La semainière de Quentin Dickinson

La semainière de Quentin Dickinson

© European Union La semainière de Quentin Dickinson
© European Union

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Alors, Quentin Dickinson, avez-vous passé une bonne semaine ?...

Plus ou moins, tant ces jours derniers auront-ils été porteurs de nouvelles franchement préoccupantes, même si, alors même que le désespoir commençait à assombrir le climat chez les Européens (en tout cas, ceux de BRUXELLES et de STRASBOURG), le sort s’est finalement ravisé, et le pire fut évité.

On imagine que vous voulez parler des scrutins en Moldavie…

Vous avez raison. Dimanche, en Moldavie, se tenaient parallèlement l’élection présidentielle et un référendum constitutionnel. Traditionnellement imprécis, voire carrément trafiqués, les sondages moldaves donnaient largement gagnante la présidente sortante, la pro-européenne Maia SANDU, et prédisaient une victoire éclatante pour le Oui à l’inscription dans la Constitution moldave de la perspective de l’adhésion du pays à l’Union européenne.

Mais il n’en fut rien…

Mettons en tout cas qu’on a échappé au pire. Le Oui à l’Europe, en perdition tout au long du dépouillement au cours de la soirée électorale dimanche, s’est redressé par miracle sur le coup de minuit, pour l’emporter d’une (très) courte tête, essentiellement grâce au vote des Moldaves expatriés dans l’Union européenne, au Canada, et aux États-Unis.

Mais Mme SANDU, arrivée largement en tête parmi les dix candidats (surtout pro-russes), ne passe pas la barre des cinquante pour cent ; il faudra donc procéder à un second tour le 3 novembre, où rien n’est garanti pour elle, si ses neuf concurrents appellent tous à voter pourl’un d’entre eux.

On retiendra de ce double scrutin une incroyable campagne d’achat de votes : voter pro-russe rapporte entre 50 et 100 Euros par électeur. Les Douanes moldaves ont interceptés un grand nombre d’individus revenant de Russie, porteurs de sommes considérables en billets de banque neufs. On a aussi noté que le Kremlin a organisé des manifestations de Russes, chargés d’intimider les électeurs moldaves qui se rendaient aux deux bureaux de vote ouverts à MOSCOU par leur consulat.

Évidemment, une centaine d’Euros, c’est de la petite bière, comparés au million de Dollars promis par Elon MUSK à tout Américain qui signerait l’appel à voter pour Donald TRUMP dans cinq États-clefs. Mais le principe (ou, plutôt, l’absence de principes) est le même, et il faut le dénoncer.

Mais ailleurs, dans des conditions plus inquiétantes encore qu’en Moldavie, une autre campagne est en cours depuis le début de la semaine dernière, Quentin Dickonson…

Et c’est sur les bords de la Mer noire, en Géorgie, que cela se passe. Samedi se tiennent les élections législatives, sur fond de bras-de-fer entre la Présidente de la République, la pro-européenne (et franco-géorgienne) Salomé ZOURABICHVILI, et le gouvernement pro-russe et aux relents qui rappellent les méthodes autoritaires de Viktor

ORBÁN en Hongrie. Depuis dix jours, d’impressionnantes manifestations pro- européennes sont organisées à TBILISSI, la capitale, et dans les principales villes du pays. Ici aussi, les pressions du Kremlin se multiplient et l’argent russe circule. Croisons les doigts, faute de mieux.

Enfin, Quentin Dickinson, vous vouliez nous parler de la disparition d’un Écossais…

Cet homme, c’est Alex SALMOND, qui fut, de longues années durant, l’âme et le promoteur du retour à l’indépendance de l’Écosse. Terrassé par une crise cardiaque, il est mort à soixante-dix ans, alors qu’il participait à un colloque international en Macédoine du Nord.

Il avait hérité du SNP, le Parti national écossais, et en avait fait une redoutable machine de guerre électorale, qui l’aura porté aux fonctions de Premier ministre régional de l’Écosse. Pris dans une sombre affaire de harcèlement, il passe la main à son bras droit, Mme Nicola STURGEON. Le SNP domine la vie publique du pays, et rien ni personne ne paraît pouvoir résister à l’habile juriste et oratrice enflammée qu’est Mme STURGEON.

Peu à peu, les sondages inversent le résultat du référendum d’il y a dix ans sur l’indépendance, perdu pour cette cause. Et puis voilà que Mme STURGEON démissionne en plein essor, en raison des soupçons de détournements de fonds du Parti par le secrétaire général de celui-ci, qui se trouve être son mari.

Privé de ses locomotives historiques successives, le SNP décline et se déchire ; deux seconds couteaux prennent la relève ; le second vient de démissionner.

Entretemps, M. SALMOND aura fondé un parti indépendantiste rival nommé Alba (‘Écosse’ en gaélique), achevant de saper une ambition qui ne mourra certes pas, mais mettra à nouveau des décennies avant de retrouver toute crédibilité politique.

Une interview réalisée par Laurence Aubron.