L'éco de Marc Tempelman

C'est la saison des dividendes - L'éco de Marc Tempelman

C'est la saison des dividendes - L'éco de Marc Tempelman

Nous accueillons Marc Tempelman, un des co-fondateurs de la FinTech Cashbee, qui aide les Européens à épargner plus et mieux. Nous discutons toutes les semaines de finance. 

Au programme cette semaine, les dividendes des entreprises.

Oui, le premier trimestre est pour la plupart des entreprises le moment où elles annoncent leurs résultats de l’année et… Leurs dividendes. Je pensais que le moment était opportun pour en discuter.

Très bien, car c’est effectivement un terme qu’on entend souvent dans la bouche des analystes financiers. Alors commençons par le début. Il s’agit en fait d’une partie des bénéfices de ces sociétés, n’est-ce pas ?

Tout à fait. Dans le scénario le plus simple, une entreprise qui réalise des profits décide d’en distribuer une partie à ses actionnaires. Elle annonce par exemple vouloir verser 50 centimes par action. Si vous possédez 100 actions de cette société, alors vous allez recevoir 50 euros de dividendes.

Je précise que dans la grande majorité des cas, ces dividendes sont versés en numéraire, c’est-à-dire par virement d’une somme d’argent. Mais il arrive parfois que les entreprises choisissent de verser des dividendes sous forme de nouvelles actions, qui se rajouteront à ceux que vous avez déjà.

Et les investisseurs ont droit à ces dividendes parce qu’ils ont pris le risque d’investir, c’est ça ?

Absolument. En achetant des actions vous êtes devenu, pour partie, propriétaire de la société. Cela est vrai pour les petites comme pour les grandes entreprises. Donc en achetant une action de LVMH, vous êtes pour une infime partie, propriétaire de Louis Vuitton, Dior, du champagne Moët et du cognac Hennessy. Et à ce titre, vous avez droit à une partie des gains de LVMH.

Pourquoi vous dîtes une partie des gains et pas la totalité des gains ?

Parce qu’il est rare que les dirigeants d’une société décident de verser la totalité des gains à leurs actionnaires. En effet, il ne resterait plus rien pour investir, recruter de nouveaux employés, construire de nouvelles usines, et développer de nouveaux produits. D’ailleurs il est beaucoup plus fréquent que des entreprises à forte croissance décident de réinvestir la totalité de leurs bénéfices pour maintenir, voire accélérer leur croissance.

Vous avez des exemples parlants ?

Steve Jobs, le fondateur génial d’Apple, était fortement opposé à la distribution de dividendes. Pendant son règne, la société n’a jamais versé un centime à ses actionnaires, choisissant de réinvestir la totalité de ses gains dans ses projets technologiques et l’innovation. Mais les bénéfices d’Apple ont cru tellement vite qu’en 2012, lorsque Steve Jobs a passé le rôle de PDG à Tim Cook, la société était assise sur plus de 100 milliards de dollars de cash.

Plus édifiant encore, le géant Amazon n’a jamais versé de dividendes, décidant année après année de réinvestir ses profits pour accélérer sa croissance. Ce qui n’empêche pas à ses actionnaires d’être probablement très heureux, puisque la valeur de l’action a cru de 34% par an en moyenne depuis dix ans.

Mais alors, un épargnant qui souhaite acheter des actions doit-il privilégier les sociétés à forte croissance qui ne versent pas de dividendes, ou des sociétés qui grandissent peut-être moins vite, mais qui en versent tous les ans ?

Excellente question. Et la réponse est « ça dépend ». Et notamment de vos objectifs financiers. Si vous visez des revenus réguliers pour supplémenter votre salaire ou votre retraite, il peut être logique de s’intéresser aux sociétés connues pour verser des dividendes très régulièrement.

Comme Coca Cola par exemple qui verse un dividende trimestriel depuis 1920. Non seulement ce dividende est régulier mais en plus Coca Cola a augmenté le montant de celui-ci tous les ans depuis 57 ans.

Plus proche de nous le fabricant de luxe Hermès fait partie des entreprises qui déboursent une partie de leurs gains régulièrement. Ainsi, Hermès verse des dividendes deux fois par an depuis plusieurs décennies. Son montant était de 31 centimes en 2000, mais de 4,55 euros en 2019 !

Attention, une telle régularité et une hausse aussi constante des versements est rare dans la durée. Tellement rare que les investisseurs ont donné un nom aux sociétés ayant versé des dividendes en hausse annuelle depuis 10 ans ou plus. Il s’agit des « Aristocrates du dividende ».

Donc un épargnant désireux de recevoir des revenus réguliers favorisera ces Aristocrates du Dividende. À l’inverse, l’investisseur qui recherche des gains par l’appréciation du cours de bourse s’intéressera plutôt aux sociétés à forte croissance. Sachant que celles-ci ne versent pas de dividendes. C’est ça ?

Oui. C’est ça. Mais en comprenant que le monde des actions et des dividendes n’est pas figé. Car le versement d’un dividende n’est jamais certain et son montant peut varier.

Prenons le cas des grandes banques, connues pour ne pas croître très rapidement, mais payant des dividendes très réguliers et stables. Au début de l’année dernière, la Banque de France leur a suggéré de suspendre les dividendes pour l’année, afin de préserver du capital pour faire face à une éventuelle vague de faillites d’entreprises. Quand la Banque de France suggère quoi que ce soit aux banques, celles-ci ont tendance à suivre sa recommandation. Résultat des courses : aucune d’entre elles n’a versé de dividendes, supprimant du jour au lendemain les rentrées d’argent réguliers à laquelle s’attendaient de nombreux actionnaires.

Interview réalisée par Laurence Aubron

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Image : Gerd Altmann