Aujourd'hui en Europe est un journal consacré aux actualités européennes du jour, réalisé par la rédaction d'Euradio à Bruxelles. Avec Thomas Kox, Baptiste Maisonnave, Paul Thorineau et Ulrich Huygevelde.
Au programme :
- Ukraine : Malgré une baisse chiffrée du soutien des européens ; un plan d’action pour accélérer l’adhésion de l’Ukraine à l’UE ; le gel indéfini des avoirs russes ;
- Bulgarie : manifestation monumentales ont mené à la démission du gouvernement
- Birmanie : Collectif d’ONG appelle l’Europe à agir
On commence ce journal en Ukraine, qui s’est dit prête, hier, à envisager une démilitarisation du Donbass. Une annonce qui pourrait marquer un tournant majeur dans les négociations.
Oui, la proposition, approuvée au préalable par les alliés européens de Kyiv, impliquerait un recul des forces armées russes et ukrainiennes de part et d'autre de la ligne de front dans le Donbass. La région est dans le viseur de Moscou depuis 2014, une concession, donc, du président ukrainien qui fait face à une énorme pression de Washington. Une proposition transmise dans le “plan de paix” présenté à Donald Trump mercredi.
Le conseiller de Volodymyr Zelensky Mykhaïlo Podoliak précise d’ailleurs qu’un “contingent étranger” et des “missions de surveillances” pourraient être déployés pour surveiller la mise en oeuvre du projet. Jeudi, Volodymyr Zelensky précisait que toute cession de territoire devait être “juste” et validée soit par une “élection”, soit par un “référendum” - rien n’est fait donc.
Tandis que les négociations semblent avancer, le processus d’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne progresse aussi. Un plan d’action, présenté hier, permettrait aux 27 de contourner le véto de la Hongrie.
“Nous considérons l’adhésion de l’Ukraine à l’UE comme le bras politique de la garantie de sécurité européenne pour l’Ukraine”. Cette affirmation, c’est celle de Marta Kos, Commissaire à l’élargissement de l’UE, qui s’est rendu à Lviv, dans l’ouest du pays en guerre, pour développer un plan en compagnie du vice-Premier ministre ukrainien, Taras Kachka, et des ministres des Affaires européennes de l’UE, à l’exception de la Hongrie..
La liste, en dix objectifs, demande par exemple une lutte approfondie contre la corruption et un renforcement de l’Etat de droit. Des demandes qui ne manquent pas de faire écho à la proposition, cet été, par le gouvernement ukrainien, d’une loi visant à prendre le contrôle de deux agences indépendantes anticorruption, ce qui avait suscité une colère immense de la part des citoyens, et de l’exécutif de l’UE.
L’Union européenne augmente donc son soutien dans la procédure d’adhésion, mais dans un autre domaine, crucial, celui de l’aide militaire, il est en fort déclin.
Oui, c’est un constat dressé par l’institut de recherche allemand Kiel Institute : l’aide militaire européenne à l’Ukraine pourrait atteindre son niveau le plus bas cette année. Les Européens, précise le rapport, ne parviennent pas à compenser l’arrêt de l’aide américaine.
Si les 27 finançaient encore suffisamment en juin, leurs engagements n’ont pas su tenir la cadence, et se sont effondrés entre juillet et octobre pour atteindre seulement 4,2 milliards d’euros. Sur les dix premiers mois de l’année 2025, la somme totale avoisine, elle, les 32,5 milliards d’euros - le chiffre le plus faible depuis le début de l’invasion russe.
On continue ce journal à Sofia, en Bulgarie, où près d’une centaine de milliers de personnes ont envahi les rues de la capitale mercredi pour protester contre le premier ministre Rossen Jeliazkov. Accusé de corruption, le gouvernement a annoncé hier sa démission.
