Edith Le Cadre est directrice de recherche en agronomie à l'institut agro. Une semaine sur deux sur euradio, elle décrypte les différents sens l'agroécologie et se demande si cette dernière peut être une solution aux enjeux de notre époque.
Vous souhaitiez nous faire découvrir les figures de l’agroécologie, en débutant par Miguel Altieri.
Oui, Miguel Altieri est professeur à l’université de Berkeley en Californie. C’ est un entomologue, c’est-à-dire un écologue spécialisé dans l’étude des insectes. Je l’ai choisi, car il a donné une visibilité à l’agroécologie comme discipline scientifique.
Pourquoi l’avoir choisi lui ?
Je l’ai choisi pour une série d’ouvrages qui restent encore cités à ce jour, 10 à 20 ans après leurs éditions. Ses ouvrages s’appellent « bases scientifiques d’une agriculture alternative » et « bases scientifiques d’une agriculture durables » et ils sont remarquables.
Pouvez-vous en dire plus ?
Ces ouvrages sont remarquables pour deux aspects. Ils décrivent à la fois les systèmes agricoles alternatifs et théorisent les fondements écologiques des performances de ces systèmes.
Dans l’ensemble, on retient surtout 5 principes clef considérés comme les fondements de l’agroécologie. Ces principes mettent en exergue les différentes régulations naturelles et la préservation des ressources naturelles permise par la biodiversité et les synergies entre les composantes de cette biodiversité. En particulier, Miguel Altieri décrit les régulations des bioagresseurs de cultures dans les systèmes agroécologiques et le rôle du fonctionnement des sols pour les cycles des nutriments des cultures. Ce qui permet d’envisager une agriculture sans intrants de synthèse durable sur les 3 piliers de la durabilité à savoir sociale, économique et environnementale et également alternative par rapport au système dominant
Durable et alternative étant dans les mots des ouvrages. Mais Edith, existe-t-il d’autres auteur·es qui ont marqué les fondements de l’agroécologie ?
C’est juste de souligner que d’autres auteur·es ont contribué et en particulier des femmes.
Un exemple ?
Oui, Rachel Carson une biologiste marine. Rachel Carson a publié en 1962 un ouvrage appelé « le printemps silencieux » . Ce livre décrit le spectre d’un printemps dans lequel les oiseaux auraient disparu à cause de certains insecticides en particulier le DDT qui pertube la reproduction des oiseaux. Mais ce livre pose également le lien entre l’utilisation des pesticides et l’apparition des cancers chez les humain·es.
J’ai choisi de citer Rachel Carson, car son courage et sa détermination sont responsables de l’émergence du mouvement environnementaliste aux USA et de l’agroécologie.
Nous renvoyons d’ailleurs nos auditeur·rices sur cette perspective historique à la première chronique. Je sais que le choix a été difficile, quels autres figures auriez vous souhaité présenter ?
Pour une approche plus intégrée aux systèmes alimentaires et politiques, Stephen Gliessman est incontournable. Tandis que pour la dimension sociopolitique, Eduardo Sevilla Guzman est à lire. Et enfin, pour une approche plus philosophique, voire spirituelle, je peux citer Pierre Rabhi.
Ces figures ont élevé l’ambition d’une agroécologie à leur époque et ont permis à une nouvelle génération de s’emparer de ce sujet. Mais c’est sans oublier nombre d’autres auteur·es qui ont construit également l’agroécologie dans toutes ses définitions.
Je reviens sur cette question des pesticides qui reste d’actualité. Par exemple, le débat en cours la diminution forte des populations d’insectes, dont les abeilles ou les papillons
Oui, je vous propose d’en discuter lors d’une chronique sur la protection des cultures.
Retrouvons-nous alors pour une prochaine chronique pour aborder cette question.
Entretien réalisé par Laurence Aubron.