’ai mentionné, c’est la question des retours des migrants illégaux qui pose particulièrement question. Et les débats se sont essentiellement concentrés autour de la mise en place de « hubs de retour », une solution qui permettrait l’externalisation des demandes d’asile par un pays tiers de l’Union.
Cette solution a-t-elle déjà été testée par certains États ?
Oui, c’est l’Italie qui a ouvert la voie à cette proposition, en signant des accords avec l’Albanie cette année. Le premier renvoi de migrants par l’Italie en Albanie a d’ailleurs eu lieu cette semaine. 16 migrants égyptiens et bangladais ont été envoyés vers un nouveau centre albanais, pour un coût d’environ 18 000 euros par migrant selon Ouest France.
Et les autres États européens sont-ils favorables à une telle solution ?
Les avis sont partagés. L’Allemagne et la Belgique y sont fortement opposées, tout comme l’Espagne, qui estime que si la migration irrégulière doit en effet être réduite, l’immigration légale reste bénéfique, notamment pour le marché du travail. La France adopte de son côté une position plus ambiguë : le Président Emmanuel Macron se dit « sceptique » face à une telle solution, tandis que le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau y serait plutôt favorable.
Une interview réalisée par Laurence Aubron.