“Je vous informe que le gouvernement démissionne aujourd’hui”. L’annonce était sobre, elle a eu l’effet d’un soulagement dans un pays qui soutenait à plus de 70% la vague de protestation selon une étude publiée jeudi. Dos au mur, Rossen Jeliazkov faisait face à la pression des citoyens, à l’étude, par les députés bulgares, d’une motion de censure déposée par l’opposition, et à une accusation de corruption visant l’un de ses proches alliés, l’oligarque et homme politique Delyan Peevski.
Ce dernier avait été sanctionné par une instance américaine en juin 2021 pour “corruption, trafic d’influence et pots-de-vin”, et par le Royaume Uni en février 2023. Le gouvernement, lui, n’a été formé qu’en janvier, après sept élections en moins de quatre ans, et tentait d’imposer, depuis plusieurs mois, un projet particulièrement contesté de budget.
Cette explosion de colère, Baptiste, intervient deux semaines seulement avant l’introduction de l’euro dans le pays.
Oui, et le sujet fait débat : en juin, un sondage commandé par le ministère bulgare des finances indiquait que 46,8% des citoyens étaient opposés à la monnaie unique européenne, et que 46,5% y étaient favorables. Une division qui s’explique par les inquiétudes des Bulgares de voir les prix augmenter avec l'introduction de l’euro.
Le petit pays des Balkans est aussi le plus pauvre de l’Union européenne, or, la réforme budgétaire que comptait faire passer le gouvernement de Rossen Jeliazkov prévoyait une augmentation des impôts et une hausse des cotisations sociales. En fait, les manifestations avaient déjà débuté en novembre, avec l’introduction de cette réforme.
Désormais, et comme le prévoit la Constitution bulgare, la démission du Premier ministre doit être validée par le Parlement. Si aucune majorité ne se forme au sein de l’assemblée pour le remplacer, un gouvernement intérimaire prendra sa place et une nouvelle élection devra être convoquée dans un délai de deux mois.
On termine ce journal en Birmanie, entre la Thaïlande, la Chine et le Bangladesh. A l’approche du Conseil européen des 18 et 19 décembre, un collectif d’ONG alerte l’Europe sur la gravité de la crise et la nécessité urgente d’agir dans, je cite, “un Etat failli”.*
“La politique des Etats européens à l’égard de la Birmanie ne peut continuer à souffrir d’un deux poids deux mesures sans mettre en péril notre crédibilité, mais aussi notre sécurité” explique la tribune parue hier dans le quotidien Libération. Le pays, victime d’une répression très forte depuis un coup d’Etat il y a plus de quatre ans, traverse l’une des plus graves crises humanitaires au monde.
A l’origine de ce coup d’Etat et aujourd’hui à la tête de la junte : le général Min Aung Hlaing, qui fait par ailleurs l’objet d’un mandat d’arrêt par le procureur de la Cour pénale internationale. Les populations, déplacées, affamées, n’attirent que très peu l’attention des politiques internationales, dont les quelques aides humanitaires sont presque systématiquement détournées par les groupes armés. La junte détient actuellement 46 professionnels des médias, faisant du pays la troisième plus grande prison au monde pour les journalistes, derrière la Chine et la Russie selon Reporters sans frontières.
Pourquoi, selon les signataires de la tribune, cette situation dramatique touche directement l’Europe ?
Et bien au-delà d’une question de “crédibilité” et de “responsabilité” pour reprendre les mots du texte, il faut savoir que la junte birmane est soutenue par la Chine, la Corée du Nord, la Biélorussie et… la Russie. Min Aung Hlaing et Vladimir Poutine multiplient les coopérations, allant de l’envoi d’ouvriers birmans en Russie à la construction prochaine d’un port russe en territoire birman.
S’y ajoutent des coopérations dans le domaine nucléaire, bancaire et industriel qui vont, je cite, “à rebours des sanctions européennes”. Si le Parlement a déjà voté une résolution sur les crises birmanes fin novembre, il doit maintenant entraver, je cite à nouveau, “le soutien pratique et grandissant du régime militaire à la Russie de Vladimir Poutine”.
Un journal de Baptiste Maisonnave, Ulrich Huygevelde et Paul Thorineau.