La France est-elle en train de basculer dans l'autoritarisme ? La colère ne faiblit pas après l'adoption du projet de loi de sécurité globale ; transition énergétique, la Commission européenne confrontée au refus de la Suède d'exploiter ses ressources en matériaux rares ; en Ecosse les députés adoptent la gratuité des protections périodiques.
La France sombre-t-elle dans l’autoritarisme ? C’est une question qui inquiète jusqu’à l’Union européenne. En cause, la loi de sécurité globale. Lundi, la Commission a assuré qu’elle suivait le dossier de près. La loi a été adoptée mardi à l’assemblée nationale. En France, le projet suscite un véritable tollé parmi les journalistes et la société civile. Pouvez-vous nous expliquer tout d’abord le contenu de cette loi ?
C’est en effet un projet de loi très controversé. Poussé par le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, la disposition qui suscite le plus de critiques est l’article 24. Celui-ci punit la diffusion malveillante d’images de policiers. La diffusion d’images de policiers est pourtant une garantie démocratique. Par exemple, elle joue un rôle décisif dans la dénonciation des violences policières.
D’autres dispositions inquiètent : la possibilité pour les forces de l’ordre d’exploiter en direct les images captées par leurs caméras-piétons, et ce sans l’intervention d’un juge ; également, l’élargissement de l’utilisation de drones par la police. Pour rappel, la police française utilise déjà des drones. Elle le fait malgré l’interdiction déclarée par le Conseil d’Etat en mai dernier.
A cela, s’ajoutent des déclarations controversées et parfois incohérentes de Gérald Darmanin, le ministre de l’intérieur. En parallèle, plusieurs membres de la majorité ont déclaré publiquement vouloir encadrer davantage la profession de journaliste. Une dérive dangereuse selon de nombreuses organisations de la société civile.
Ce projet de loi fait l’objet d’une levée de boucliers au sein de la société française, mais aussi au niveau international !
Tout à fait ! Le conseil des droits de l’homme de l’ONU a rappelé la France à l’ordre le 12 novembre. Il a pointé des atteintes importantes aux libertés fondamentales. De son côté, la Commission européenne a rappelé l’importance pour les journalistes de travailler librement.
Au niveau français, la défenseure des droits en France, Claire Hédon, a souligné des risques considérables pour la liberté d’expression et la vie privée. La critique gagne aussi les rangs du gouvernement et de la majorité. La ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, a déclaré que ce projet soulevait des questions légitimes. La députée LREM Nathalie Sarles a déclaré que, je la cite, la France se dirige tranquillement vers un Etat autoritaire.
L’adoption de cette loi coïncide avec le démantèlement lundi d’un camp de migrants à Paris. Une action de la police marquée à nouveau par des violences policières.
En effet, et le cas le plus frappant est celui du journaliste, Rémy Buisine, qui travaille pour le média digital Brut. Il a été plusieurs fois molesté de manière très agressive par le même policier. Une enquête a été ouverte par le parquet de Paris.
En parallèle, la recherche scientifique subit aussi un tour de vis. Une loi adoptée fin octobre pénalise de manière démesurée d’éventuelles manifestations étudiantes. Elle retire nombre d’attributions au Conseil national des universités et consacre la précarité des chercheurs.
Tournons-nous vers la Suède. Une initiative de la Commission européenne fait grincer des dents. Dans le cadre de la transition écologique, Bruxelles veut extraire davantage de métaux rares. Des métaux nécessaires à la fabrication d’éoliennes ou de batteries électriques. La seule réserve d’envergure de métaux rares en Europe se trouve en Suède. Pourtant, la société civile s’oppose à tout projet minier, dénonçant les risques pour l’environnement.
Tout à fait, cette réserve se trouve à Norra Kärr, au sud de Stockholm. Il s’agit d’une zone de 10 km carrés constituée de forêts et de zones agricoles. Pour la Commission européenne, son exploitation fournirait un approvisionnement sur le long terme en métaux rares. On y trouve du Zirconium, utile aux secteurs chimiques et nucléaires. Ainsi que du Niobium, nécessaire à la construction d’accélérateurs de particules, eux-mêmes utilisés notamment dans le domaine de l’énergie.
A travers cette initiative, la Commission veut diminuer la dépendance de l’UE en matière de métaux rares.
En effet, aujourd’hui l’Europe dépend très fortement de la Chine notamment. En septembre dernier, Thierry Breton, commissaire européen pour le marché intérieur, a déclaré vouloir accroître l’autonomie européenne.
En Suède, la Commission doit pourtant faire face à l’opposition forcenée d’ONG et d’associations d’agriculteurs. L’exploitation minière leur fait craindre de sérieux dégâts environnementaux. D’autres projets en Espagne ou en Finlande suscitent des inquiétudes.
Terminons en évoquant le pas en avant de l’Ecosse ! Les députés écossais ont voté mardi la gratuité des protections périodiques. Il s’agit d’une grande première.
Tout à fait ! La première ministre écossaise, Nicola Sturgeon, s’est félicitée de cette avancée. L’objectif est de lutter contre la précarité menstruelle. La députée travailliste Monica Lennon a affirmé que personne ne devait être privée d’un accès gratuit aux tampons et protections réutilisables.
Cela implique que des protections menstruelles soient disponibles en permanence dans les écoles, les universités et tout organisme public. L’ONG Plan International a accueilli cette avancée nécessaire. En 2017, une étude a montré que 10% des adolescentes au Royaume-Uni ne pouvaient s’acheter des protections menstruelles faute de moyens.
Victor D’Anethan – Thomas Kox
crédits photo: StockSnap de Pixabay