Nous accueillons Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’épargne gratuite Cashbee. Nous discutons toutes les semaines de finance. Marc, de quoi allons-nous parler aujourd’hui ?
Nous sommes à quelques jours du second tour. Difficile de ne pas parler des élections présidentielles. Mais je vous propose d’aborder le sujet d’un angle financier. Et de regarder comment les marchés financiers interprètent cet évènement politique.
Très bien. Quel est le point de départ ?
Je pense que nous pourrions commencer par les taux d’intérêts. Et plus précisément en observant la différence entre les taux auxquels s’endettent l’État Allemand et la France respectivement.
L’Allemagne est perçue sur les marchés financiers comme la référence par rapport à laquelle les autres émetteurs de dette se comparent. Le rendement offert par le Bund à 10 ans était de -0,12% au début de l’année, et il a grimpé pour atteindre 0,84% la semaine dernière.
Quant à la dette de l’État français, son taux, toujours à 10 ans, a évolué de 0,23% à 1,34% sur la même période.
Ce qu’il me paraît intéressant, c’est d’observer l’écart entre les deux. Qui est passé de d’un tiers à un demi pourcent.
Ça fait beaucoup de chiffres, mais comment les interpréter ?
Eh bien, premièrement, nous pouvons nous rassurer, la France paie à peine plus pour sa dette que l’Allemagne. Son crédit est très apprécié des investisseurs internationaux. Ils font confiance à l’État français pour rembourser sa dette en temps et en heure. Mais il est indéniable que depuis le début de l’année, ces mêmes investisseurs sont devenus un peu plus méfiants vis-à-vis de la France. Ils exigent donc une prime plus importante avant d’investir dans la dette de l’État français. Et les élections présidentielles y sont sans doute pour beaucoup.
Qu’est-ce qu’ils craignent, ces investisseurs étrangers ?
D’abord, des élections présidentielles créent toujours un degré d’incertitude. Et les investisseurs n’aiment pas ça. Or il se trouve que les sondages donnent Macron gagnant, mais de peu. En 2017, les choses étaient claires. Macron l’avait emporté avec deux tiers des voix. Aujourd’hui l’écart est bien plus faible, avec un score qui se situerait autour de 53% à l’avantage du président sortant.
Ensuite, l’arrivée au pouvoir peu probable mais possible de Marine Le Pen inquiète les investisseurs. Car cela aurait des conséquences pour l’Europe toute entière. Ils craignent par exemple qu’une fois au pouvoir, Mme Le Pen se désengage de l’Europe, en réduisant unilatéralement les contributions de la France à l’Union Européenne. Et qu’elle cherchera à sortir de l’OTAN également. La France étant un des plus grands pays en Europe, ces décisions déstabiliserait le continent tout entier.
Et sur le plan purement économique. Comment interpréter l’attitude des investisseurs internationaux ?
Aucun des deux candidats ne rassure pleinement les gérants des grands fonds.
Mme Le Pen souhaite instaurer la retraite à 60 ans. De nombreux investisseurs se demandent comment la France pourrait financer un tel changement, alors que le nombre d’actifs par rapport aux nombre de retraités ne cesse de baisser. Ils craignent donc que cela conduira à une forte augmentation de l’endettement du pays.
Quant au président Macron, il est contraint d’aller chercher des voix à gauche et notamment auprès de ceux qui ont voté pour Jean-Luc Mélanchon. Il s’est donc plus engagé sur un certain nombre de thèmes sociaux. Comme par exemple de vouloir limiter les salaires des dirigeants d’entreprises ou encore d’ouvrir le débat sur la réforme des retraites. Certains aspects de son programme peuvent inquiéter les investisseurs.
Le mot de la fin ?
Observons l’évolution de l’écart de taux entre la France et l’Allemagne au lendemain des élections. Ce sera un bon indicateur - parmi d’autres bien sûr - pour savoir si l’heureux ou l’heureuse élu(e) est apprécié(e) ou non par la communauté financière internationale.
Marc Tempelman au micro de Cécile Dauguet
Chaque semaine, nous accueillons Marc Tempelman, un des co-fondateurs de la FinTech Cashbee, qui aide les Européens à épargner plus et mieux. Nous discutons avec lui de finance.
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