L'éco de Marc Tempelman

L’investissement passif, l'édito de Marc Tempelman

L’investissement passif, l'édito de Marc Tempelman

Bonjour Simon, et merci. Je pensais que nous pourrions parler de l’investissement passif qui est une forme de placement de plus en plus populaire, avec de nombreux avantages pour les épargnants, mais qui a pris une telle ampleur que nous sommes en droit de se poser des questions sur son futur.

Très bien. Alors pour parler de l’investissement passif, par où devons-nous commencer ?

Pour expliquer l’investissement passif, faisons d’abord deux pas en arrière et parlons brièvement de classes d’actifs. Les classes d’actifs, ce ne sont ni plus ni moins les formats différents dans lesquels un épargnant peut investir. Les plus connues sont les actions – qui sont des titres qui représentent une part de la société dans laquelle on devient actionnaire – et les obligations, qui sont des titres de dette par lequel on devient prêteur d’une société. Mais il y a aussi les commodités, comme le pétrole, le zinc et le gaz naturel, les matières premières, comme l’or et l’argent, ou encore l’immobilier.

Ces différentes classes d’actifs s’échangent en bourse, dans les grandes places financières du globe à des prix qui fluctuent et qui sont affichés en continue. On dit qu’elles sont côtées.

D’accord, mais en quoi cela nous mène vers l’investissement passif ?

Eh bien, pour faciliter l’observation rapide de l’évolution générale des prix dans une classe d’actifs donnée, les opérateurs ont inventé les indices. Vous en connaissez sûrement plusieurs, comme le CAC40, qui regroupe les 40 plus grosses sociétés françaises, le « S and P 500 » qui combine les 500 plus importantes capitalisations boursières côtées à New York ou encore le NASDAQ.

Et comme l’inventivité des financiers ne connait pas de limites, les banquiers ont construit des fonds qui sont composés uniquement des valeurs qui rentrent dans un indice donné, et dans les proportions exactes de celui-ci. Par construction ces fonds répliqueront la performance de l’indice. D’où leur nom de fonds indiciels. Un investisseur qui souhaite que son placement ait la performance du CAC40 peut alors procéder de deux façons. Soit il achète les 40 valeurs qui composent cet indice en achetant lui-même et en direct les actions d’Accor, Bouygues, L’Oréal, LVMH et j’en passe, ou il achète tout simplement ce fonds indiciel CAC40. 

En adoptant cette seconde solution, il effectue ce qu’on appelle un investissement passif.

Super. Donc un investissement passif est en fait un investissement ou l’épargnant ne réfléchit pas trop et mise sur un marché dans sa totalité, sans faire de choix à l’intérieur de celui-ci ?

Exact. Alors il s’agit bien sûr de bien réfléchir à combien vous voulez investir et dans quel indice, car chaque classe d’actifs à son indice général, mais ensuite il y existe des indices spécialisés pour ceux qui veulent suivre spécifiquement le marché des actions de sociétés pharmaceutiques, ou celui des obligations étatiques des marchés émergents. Donc dans la pratique il existe des milliers d’indices.

Ah oui, ce n’est donc pas aussi simple que cela. Mais je vois bien l’avantage que cela peut avoir. Car une fois qu’on a décidé de ou des indices que l’on souhaite répliquer, l’investisseur n’a plus trop à réfléchir et son placement devient très simple à effectuer.

Oui, la simplicité est l’un des avantages majeurs de l’investissement passif. En plus, l’investissement passif coûte peu en commissions. Comme le gestionnaire du fonds n’a qu’à copier l’évolution d’un indice et que ses actions lui sont dictées, il peut automatiser les opérations d’achat vente et réduire ses coûts, ce qui se reflète dans des commissions moins élevées pour les fonds indiciels que pour les fonds gérés activement. Enfin, l’investisseur ne souffre pas nécessairement en termes de rendement, car sur des périodes relativement longues, il n’y a que très peu d’investisseurs qui surperforment le marché dans lequel ils opèrent. C’est pourquoi Warren Buffet, sans doute l’un des meilleurs investisseurs au monde, recommande l’investissement passif à toute personne qui souhaite placer un peu d’argent en bourse et qui n’est pas expert en la matière.

Génial, mais alors on devrait tous le faire et arrêter de boursicotter nous-mêmes ?

Votre remarque est un peu le reflet de la réalité. Depuis 2010, les fonds indiciels ont reçu presque 3000 milliards de dollars en investissements, aux dépens des fonds actifs, qui ont vu leur encours baisser de plus de 2000 milliards de dollars. A tel point qu’on peut se poser la question de la limite de l’exercice. En effet, les sociétés de gestion spécialisées dans les investissements passifs dominent aujourd’hui le monde de l’investissement et donc on peut légitimement se demander s’il est sain que des groupes comme Blackrock ou Vanguard concentrent autant de pouvoir. Car au-delà des retours financiers que nous pouvons espérer de nos investissements, il est aussi du devoir des actionnaires de surveiller les dirigeants d’entreprises en matière de gouvernance et d’impact sociétal. Et ce sont donc ces quelques gestionnaires qui peuvent imposer des comportements en faveur du respect de l’environnement, l’égalité hommes/femmes ou encore de la réinsertion sociale…. Ou pas.