Toutes les semaines, la chronique « L’Europe, le monde, la paix » donne la voix sur euradio à l’un·e des membres du collectif de chercheur·ses réuni·es dans UNIPAIX, le Centre d’Excellence Jean Monnet basé à Nantes Université.
Ramona Feillet, en tant que présidente du comité de jumelage entre Carquefou, près de Nantes, et Racovita, en Roumanie, vous êtes engagée dans l’action concrète pour une meilleure compréhension entre Européens.
Oui, le comité de jumelage, c’est le lieu où s’exerce la citoyenneté européenne au quotidien, où s’entretiennent des liens tissés avec d’autres communes d’Europe, parfois sur des décennies. On y apprend à connaitre les autres pour laisser de côté nos préjugés, favoriser les échanges culturels et sportifs, transmettre nos valeurs pour vivre dans une Europe en paix.
Samedi 1er juin dernier, les comités de jumelage de Loire-Atlantique tenaient leur rencontre annuelle et cette année, notre Comité de Carquefou, jumelé avec Racovita, commune située au cœur de la Transylvanie, à plus de 2500 km d’ici, était à la manœuvre pour organiser cette rencontre départementale. La thématique retenue collait à la perspective des jeux olympiques, et au « sport » comme grande cause nationale de l’année.
Comment avez-vous mis en œuvre cette thématique ?
Il se trouvait que cela coïncidait avec l’organisation du premier tournoi européen d’échecs de la Maison de l’Europe en partenariat avec le Cercle d’échecs de Nantes et le Club d’échecs de Carquefou. L’occasion de réfléchir sur la place du sport dans la vie et l’histoire des comités du département. D’où le titre de la table ronde proposée à l’aide des historiens membres d’Unipaix, Sylvain Dufraisse et Stanislas Jeannesson : « le sport, pour quoi ?» (en deux mots, s’il-vous-plaît !).
D’accord. Et quelle réponse apportez-vous à cette question ?
Cela fait trois ans que notre comité s’est ouvert à la pratique sportive – car le jeu d’échecs est bien un sport ! – en invitant chaque mois les jeunes du collège de Racovita à jouer en ligne avec des jeunes du club d’échecs de Carquefou. Pas besoin de maîtriser la langue de l’autre, seulement les règles du jeu. La « cerise sur le gâteau » a été de se retrouver quelques fois aussi en présentiel soit à Racovita, soit à Carquefou pour se connaître au-delà du jeu, vivre en famille, aller à l’école, découvrir l’environnement. Mieux se connaître permet de mieux comprendre la culture de l’Autre, de se respecter en tant que citoyen européen.
Le jeu, le sport, quel qu’il soit, permet de se mesurer en toute amitié. Comme l’a dit un des intervenants : « devant un échiquier, on a des pièces, une pendule et on ne s’occupe pas de la nationalité de l’adversaire ! » Le sport devient le langage commun. Alors « le sport pour quoi ? ». C’est simple : pour outil de communication pour la paix !
Place au jeu donc ! Racontez-nous votre grand tournoi d’échecs international !
Avec plaisir. Imaginez 64 joueurs comme autant de cases d’un échiquier réunis dans un lieu symbolique : l’agora de la Maison de l’Europe à Nantes ! Ce lieu a fédéré des joueurs originaires de différentes régions européennes : d’Espagne, d’Allemagne, de Roumanie, d’Ukraine, de France bien sûr, et même d’un peu plus loin comme la Géorgie, et l’Inde.
S’il a été difficile, malgré nos efforts, de respecter la parité hommes-femmes (seulement 11 participantes féminines), la dimension intergénérationnelle a très bien fonctionné : le plus jeune joueur était âgé de seulement 6 ans et le plus âgé de 81 ans. Un autre point de satisfaction a été le mélange des origines sociales de tous horizons.
Je présume que vous avez hâte de récidiver ?
C’est sûr. Il reste encore des points d’amélioration pour une seconde édition – on peut toujours mieux faire – mais pour une première nous retenons surtout la satisfaction des participants heureux de se retrouver pour un tournoi à taille humaine dans un lieu symbolique. Et on confirme que le jeu d'échecs, par son langage universel et son caractère intergénérationnel, promeut une culture de la paix et la coopération internationale.
Pour clôturer le tournoi, rien de plus émouvant et symbolique, que de faire entendre à tous les participants les paroles de l’Hymne européen interprété en roumain, par Dragos, 12 ans, jeune joueur de Roumanie. Je vous la récite ?
Je vous en prie !
« Cine a avut norocul
De prieten bun sa dea
Cine stie ce-i iubirea
Langa noi cantind sa stea.
Fericit un suflet drag
Te poate face pe Pamant
Cine n-a simtit iubirea
Plece dintre noi plangind. »
Merci Ramona Feillet, pour ce partage d’expérience, et félicitations pour cette belle initiative menée par le comité de jumelage entre Carquefou et Racovita.
Un entretien réalisé par Laurence Aubron.