L'Europe, le monde, la paix

Les jeunes, le sport, la paix

© Lysander Yuen sur Unsplash Les jeunes, le sport, la paix
© Lysander Yuen sur Unsplash

Toutes les semaines, la chronique « L’Europe, le monde, la paix » donne la voix sur euradio à l’un des membres du collectif de chercheurs réunis dans UNIPAIX, le Centre d’Excellence Jean Monnet basé à Nantes Université.

Aziliz Leduc, en tant que chargée de la coordination du projet UniPaix, vous avez participé à la Fête de la Science 2023, et vous y avez rencontré de jeunes lycéens.

En effet, sachant que le thème de 2023 était le sport, c’était l’occasion pour nous d’aborder avec eux un sujet d’actualité, à savoir le lien entre le sport et la paix.

Se sont donc succédées tout au long de la journée des classes des lycées professionnels et technologiques de la région nantaise, à qui nous avons proposé un petit sondage suivi d’un debriefing. Notre questionnement était : ces jeunes, comment voient-ils la paix ? Et quel rôle joue, dans leur perception, le sport dans la préservation de cette paix ?

Et quel type de réponses avez-vous recueillies ?

Eh bien, pour commencer, il en ressort que la paix revêt plusieurs dimensions : c’est d’abord un idéal teinté de symbolisme – les jeunes parlaient ainsi spontanément de colombe, de drapeau blanc ou de liberté pour l’évoquer. Mais c’est aussi une condition même du bien-être individuel : ce sont des mots comme « tranquillité », ou « sérénité » qui leur venaient à l’esprit. Enfin, la paix est bien évidemment une aventure collective : les lycéens y associent le respect, l’amitié ou encore le partage.

Le partage, c’est peut-être bien là que le sport à son rôle à jouer !

Ce qui est sûr, c’est que la grande majorité des sondés était d’accord pour dire que le sport favorise la bonne entente entre les nations.

Ce qui nous a passablement surpris, c’est la corrélation que les élèves semblent établir spontanément entre deux questions bien distinctes, à savoir, d’un côté, la capacité d’un pays à promouvoir la paix et, de l’autre côté, sa reconnaissance en tant que nation sportive.

On s’attendait à un décalage, mais pas du tout. Les résultats sont sans équivoque : moins le pays est considéré comme pacifique, plus sa note sportive est basse. Ainsi, la Chine, la Russie ou l’Arabie Saoudite – réputées belliqueuses ou peu soucieuses des droits humains – sont aussi perçues comme très mauvaises en sport. Peu importe que la Russie soit extrêmement performante en sports hivernaux, que la Chine caracole en haut du tableau des médailles, ou que l’Arabie Saoudite s’offre à prix d’or les meilleurs athlètes et les plus grands événements. En somme, dans leur tête, mieux vaux œuvrer à la paix internationale si on veut être reconnuspournosexploitssportifs !

Surprenant, en effet. Comme quoi, la proximité de questions dans un sondage peut suggérer des corrélations inexistantes. Avez-vous posé une question au sujet de la présence d’athlètes russes aux JO de Paris ?

Oui, avec des réponses très divisées, même si globalement en faveur d’une participation, avec ou sans symboles nationaux. Leur argument principal est en gros celui du comité olympique : les athlètes ne sont pas le gouvernement, et peut-être ne soutiennent même pas la guerre menée à l’Ukraine.

Et nous avons profité de l’occasion pour sonder aussi ces jeunes sur leur perception de l’Union européenne. Et les réponses ne correspondaient pas vraiment à nos attentes. Etes-vous bien assise, Laurence ?

Vous serez surprise d’apprendre que pour la majorité des élèves interrogés, l’Union européenne avait échoué, depuis 70 ans, à assurer la paix entre ses Etats-membres. Un quart d’entre eux – seulement un quart, on aurait envie de dire – considère qu’elle reste un acteur crédible en faveur de la paix dans le monde, et pour près d’un tiers seulement, elle doit s’élargir davantage pour permettre à des pays en conflit d’accéder à la paix.

D’accord. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il y a un travail d’explication à faire.

C’est certain. L’impression générale qui s’est dégagée de cet exercice (qui n’avait rien de scientifique, soit dit en passant) est que dans le flot des informations auquel sont exposés de jeunes citoyens, via des canaux plus ou moins fiables, plus ou moins précis, il leur est très difficile de former une idée différenciée d’un environnement européen et international pourtant de plus en plus complexe.

Raison de plus pour continuer notre travail au quotidien. Merci, Aziliz Leduc, d’avoir partagé vos impressions de ces rencontres. Je rappelle que vos êtes chargée de mission pour le Centre d’Excellence Jean Monnet UniPaix à Nantes.