L'agroécologie, notre rapport à la nature

Développer et financer l’agroécologie

Sandy Millar sur Unsplash Développer et financer l’agroécologie
Sandy Millar sur Unsplash

Mouvement social ou politique, discipline scientifique... l'agroécologie est décidément un terme que tout le monde connait, rejette ou revendique. Dans cette chronique, Edith Le Cadre-Barthélémy, professeure à l'Institut Agro Rennes Angers, décrypte, sur euradio, les différents sens de ce mot.

L’agroécologie est reconnue par plusieurs organisations internationales et inter gouvernementales comme un chemin réaliste de transformations des systèmes alimentaires afin de répondre aux enjeux socio environnementaux, mais quels sont les fonds alloués et les communautés de pratiques associées des personnes oeuvrant pour l’agroécologie. Edith Le Cadre vous nous proposez de décryter ces deux points aujourd’hui

Pour répondre à cette question, il est important de reprendre les différentes formes d’agroécologie qui vont d’une agroécologie faible à forte. Stephen Gliessman propose 5 niveaux, le plus bas, celui d’une agroécologie faible est basé sur l’augmentation de l’efficience des pratiques actuelles pour réduire l’utilisation et la consommation d’intrants. Ce niveau correspond à réduire les quantités d’engrais, de pesticides, d’au ou d’énergie.

Le niveau suivant, est la substitution par exemple les engrais synthétiques sont remplacés par des composts, l’agriculture biologique entre à partir de ce niveau.

Ensuite les autres niveau 3 à 4 emmènent vers une reconception des agroécosystèmes pour utiliser les régulations écologiques, puis un rétablissement des liens avec les consommateurs, et enfin, celui le plus élevé, le niveau 5 qui est un système complètement nouveau basé sur l’équité, la démocratie et la justice. Ce niveau est considéré comme le plus achevé en terme de respect de la biodiversité et plus largement de la vie sur Terre.

Est ce que ces niveaux sont liés ?

Oui, chaque niveau, se construit sur la base du précédent et les incorporent, il ne faut donc pas d’exclusion mais une progression depuis le niveau le plus bas vers les plus les hauts, sans arrêts (ou auto satisfaction).

Si le dernier niveau est la cible à atteindre il est très ambitieux et constitute d’apres son auteur lui même comme un guide plutôt que comme une cible, par contre les autres niveaux sont des étapes pour transitionner vers l’agroécologie. Si il est un point de départ pour des agricultures conventionnelles, en monoculture et consommatrice d’intants, il est difficilement applicable pour des petites exploitations appartement des pays du Sud

La progression entre les niveaux 1-3 est une progression agronomique ou environnementale de l’agroécologie, avec des changements associés à la parcelle ou la ferme, mais les niveaux 4 et 5 sont plus intégrés vers les systèmes alimentaires. Dans la réalité, ce sont des processus de transition qui opérent simultanément.

A quoi peut servir cette catégorisation concrètement

Si conceptuellement la catégorisation peut être considérée insatisfaisante, ils ont l’avantage de permettre d’instruire des projets, de communiquer et d’alerter. Ainsi des ateliers de travail réunissant financeurs, chercheurs, représentants de la société civile et des organisations agricoles peuvent s’accorder, et identifier des drapeaux rouges de projets qui ne sont pas soutenus.

L’autre avantage est que ces ateliers peuvent établir des indicateurs qui permettent d’évaluer la contribution de ces projets à l’agroécologisation et de suivre les dynamiques

Ainsi il est possible de définir des communautés de pratiques

Qui finance l’agroécologie en France ?

Majoritairement des fonds publics nationaux et européens, mais des donateurs privés également pour les niveaux les plus hauts, les niveaux les plus bas sont abondés par les coopératives.

Pour la recherche, les fonds publics sont cruciaux car la cible à atteindre nécessite une prise de risque que les agriculteurs ne peuvent pas toujours prendre. On l’a vu dans le cas de l’arrêt des pesticides, les débats sont délicats, et il faut une vision à long terme pour rassurer sur les chemins possibles

Source : Moeller, NI, et al. 2023. Measuring agroecology: Introducing a methodological framework and a community of practice approach. Elem Sci Anth, 11: 1. DOI: https://doi.org/10.1525/elementa.2023.00042

A ré écouter : les figures de l’agroécologie, saison 1, et international et agroécologie saison 1