Aujourd’hui en Europe

Aujourd'hui en Europe - vendredi 2 octobre

Aujourd'hui en Europe - vendredi 2 octobre

Le respect de l’Etat de droit pose question dans certaines zones de l’Union, la Commission européenne a publié un premier rapport sur la question ; la pandémie continue d’affecter l’Europe et le marché de l’emploi : le chômage continue d’augmenter pour le cinquième mois consécutif ; la Commission européenne veut établir une taxe carbone aux frontières de l’Union européenne, pour 2022.

Pour cette édition, intéressons-nous au respect de l’Etat de droit qui pose question dans certaines zones de l’Union. La Commission européenne a publié un premier rapport sur la question. L’objectif est de fournir une évaluation de la situation dans les Etats membres. Tout d’abord, pouvez-vous nous dire exactement ce qu’on entend par cette expression, Etat de droit ?

C’est une expression souvent utilisée mais il est parfois difficile de savoir ce qu’elle recouvre exactement. L’Etat de droit est un concept qui implique la prééminence du droit sur la politique. De cette manière, les règles de droit empêchent les pouvoirs politiques d’en faire à leur guise et les oblige à respecter un strict cadre juridique. L’Etat est soumis aux mêmes règles que les individus. Il s’agit d’une des dimensions majeures de nos démocraties.

L’Etat de droit implique aussi la séparation des pouvoirs, exécutif, législatif et judiciaire. Le gouvernement, le parlement et les tribunaux n’ont pas les mêmes compétences et se limitent mutuellement pour empêcher les abus. 

L’Etat de droit contient de nombreux concepts : l’indépendance du système judiciaire, la liberté des médias, la lutte anti-corruption, et la non-rétroactivité des lois. 

Quelles sont donc les conclusions du rapport de la Commission ?

De manière assez prévisible, le rapport a épinglé la Pologne et la Hongrie. Les deux pays sont régulièrement critiqués pour leurs réformes anti-démocratiques et, ce depuis plusieurs années. Le gouvernement polonais s’est fait remarqué pour des réformes de la justice controversées. Le président hongrois, Viktor Orbán, a progressivement accentué son contrôle sur les universités, les médias, et la justice. 

Qu’en est-il de la Bulgarie dont le gouvernement fait face à de grandes manifestations depuis début juillet. Des manifestations qui dénoncent justement la corruption des autorités et les faillites du système judiciaire ? 

La Bulgarie est pointée du doigt pour la faible confiance de la population envers les autorités, des réformes inabouties, et son incapacité à assurer le bon fonctionnement de son système judiciaire. La commission Justice du parlement européen a d’ailleurs adopté une résolution qui cible directement le premier ministre bulgare, Boïko Borissov. Fait notable car le premier ministre était jusque-là considéré comme intouchable vu son appartenance au parti européen de centre-droit, au pouvoir. 

N’y a-t-il que les pays d’Europe centrale et orientale qui montrent des failles en ce qui concerne l’Etat de droit ?

Les pays qui posent le plus de problème font en effet partie de la vague de pays post-communistes entrés dans l’Union de 2004 à 2008. Pourtant, le rapport souligne notamment que l’indépendance des médias en Italie reste problématique malgré de grandes avancées dans la lutte anti-corruption. En ce qui concerne l’Europe de l’ouest et du nord, la Commission a mis en garde le Danemark concernant le financement des partis politiques et le Luxembourg sur l’efficacité de la lutte anti-corruption. De manière générale, elle n’a pas mis en avant de problèmes structurels au nord et à l’ouest.

La pandémie continue d’affecter l’Europe et le marché de l’emploi. Le chômage continue d’augmenter pour le cinquième mois consécutif. Comment caractériser l’évolution de la situation ?

De manière assez évidente, des secteurs comme le tourisme, la restauration, et le transport ont particulièrement souffert de la situation. Selon Eurostat, l’office européen des statistiques, le chômage est de 7,4% dans l’Union européenne, et 8,1% pour les pays de la zone Euro, qui ont donc l’euro comme monnaie. 

Les prédictions ne sont pas optimistes dans la mesure où une recrudescence des cas dans plusieurs pays va amener de nouvelles restrictions. En dépit des programmes de soutien adoptés par les Etats, le chômage continue d’augmenter dans des progressions inquiétantes. 

Le plan de relance européen adopté en mai 2020 prévoit-il des mesures dans ce domaine ?

Et bien, je rappelle d’abord que le plan de relance est en cours d’élaboration, notamment ses déclinaisons nationales et ce, au moins jusqu’au printemps 2021. D’ici-là, chaque Etat membre doit soumettre à la Commission son plan de relance national. Ensuite, le budget de l’Union européenne pour 2021-2028 doit être adopté. Enfin, les plans de relance nationaux seront évalués par la Commission et le Conseil de l’UE. 

Ce plan a pour objectif de créer 2 millions d’emplois d’ici 2024. Pour ce faire, la Commission invite les Etats membres à investir dans la transition écologique et dans une politique du numérique ambitieuse. La Commission compte également soutenir le développement de l’économie circulaire en Europe pour ramener des emplois délocalisés dans l’Union. 

De manière plus générale, la Commission européenne veut assurer l’emploi des jeunes et réduire toujours plus l’écart salarial entre hommes et femmes. 

Terminons par un projet prometteur de l’Union européenne en matière d’énergie. Pour 2022, la Commission veut établir une taxe carbone aux frontières de l’Union européenne. En quoi cela consiste exactement ?

C’est en effet une innovation particulièrement intéressante ! Dans le cadre du pacte vert européen, la Commission veut réduire les émissions de gaz à effet de serre de 55% d’ici 2030 sur base des niveaux de 1990. 

En résumé, la taxe carbone aux frontières consisterait à taxer l’empreinte carbone des importations extra-européennes. Le but est de taxer les produits dont la fabrication a davantage pollué que les produits fabriqués dans l’Union. De cette manière, l’Union européenne privilégie les produits européens au détriment de produits moins chers et qui répondent à des normes moins strictes. 

L’objectif est également d’inciter les industries non-européennes à moins polluer. Enfin, il s’agit aussi d’éviter les « fuites de carbone », c’est-à-dire, éviter que des entreprises européennes délocalisent pour pouvoir polluer ailleurs et ramener à moindre coût, leurs produits dans l’Union. Sur quels secteurs la taxe s’appliquera, c’est une question qui fait l’objet d’une consultation publique jusqu’au 28 octobre. 

Victor D'Anethan - Thomas Kox