Plongée dans les océans - Sakina Ayata

L'anémone fraise

Réserve naturelle de la baie de Saint-Brieuc L'anémone fraise
Réserve naturelle de la baie de Saint-Brieuc

Aujourd'hui, nous retrouvons Sakina-Dorothée Ayata, maîtresse de conférences en écologie marine à Sorbonne Université, pour sa chronique "Plongée dans les Océans" sur euradio.

Vous allez nous parler de l'anémone fraise. Mais, dites-nous, c'est quoi une anémone de mer ?

L'anémone de mer est une cousine des méduses et des coraux, puisqu'elle fait partie de l'embranchement des cnidaires. Les cnidaires sont des animaux marins caractérisés par une symétrie radiale et la présence de cellules piquantes appelées des nématocystes, et qui sont capables de projeter un harpon urticant, ce qui leur permet d'attraper leurs proies.

Pourquoi s'appelle-t-elle anémone, comme la fleur ?

Et bien parce que la forme de l'anémone de mer fait penser à une fleur. Elle est souvent colorée, et constituée d'un pied mou et large qui lui permet de rester fixée sur son support et qui peut rappeler la tige d'une fleur, couronnée de tentacules plus ou moins urticants qui entourent sa bouche et qui peuvent faire penser à des pétales.

Dites-nous à quoi ressemble l'anémone fraise.

Comme son nom l'indique, elle fait penser à une fraise ! Enfin, surtout quand ses tentacules sont rentrés, comme c'est le cas lorsqu'elle veut se protéger ou encore à marée basse - car, je ne l'ai pas dit, mais l'anémone fraise vit sur les rochers situés dans la zone intertidale, la zone de balancement des marées. On la trouve très facilement dans les petites cuvettes laissées dans les rochers à marées à basse.

Quand les tentacules de l'anémone fraise sont rentrés, on ne voit que son pied, qui est mou, relativement court et large, de couleur rouge, et moucheté de nombreuses petites tâches jaune-vert, ce qui rappelle la fraise. Et lorsque ses tentacules sont sortis, ce pied mou, aussi appelé colonne, est alors recouvert de près de deux cents tentacules rouges relativement courts. Et tout en haut de la colonne, autour des tentacules, on observe une rangée de 24 à 48 petites verrues blanchâtres ou bleutées, appelées acrorhages, qui sont très riches en cellules urticantes.

Donc l'anémone fraise est, elle aussi, urticante ?

Oui, mais seulement un peu. Si on la touche avec la main, on ne sentira pas de piqûre, mais ensuite il vaut mieux éviter de se frotter les yeux ou la bouche car ceci peut provoquer de légères brûlures.

En revanche, ce que l'on remarquera en chatouillant les tentacules d'une anémone fraise, c'est que ses tentacules nous agrippent le doigt ! En effet, la peau des anémones possède des "spirocystes", que l'on trouve aussi chez leurs cousins les coraux, qui sont des capsules capables d'expulser une sorte de long filament recouvert de microvillosités collantes. Ce sont ces structures, capables de projeter une sorte de harpon ventouse, qui leur permettent d'attraper et de garder fixées leurs proies sur leurs tentacules.

Et qu'est-ce que ça mange, une anémone fraise ?

L'anémone fraise, comme toutes les anémones de mer, est carnivore. Elle raffole de petits poissons, de petits crustacés, mais aussi de divers débris organiques. Grâce à ces tentacules urticants, elle paralyse sa proie, puis la ramène à sa bouche en se refermant. Les proies sont alors digérées dans sa cavité digestive. Et quand elle a fini, elle recrache ce qui n'est pas digéré, on peut dire qu'elle fait caca par la bouche.

Charmant ! Et comment se reproduit l'anémone fraise ?

Et bien, les anémones de mer, tout comme les méduses, peuvent se reproduire de deux manières différentes : soit de manière asexuée, dans ce cas l'anémone se scinde en deux pour donner deux anémones filles, c'est ce que l'on appelle la parthénogenèse ; soit de manière sexuée. Chez l'anémone fraise, les sexes sont séparés : il y a des individus mâles et des individus femelles, qui vont libérer leurs gamètes dans l'eau de mer. La fusion d'un gamète mâle et d'un gamète femelle va donner un œuf puis une petite larve planctonique, aplatie et ciliée, appelée planula. Après probablement une vingtaine de jours, la larve se sédentarise en se fixant sur le fond et en se transformant en jeune anémone.

Vous nous disiez que l'anémone fraise vivait sur les rochers situés dans la zone intertidale, on peut donc facilement la voir sur nos côtes ?

Oui, en effet ! On la trouve en Mer du Nord, en Manche, dans l'Océan Atlantique Nord, mais aussi en Méditerranée. Elle vis plutôt sur la partie basse de l'estran rocheux et on la trouve jusqu'à une dizaine de mètres de profondeur. Il ne faut pas la confondre avec l'anémone chevaline, aussi appelée tomate de mer, qui elle vit un peu plus haut sur l'estran, très proche de la surface, qui est un peu plus petite, et surtout qui possède un pied tout rouge et sans tâche. D'ailleurs, je vous encourage à aller observer les anémones de mer dans les cuvettes de l'estran, c'est une activité divertissante pour toute la famille !

Et bien, on suivra vos conseils.

Entretien réalisé par Laurence Aubron.