Cette semaine, François Delay de La case des Pins nous présente deux livres de sa sélection : "Que sur toi, se lamente le tigre" et "Bel abîme" aux éditions elyzad.
Parlons d'une maison d'édition que vous ne connaissez peut être pas, mais que je vous recommande de regarder de près. Les éditions elyzad sont nées à Tunis en 2005, dans un contexte politique évidemment difficile et qui avait, avec un projet que je trouve seulement magnifique, qui est quelque part d'inverser le sens de transfert de la littérature non pas du Nord vers le sud, mais plutôt du sud vers le vers le nord.
Cette maison veut donner à entendre les voix des romanciers historiens de l'imaginaire qui disent la parole tue, celle qu'on ne peut pas exprimer librement. Cette maison d'édition aujourd'hui a dans son catalogue un nombre important de titres et je voudrais insister sur deux d'entre eux.
Le premier a eu été honoré du prix Goncourt du premier roman en 2021. Il est écrit par une Française, Émilienne Malle Fatos. Et le titre de ce livre est "Que sur toi, se lamente le tigre". Une phrase, une phrase de ce roman qui a été pour moi un véritable coup de cœur, vous fera tout de suite comprendre le contexte de ce roman chez nous. Mieux vaut une fille morte qu'une fille mère.
On est donc plongé dans une société fermée où règne l'autorité masculine et le Code de l'honneur. Et on va dans ce roman court roman. Entendre la voix de différents acteurs la mère de la supplicié, le frère qui va devoir tuer sa soeur et d'autres membres de l'entourage. C'est poignant.
C'est un roman court, dense, très intense et totalement bouleversant. On est pantois devant le fait qu'une telle réalité existe encore de nos jours. Et pourtant, Émilienne Malphas Fatto, qui est autrice, mais aussi photojournaliste photographe indépendante, traduit la réalité. Lisez ce roman qui a été honoré du prix du Goncourt du premier roman. C'est remarquable.
Le deuxième roman de cette maison d'édition dont j'aimerais vous parler est de Yamen Manai. Yamen Manai avait été déjà remarqué pour un titre qui s'appelle Lama ardent, qui est un titre qui illustre en fait un certain nombre de problèmes que nous rencontrons dans cette dans notre société et qui est très étonnant dans la manière dont il a été écrit, puisque on est à la fois dans le domaine du luxe et des propriétaires de yacht luxueux de princes de royaume. Et puis aussi dans le domaine d'un apiculteur qui vient de découvrir ses ruches massacrées par un prédateur inconnu.
Après Lama ardent, Yamen Manai a écrit Bel abîme. Bel abîme, c'est la voix d'un jeune homme de 15 ans dont on ignore le nom. On sait qui vient de Tunis et qui est interrogé par son avocat commis d'office et son psychiatre pour des faits graves. Et à nouveau, c'est un cri de rage, un cri de fougue sorti de la bouche de cet ado qui n'a été épargné ni par sa famille ni par le pays, qui laisse des jeunes sans avenir et les pauvres sur le carreau. Comment ce gamin en est il arrivé là ? Vous le lirez en découvrant Bel abîme.
Ce qui est fantastique avec cet auteur, c'est que toute la rage, toute l'injustice dont est victime ce jeune est bien le lecteur que j'ai été. La ressentit de plein, ce texte à nouveau particulièrement saisissant. Un nouveau bref et puissant m'a totalement secoué. Bel abîme, aux remarquables éditions elyzad.
Tous les livres proposés par la Case des pins sont à retrouver juste ici !