Alors, Quentin Dickinson, avez-vous passé une bonne semaine ?
En tout cas, ce fut une semaine de surprises, de frictions, et d’au moins une décision européenne, aussi discrète que significative.
Commençons par les surprises…
On l’avait un peu vue venir, mais nous étions nombreux, dans notre poste d’observation bruxellois, à être pris de court par l’annonce jeudi de la démission de la Première ministre britannique, partie (selon une fine plaisanterie locale) partie sans laisser de TRUSS - vous l’avez, Laurence ?...
On aura beaucoup glosé sur le mandat de quarante-quatre jours de la malheureuse, le plus court de tous les chefs de gouvernement du pays depuis la création de ce poste il y a trois siècles. Soyons justes : la culture et les usages politiques ont profondément changé au fil du temps, de sorte que toute comparaison s’avère un peu artificielle, si l’on veut bien se souvenir que les passages les plus courts au 10, Downing Street, ont tous eu lieu au XXe et au XXIe siècles (sauf George CANNING, mort en fonctions en 1827), alors que les records de longévité ont tous été enregistrés aux XVIIIe et XIXe siècles (sauf Margaret THATCHER, pendant plus de onze ans au XXe).
Restons un moment Outre-Manche, où l’Institut Tony-Blair a publié un sondage passionnant, d’où il ressort que, parmi les électeurs ayant voté pour le Brexit, aujourd’hui, une nette majorité regrette ce choix, mais dans le même temps, l’idée de redevenir membre de l’UE reste minoritaire, alors qu’une majorité entend traiter sur un strict pied d’égalité les candidats à l’immigration européens et ceux du reste du monde. De même, les sondés se montrent particulièrement fiers des accords de libre-échange conclus depuis le Brexit avec des pays non-européens – sauf que, si l’on examine les chiffres du très sérieux Office de Responsabilité budgétaire qui viennent de paraître, ces accords se traduisent par un effet positif de 0,2% du PIB britannique – alors que les effets négatifs du Brexit sur le commerce extérieur s’élèvent à 4%...
L’Allemagne n’était pas vraiment à la fête la semaine dernière, c’est cela ?
En effet : les partenaires de BERLIN au sein de l’UE (on l’a déjà signalé ici) s’agacent du cavalier seul allemand en matière de protection financière des entreprises et des ménages contre le prix de l’énergie, mais vient désormais s’ajouter à la grogne le choix allemand d’un système de missiles anti-missiles d’origine américano-israélienne, alors qu’un système européen, au moins aussi efficace, a été mis au point par les Français et les Italiens. Ajoutons que, pour d’évidentes raisons de politique intérieure, la Pologne réclame à nouveau des compensations financières extravagantes pour les dégâts subis par elle entre 1939 et 1945 du fait de l’occupation allemande.
Enfin, en dépit de ces désagréments, le Sommet des chefs d’État et de gouvernement de l’UE, dans la nuit de jeudi à vendredi, aura permis de reprendre le lent cheminement des Vingt-sept vers un plafonnement du prix du gaz.
Et la décision européenne, que vous décriviez comme discrète et significative, en quoi consiste-t-elle ?
A l’époque des pirates de l’informatique, souvent au service de pays peu sympathiques à notre égard, et des rançongiciels mafieux, les Européens ont lancé lundi une stratégie complexe de protection contre les cyberattaques de leurs chaînes d’approvisionnement. On aura certainement l’occasion d’en reparler.
Et pour cette semaine, qu’avez-vous vu de particulier ?
D’abord, en début de semaine, le conseil de ministres de l’UE de l’Environnement, suivi de celui de leurs collègues de l’Énergie, à LUXEMBOURG, comme toujours au mois d’octobre.
Ensuite, à BERLIN, le Chancelier fédéral Olaf SCHOLZ copréside avec Ursula von der LEYEN, Présidente de la Commission européenne, une réunion sur le financement de la reconstruction de l’Ukraine, lorsque les armes se seront tues.
En milieu de semaine, nous connaîtrons l’indice de confiance des entreprises allemandes, puis les chiffres de la production industrielle russe, enfin les prévisions mondiales de l’Agence internationale de l’Énergie. Et jeudi, la Banque centrale européenne dira comment elle compte s’attaquer à une inflation à deux chiffres.
Vendredi, le gouvernement britannique (qui sera par ailleurs en proie à des grèves dans les ports, chez les opérateurs téléphoniques des services d’urgence, ainsi que de 15.000 ambulanciers) devra décider d’élections anticipées au parlement régional en Irlande du Nord, faute d’accord de partage du pouvoir exécutif entre partis rattachistes (à la République d’Irlande) et partis unionistes (au Royaume- Uni).
Ce sera tout ?
Non ! Depuis lundi, le nouveau Premier ministre britannique, Rishi SUNAK, d’origine indienne, respecte sûrement Diwali, la Fête des Lumières ; vendredi, les Tchèques (qui assurent la présidence tournante semestrielle de l’UE) célèbrent leur
Journée de l’Indépendance ; et, dimanche, pour notre rubrique surréalisme en tous genres, les Russes se remémorent… les purges de STALINE.
Chronique réalisée par Laurence Aubron.