La semainière de Quentin Dickinson

La semainière de Quentin Dickinson

© Arianit - Wikimedia Commons La semainière de Quentin Dickinson
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Retrouvez chaque semaine la semainière de Quentin Dickinson sur euradio. L'occasion de découvrir la diplomatie et l'actualité européenne sous un nouvel angle.

Alors, qu’avez-vous retenu de ces derniers jours ?...

D’abord, un sujet de satisfaction : objet d’une irréductible confrontation avec la Serbie, dont il faisait jadis partie, le Kosovo a tenu dimanche dernier ses élections législatives. Ce petit pays, enclavé entre le Monténégro, l’Albanie, la Macédoine, et la Serbie, se rapproche peu à peu du modèle démocratique européen : depuis l’indépendance proclamée en 2008, ce scrutin est consécutif au premier gouvernement à avoir accompli un mandat complet de quatre ans.

L’enjeu, ce sont les 120 sièges de l’Assemblée, dont vingt sont réservés aux minorités, dont le Parti serbe, qui devrait recueillir une dizaine de sièges.

Le résultat officiel a tardé à être annoncé, à la suite d’une panne paralysante du système électronique d’enregistrement des votes, ce qui a obligé tous les bureaux de vote à procéder à un recompte manuel des bulletins.

La stabilité est au rendez-vous : le parti LVV, de centre-gauche, du Premier ministre Albin KURTI arrive largement en tête, sans toutefois réunir les soixante-et-un députés nécessaires à une majorité. Il est probable que la formation d’un gouvernement prenne un temps certain avant d’aboutir. A noter : la régularité de la campagne et du scrutin a été suivie par une délégation de cent observateurs de l’Union européenne, emmenée par l’eurodéputée française Nathalie LOISEAU.

C’est positif, certes, mais tout ne va pas aussi bien ailleurs, à la périphérie de l’Union européenne…

Des nouvelles rassurantes du Kosovo, donc, mais bien plus inquiétantes en provenance de la Géorgie, en proie à un déferlement de violence policière depuis les élections législatives truquées d’octobre dernier, fortement contestée lors d’une succession de manifestations de masse dans la capitale, TBILISSI, et dans les principales villes du pays.

La vindicte du gouvernement contre le soulèvement populaire, en particulier de la part d’une jeunesse militante pro-européenne, s’exerce aussi par une rafale de mesures lourdement restrictives, frappant les médias, dont les dirigeants sont battus et jetés en prison, ainsi que par l’interdiction de tout soutien financier venu de l’étranger. A bien des points de vue, cet ensemble de décrets est même plus sévère que le modèle russe dont il est inspiré.

L’organisateur du chaos est un oligarque géorgien ayant fait fortune en Russie, et objet de sanctions internationales. Bidzina IVANICHVILI, c’est son nom, n’occupe aucune fonction officielle, si ce n’est celle de président-fondateur du parti intitulé Le Rêve géorgien, mais il dirige de fait le gouvernement issu de ce parti.

Et il vient de trouver un nouveau prétexte à isoler son pays de l’extérieur (à l’exception de la Russie, s’entend) : c’est la décision de Donald TRUMP de supprimer l’aide humanitaire américaine, ce qui démontrerait, selon lui, que les Géorgiens ne peuvent compter que sur eux-mêmes – et qu’ils doivent renoncer à ce qu’il qualifie de mirage européen.

Et vous voulez nous dire un mot de la guerre en Ukraine…

Pas directement des opérations militaires en cours ; mais venons-en à reparler de cette flotte-fantôme de navires pétroliers qui assurent la contrebande des exportations russes d’hydrocarbures, en contournant les sanctions occidentales.

Pour les pays riverains de la Mer baltique, et, en particulier, pour la Finlande et les trois États baltes, cette activité maritime n’est pas anodine : en effet, au cours de l’année dernière, ce ne sont pas moins de 348 navires-fantômes qui ont assuré près de la moitié des exportations illégales de pétrole russe, en passant par le Golfe de Finlande et la Mer baltique.

Pour relativiser ces statistiques, il faut savoir que la vente du contenu de ces 348 navires aura rapporté au Kremlin environ un tiers du budget annuel total des forces armées russes.

Les pays du pourtour de la Baltique entendent désormais arraisonner tout navire suspect provenant d’un port russe, et le soumettre à une vérification approfondie, à la fois administrative et technique ; immatriculés sous pavillon de complaisance, ces pétroliers sont le plus souvent insuffisamment assurés et en piètre état, et, de ce fait, constituent un danger majeur permanent de pollution de l’environnement marin en cas de naufrage – indépendamment de leur contribution à l’effort de guerre de la Russie.

Une brève, pour conclure ?...

…une information qui prolonge quelque peu ce qui vient d’être dit : c’est la proposition de la Présidente de la Commission européenne d’élargir, dans les traités européens, la définition des circonstances exceptionnelles qui autorisent les États-membres de l’UE à dépasser les seuils d’encadrement de leurs dépenses. Selon Ursula von der LEYEN, un effort militaire supplémentaire pourrait ainsi être financé par cet assouplissement du Pacte européen de Stabilité et de Croissance.

Une fois de plus, nous constatons que l’Union européenne a la bonne analyse et les bonnes propositions – mais qu’elle met un temps – apparemment incompressible – à les mettre en œuvre.

C’est sûr, les gouvernements autoritaires et les dictatures de tout poil seront toujours plus rapides en besogne que les démocraties parlementaires. Faites quand même prudemment votre choix de société.

Un entretien réalisé par Laurence Aubron.