L'éco de Marc Tempelman

La puissance économique de l’Inde

La puissance économique de l’Inde

Chaque semaine sur euradio, retrouvez Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’épargne gratuite Cashbee, qui traite les sujets et les actualités de la finance.

De quoi allons-nous parler aujourd’hui ?

Bonjour. Je voudrais vous parler de l’Inde, ce pays qui est récemment devenu le pays le plus peuplé au monde. Et pour être plus spécifique, je vous propose d’échanger sur sa puissance économique grandissante.

Très bien. En effet, je crois comprendre que sous son premier ministre Narenda Modi, le pays affiche de très grandes ambitions dans ce domaine.

Vous avez raison. L’économie indienne est déjà la 5ème puissance économique au monde. Mais elle souhaite se hisser à un niveau de parité avec celle des États-Unis, de la Chine et de l’Union Européenne. Et pour y parvenir, elle compte notamment sur sa main d'oeuvre nombreuse, jeune et relativement bien éduquée.

L’Inde a toutes les chances d’atteindre son objectif si on observe sa croissance économique actuelle, n’est-ce pas ?

Oui. Son Produit National Brut augmente à un rythme de plus de 6% par an aujourd’hui. Et selon une étude de la banque d’affaires Goldman Sachs, même si ce rythme baissera un peu dans les années à venir, le PNB de l’Inde dépassera celui de la zone euro en 2051 et celui des États-Unis en 2075.

J’imagine que cette analyse repose notamment sur l’évolution démographique des différents pays ?

En partie. En effet, la main-d'oeuvre de l’Union Européenne et de la Chine va baisser dans les décennies à venir, en ligne avec leurs populations. Alors que celle de l’Inde va continuer de croître jusqu’en 2040.

Mais l’économie indienne bénéficie aussi d’autres atouts. Le pays a énormément investi dans son infrastructure. Le maillage routier s’est accru de 25% depuis 2014, le nombre d’aéroports a doublé et son infrastructure digitale a explosé. Rien qu’en 2022, 832 millions connexions internet à haut débit ont été installées. Cela permet au pays d’accroître considérablement ses exportations, dont 40% sont des services.

L’économie indienne bénéficie aussi indirectement des tensions entre les puissances de l’Ouest et la Chine.

Oui. La politique du premier ministre Modi, connu sous le slogan “Make in India” ou “Fabriquez en Inde”, vise directement les entreprises européennes et américaines qui cherchent à diversifier leurs chaînes d’approvisionnement, afin de les rendre moins dépendantes de la Chine.

Ainsi, Apple assemble 7% de ses smartphones en Inde. Foxconn, le fabricant de puces électroniques taïwanais, vient d’annoncer qu’elle construirait sa prochaine usine dans le pays.

Quels sont les risques qui pourraient freiner la croissance économique de l’Inde ?

D’un point de vue macro-économique, j’en vois trois. L’Inde exporte énormément de services technologiques et notamment des services technologiques à forte intensité de main-d’oeuvre, comme des call centers par exemple. Mais l’intelligence artificielle pourrait bientôt rendre cette industrie caduc. L’Inde le sait et souhaite se diversifier dans des domaines comme les services comptables et le consulting.

Le deuxième risque est politique. Le gouvernement Modi souhaite privilégier les entreprises nationales et rend la vie très complexe, notamment sur le plan administratif, pour les entreprises étrangères s’implantant localement. À force, cela peut peser sur l’envie des grandes multinationales d’investir en Inde.

Le dernier risque est d’ordre social. Malgré sa forte croissance économique, le pays reste un pays pauvre. Son pari est que la richesse créée par les entrepreneurs ruisselera vers la population plus largement. Ce n’est pas un voeu pieu. La classe moyenne émergente par exemple, fait construire de plus en plus de maisons, ce qui crée des emplois non qualifiés dans la construction. Mais le taux de chômage reste élevé et les écarts entre les bénéficiaires de la réussite économique du pays et les centaines de millions de personnes sans formation. Et nous savons comment ce type d’inégalité peut donner lieu à des tensions sociales.

Entretien réalisé par Laurence Aubron.