En Europe, le terme "logement abordable" est sur toutes les lèvres. Promesse d’un toit pour tous, il s’est imposé comme le nouveau mantra des politiques publiques. Mais derrière son apparente évidence, le concept cache une ambiguïté que dénonce le 10ᵉ Regard sur le mal-logement en Europe, publié par la FEANTSA et la Fondation pour le Logement des Défavorisés.
Ce rapport pointe un glissement préoccupant : au lieu de répondre à la crise du logement des plus précaires, l’abordabilité sert souvent à ouvrir un nouveau segment de marché, taillé pour les classes moyennes. Dans plusieurs pays, les financements publics dérivent vers des programmes dits "intermédiaires", censés attirer l’investissement privé, au détriment du logement social à bas loyers. Résultat : l’offre réellement accessible se réduit, alors que les loyers et les prix s’envolent.
Pour la FEANTSA, cette dérive n’est pas qu’économique, elle est aussi politique. "Le choc de l’offre ne suffira pas, il n’y aura pas de ruissellement", prévient le rapport, qui appelle à replacer les plus vulnérables au cœur du futur Plan européen pour le logement. Car 40 % des ménages modestes consacrent déjà une part excessive de leurs revenus au logement.
L’Union européenne a reconnu, dans son Socle des droits sociaux, que le logement est un droit. Encore faut-il le rendre effectif, "l’abordabilité n’est pas un slogan", rappellent les auteurs : elle doit signifier qu’aucun citoyen ne soit laissé sans toit, ni contraint de choisir entre payer son loyer et se nourrir.
Alors que la Commission européenne prépare un Plan pour le logement abordable, la FEANTSA et la Fondation pour le Logement appellent à un recentrage : faire du logement social et abordable le cœur des politiques européennes.