Profitez de la chronique "Quoi de neuf en Europe ?" chaque semaine sur euradio. Retour sur l’actualité européenne avec Perspective Europe, l’association du master Affaires Européennes de Sciences Po Bordeaux.
Dans cet épisode, la crise migratoire est le sujet principal.
Alors quoi de neuf en Europe ?
Au cœur de l’actualité européenne cette semaine se trouve le sujet épineux de la crise migratoire. L’afflux massif de migrants ces dernières semaines sur l’île méditerranéenne de Lampedusa a relancé le débat resté en suspens. La visite de la présidente de la Commission européenne sur place le 17 septembre a accéléré la prise de conscience des États-membres, les incitant à prendre leur part dans l’accueil des migrants. Ursula von der Leyen a également présenté un plan d’urgence en 10 points afin de traiter du problème le plus rapidement et le plus efficacement possible.
La crise migratoire ne date pourtant pas d’hier, n’existe-t-il pas déjà des accords européens en la matière ?
La situation est relativement complexe. La présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, a employé l’expression de “crise législative” au sujet des nombreux désaccords des Vingt-Sept concernant la crise migratoire, et en particulier ceux concernant le pacte asile et immigration. Bien qu’adopté il y a près de quatre ans par la Commission européenne, ce paquet de législations n’est toujours pas bouclé alors que son objectif de donner à l’Union européenne une politique migratoire efficace est au cœur de l’actualité ces derniers jours.
Les événements tragiques de ces dernières semaines et les injonctions de la présidente de la Commission ont-ils eu un effet sur les États-membres ?
Et bien oui ! Jeudi dernier, un échange de vues lors d'une réunion des ministres européens de l'Intérieur, à Bruxelles, a permis de dégager les grandes lignes d'un accord. En effet, nous avons assisté à un changement de position presque inattendu de l’Allemagne dans ce dossier à la suite de la présentation d’un ultime compromis par la présidence espagnole de l’UE. Cet évènement constitue une étape majeure dans le processus puisqu'il permet de réunir, enfin, une majorité qualifiée des Vingt-Sept.
Qu’est-ce qu’on peut attendre pour la suite ?
Cela constitue définitivement un pas de plus vers l’accord tant attendu mais le vote formel a été renvoyé à la prochaine réunion des ambassadeurs. L’issue positive de ce dernier ne laisse néanmoins plus trop de doutes, en dépit du fait que la Hongrie et la Pologne aient fait savoir qu’elles s’y opposeraient fermement. Le ton est donc donné pour les grandes réunions européennes à venir, notamment pour le Conseil européen informel de Grenade qui aura lieu le 6 octobre.
Cette réunion interministérielle à Bruxelles était-elle la seule de la semaine en matière d’immigration ?
Non, effectivement les dirigeants des neufs pays européens bordant la mer Méditerranée se sont retrouvés ce vendredi à Malte dans le cadre du sommet du Med9. L’objectif principal de ce dernier était alors d’accorder leurs positions, notamment sur la question de la crise migratoire. L’Élysée déclarait ce mercredi avant la réunion attendre “un message clair sur le niveau européen qui doit être celui de la réponse, notre réponse commune au sujet migratoire”.
Et alors, est-ce que ce fut le cas ?
L’objectif principal était de voir comment mettre en œuvre le plan en dix points de la présidente de la Commission. Les neufs pays du sommet ont donc fait converger leurs positions et se sont accordés sur un rapprochement avec les pays de la “rive sud” de la Méditerranée, c’est-à-dire les pays d’Afrique du Nord et par extension, ceux du Sahel. Emmanuel Macron et Giorgia Meloni, la présidente du Conseil italien, ont par exemple plaidé conjointement pour un dialogue étroit avec la Tunisie.
Comment se fait-il que ces deux pays réussissent à s’accorder aussi rapidement sur un sujet aussi épineux alors que les tensions franco-italiennes à ce propos sont récurrentes depuis des années ?
Dimanche dernier, Emmanuel Macron avait déjà salué la position de Giorgia Meloni, parlant d’une “prise de responsabilité” et déclarant : “On ne peut pas laisser les Italiens seuls”. Le président français et la présidente du Conseil italien se sont ensuite longuement entretenus mardi à Rome, assurant vouloir apporter une réponse européenne plutôt que nationaliste à la crise migratoire.
Cette opinion est-elle partagée par tous au sein de l’UE ?
Certains pays vont certainement se montrer récalcitrants comme la Pologne ou la Hongrie. Néanmoins, la présidente du Parlement européen Roberta Metsola a souligné l’importance de l’adoption de mesures communes européennes en la matière, notamment le pacte migratoire, et ce, avant les élections européennes de juin 2024. En effet, ce dossier sensible empoisonne les débats entre les différents États-membres depuis près de 10 ans et est un des marqueurs forts de la législature actuelle. Un échec de plus dans ce domaine serait perçu comme un signe d’impuissance de l’Union.
Entretien réalisé par Laurence Aubron.