Chaque semaine sur euradio, retrouvez Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’épargne gratuite Cashbee, qui traite les sujets et les actualités de la finance.
Nous accueillons Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’épargne gratuite Cashbee. Nous discutons toutes les semaines de finance. Bonjour Marc, de quoi allons-nous parler aujourd’hui ?
Bonjour. Je souhaitais vous parler aujourd’hui de la dette de l’Union européenne, qui lui coûte plus chère que ne devrait.
Très bien. Premier point à clarifier, vous dites que l’Union Européenne s’endette en son nom ?
Oui. Nous avons déjà pu échanger sur la dette que les différents pays qui constituent l’Union européenne contractent en leur nom sur les marchés obligataires. La France est d’ailleurs un des pays européens qui a le plus sollicité les marchés financiers, avec plus de 2500 milliards d’euros de dette émise sous forme d’OAT, ou Obligations Assimilables du Trésor.
Mais à côté de ces programmes de financement nationaux, l’Union européenne a également émis des obligations en son nom. Elle s’endette beaucoup ? Pour quelles raisons doit-elle s’endetter ?
Le volume d’obligations émises par l’Union européenne était plutôt modeste avant 2020. Il était alors d’environ 50 milliards d’euros. Mais en réponse à la crise du Covid, elle a fortement augmenté son niveau d’endettement pour financer les programmes de relance. Et l’Union européenne va accroître son endettement encore plus pour financer son soutien à l’Ukraine ainsi que la transition énergétique. Ainsi, le volume de la dette dépasse les 450 milliards d’euros aujourd’hui. Et ce montant devrait doubler pour atteindre 900 milliards d’euros à la fin de 2026.
Avec un tel volume de dette l’Union européenne serait le 5ème plus gros emprunteur étatique en Europe, derrière l’Espagne, mais devant la Belgique.
Et vous dites que cette dette coûte chère. Est-ce à cause de la remontée des taux ?
Oui mais pas que. Bien sûr que la hausse des taux généralisée a un impact sur le niveau auquel tous les emprunteurs s’endettent, y compris l’Union européenne. Le budget pour payer les intérêts sur sa dette est d’ailleurs passé de 2,1 à 4 milliards d’euros. Mais c’est le coût relatif de la dette de l’Union européenne qui est le plus surprenant.
Vous voulez dire que l'Union européenne s’endette à un tarif plus élevé que certains pays qui la constituent ?
Exactement. Et la comparaison la plus flagrante est avec la France. Sur une durée de 10 ans, la France peut s’endetter à un taux de 3,40%, alors que l’Union européenne doit payer 3,60%. Vous me direz que la différence de 0,2% n’est pas énorme, mais sur 10 milliard de dette, cela représente 20 millions d’euros par an tout de même. Et cela alors que selon les agences de notation, le risque France est moins bon que le risque Union européenne. Notre pays est noté dans la catégorie des émetteur AA, alors que l’Union européenne jouit de la plus haute notation de triple-A.
Comment expliquer cette différence alors ?
Plusieurs explications peuvent être avancées. La première est que les obligations de l'Union européenne ne font pas partie des indices obligataires. Tout fonds qui souhaite répliquer un indice obligataire doit acheter des obligations de la France et de l’Allemagne, ce qui crée une demande structurelle en faveur des obligations étatiques. La seconde est que la liquidité - c’est-à-dire la facilité et la certitude avec laquelle un investisseur peut acheter et vendre des titres - est moins bonne pour les obligations de l’Union européenne.
L’Union Européenne fait tout pour améliorer cette situation, œuvrant notamment à la création d’un marché de futures sur ses titres obligataires. Ce type de marché existe depuis longue date pour les OAT françaises. Le vrai sujet pour les investisseurs est de savoir si le programme obligataire de l’Union européenne, initialement conçu pour faire face à la crise sanitaire, puis la guerre en Ukraine, a vocation à se pérenniser. Sans cela, il est fort à parier que l’Union européenne continuera de devoir surpayer pour s’endetter.
Un entretien réalisé par Laurence Aubron.